Intervention de Marie-Jo Zimmermann

Séance en hémicycle du 18 novembre 2014 à 15h00
Délimitation des régions et modification du calendrier électoral — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Jo Zimmermann :

Je voudrais revenir brièvement sur le parcours législatif de ce texte.

Alors que l’on partait d’une carte dessinée sur un coin de table par le Président de la République, cédant à des pressions politiciennes de tous bords, l’Assemblée nationale a réussi tant bien que mal à établir une carte de treize nouvelles régions métropolitaines.

En seconde lecture, le Sénat a profondément modifié ce projet, aboutissant à une carte différente ; puis notre commission des lois est revenue en deuxième lecture à l’essentiel de la version adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture.

S’il y avait eu un travail de préparation en amont, nous ne serions pas obligés aujourd’hui de faire une nouvelle carte et de réduire à néant le travail des sénateurs ; nous aurions pu au contraire intégrer celui-ci, de manière à produire un texte de qualité, qui aurait donné des bases solides à une administration territoriale digne du XXIe siècle.

Le projet de loi a pour finalité la création de nouvelles institutions s’organisant sur deux niveaux : de vastes régions entraînant la dilution des départements et de grandes intercommunalités ayant vocation à vider les communes de leurs compétences. C’est un non-sens : dans l’exercice de leurs compétences, ces deux niveaux n’auront plus de proximité avec le terrain.

Si l’on crée de grandes régions, il est indispensable de conserver un échelon de proximité, c’est-à-dire les départements ; si, au contraire, l’on supprime les départements, il faut des régions pas trop étendues, donc le maintien du statu quo.

En fait, l’ensemble du projet de loi repose sur la certitude, totalement déconnectée de la réalité, qu’il est nécessaire de créer des régions de taille « européenne ». Si des régions aussi démesurées doivent demain gérer les routes et les collèges qui sont de compétence départementale, la notion de taille européenne n’a aucun sens.

D’ailleurs, que signifie-t-elle vraiment ? Le fait de créer des régions de taille « européenne » fera-t-il disparaître soudainement le chômage ou mieux fonctionner l’économie ? La réponse est clairement non ; cela prouve que le concept est irréaliste.

Si, en Allemagne, certaines régions sont florissantes, cela n’a rien à voir avec leur taille : c’est en raison de leur structure économique, différente de la nôtre, et parce que nos voisins allemands se débrouillent mieux que nous ! Entre autres choses, ils ne traînent pas le boulet des 35 heures, ni celui d’un code du travail archaïque. On trompe nos concitoyens en leur faisant croire que tout irait mieux si l’on avait de grandes régions. C’est totalement utopique !

Un petit pays comme le Luxembourg ne répond manifestement pas aux critères de la taille « européenne » ; pourtant, il fonctionne mieux que la France : avouez qu’il y a de quoi se poser des questions ! Moi qui suis élue d’une circonscription proche du Luxembourg, je peux vous dire que c’est autre chose que la France… Le Luxembourg est la meilleure preuve que la prétendue « taille européenne » est un concept sans fondement.

En revanche, ce qui est pertinent, c’est la volonté de réduire les dépenses de gestion du millefeuille territorial. Toutefois, pour cela, il existe des solutions plus efficaces que la création de grandes régions et la suppression des départements. Il suffirait par exemple de conserver les régions actuelles, qui sont de taille humaine, et de les fusionner avec les départements.

C’est ce que proposent nos collègues alsaciens pour leur région. Dans l’hypothèse où cette option serait retenue, je souhaite qu’il en aille de même pour la Lorraine et la Champagne-Ardenne.

Outre le problème du découpage des régions stricto sensu, le présent projet de loi engage aussi les orientations du prochain volet de la réforme territoriale, qui risque de provoquer un profond bouleversement dans nos institutions. Pour ma part – je le dis très clairement –, il est tout à fait impensable de poursuivre la politique qui conduit à la disparition quasi-totale des communes au profit des intercommunalités. En milieu rural, la commune est l’échelon indispensable pour concrétiser les solidarités locales.

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