Une région concentrée sur quelques grandes compétences, ce n’est pas la même chose qu’une région dispersée dans une multitude compétences. Que vont-elles faire ? Certains évoquent les collèges, d’autres les routes départementales… Et puis quelle place pour les conseils départementaux ? Bref, monsieur le secrétaire d’État, il m’aurait semblé plus logique de définir d’abord leurs compétences avant d’entamer le débat sur leur délimitation.
Mais vous nous conviez à un tel débat, et j’y participe animé de deux convictions très fortes. La première, c’est que les futures régions doivent exercer la plénitude des compétences économiques, c’est-à-dire, tout d’abord, pouvoir définir la stratégie de développement économique des territoires. Autant je suis persuadé qu’il n’y a en France aucun territoire perdu, autant je pense que tout territoire doit travailler sur la stratégie de développement économique pour que celui-ci se réalise. Exercer la compétence économique, c’est aussi pouvoir soutenir les filières présentes sur le territoire et, à mes yeux, cette compétence doit être exercée par un tandem composé des intercommunalités et du conseil régional. Hélas ! je constate que très souvent, les intercommunalités n’exercent pas toutes leurs compétences économiques alors que l’intérêt général du pays et la volonté du législateur, c’est qu’elles le fassent. Trop d’entre elles se sont dispersées dans des actions multiples, fiscalement coûteuses, et n’assurent pas ce travail. Pour les régions, exercer la plénitude des compétences économiques, c’est évidemment se concentrer aussi sur le développement de l’enseignement supérieur et de la recherche. Dans tous les pays voisins, les régions qui fonctionnent bien montrent que le développement économique et l’innovation se créent à partir de liaisons entre laboratoires de recherche et entreprises. Et puis il ne faut bien sûr pas oublier la formation professionnelle : je tiens à redire en cet instant combien je suis attaché au développement de l’alternance et de l’apprentissage, et nous avons en France beaucoup de retard en la matière. Voilà ma première conviction : il nous faudra des régions puissantes exerçant une compétence économique forte.
Seconde conviction : il faut une clarification des compétences. Certes, on peut tous se réjouir des multiples initiatives des collectivités locales depuis plus de trente ans. Mais l’honnêteté nous oblige à reconnaître que cette augmentation de leurs activités a entraîné une augmentation de la fiscalité. En langage consumériste, on dirait que le rapport qualité-prix des actions de la décentralisation n’est pas bon : il y a trop de doublons, trop de collectivités qui se marchent sur les pieds. Et puis monsieur le secrétaire d’État, il ne peut y avoir une action locale forte que s’il y a un contrôle démocratique. Lorsque dans une commune, une école maternelle ou primaire n’est pas en état, les parents d’élèves, par ailleurs électeurs, savent qui en est responsable et, le cas échéant, modifient leur vote. Mais lorsqu’une zone économique ne se remplit pas, qui en est responsable ? Est-ce le conseil général, l’intercommunalité, le chambre de commerce ou le conseil régional ? Nous ne pouvons pas, à la fois pour la modération fiscale qu’appellent de leurs voeux les contribuables, pour l’efficacité économique et pour le contrôle démocratique, conserver un tel flou.
Ces questions ne sont pas réglées à ce jour, et vous nous proposez un débat sur la délimitation des régions. Je vous ai écouté ainsi que le Premier ministre dire que le Gouvernement faisait sienne une carte de treize régions qui, dans l’est de la France, prévoit une région Alsace-Lorraine-Champagne-Ardenne ; j’ai voté, la semaine dernière, pour cette proposition en commission des lois et je le referai, monsieur le secrétaire d’État, au cours de cette lecture.