Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, je tiens tout d’abord à remercier l’ensemble des orateurs qui se sont succédé à cette tribune afin d’apporter une contribution très utile à un débat important pour l’avenir de nos territoires.
La richesse des points de vue qui se sont exprimés, la diversité et parfois l’inventivité des préconisations avancées pour améliorer le projet du Gouvernement, la passion que certains ont mis à défendre leurs conceptions montrent combien cette réforme, si longtemps attendue, était à la fois nécessaire dans son principe et délicate à orchestrer dès lors que l’on souhaitait aboutir à un consensus ou un compromis – Maurice Leroy d’ailleurs a bien voulu le reconnaître, dans des termes dont je le remercie. C’est dans cet esprit que le Gouvernement a entendu agir.
Il me semble que cet exercice touche à présent à son terme. Après vous avoir écoutés, plusieurs aspects importants du texte semblent en effet faire consensus : réformer notre organisation territoriale, réduire le nombre des régions, en redessiner la carte, laquelle fait maintenant consensus à deux ou trois exceptions près – qui certes ne sont pas des détails –, assurer une juste représentation des départements ruraux, modifier le calendrier électoral.
Au-delà de ce socle, qui paraît malgré tout assez solide, des objections, des divergences, des nuances, se sont naturellement exprimées, ce qui est bien normal dans un tel débat. Je voudrais répondre à quelques-unes d’entre elles.
Le Gouvernement a été parfois accusé de vouloir recentraliser la France en organisant le retour au sein de l’État de compétences jusqu’alors exercées par des collectivités territoriales. Ce n’est pas du tout l’intention du Gouvernement et je ne m’attendais pas, au sein de cette assemblée, à ce que puisse émerger l’idée d’un État jacobin reprenant aux collectivités territoriales des compétences qui leur avaient été déléguées par les lois de décentralisation. Je ne pensais pas non plus qu’on puisse nous reprocher de vouloir créer un État fédéral. Les deux critiques sont d’ailleurs antinomiques.
Je répondrai à M. Marc Dolez, qui s’est exprimé avec conviction et sincérité, que le fonctionnement de l’État fédéral, qu’il croit voir poindre à l’horizon de demain, exige en général la réunion de deux critères : des institutions fédérées et deux ordres juridiques superposés. Rien de tel ne figure dans ce texte. Nous voulons simplement moderniser une République qui est d’ores et déjà décentralisée.
J’admets volontiers dans cette perspective, contrairement à M. Molac, que la formule par laquelle Ernest Renan définissait la nation française et non pas le peuple français puisse s’appliquer aujourd’hui à la Bretagne – même si je connais la passion bien légitime qu’il porte à son territoire – ou à l’Alsace. Puisqu’il a le goût des citations classiques, je serais tenté de lui répondre Amor patriae nostra lex – l’amour de notre patrie est notre loi – sans pouvoir le traduire en breton, ce que je regrette.
Au-delà de ces aspects institutionnels, le but de la réforme, dois-je le rappeler à nouveau, consiste à nous doter de régions plus fortes, plus dynamiques, mieux à même de promouvoir la croissance et le développement des territoires. Le rôle de l’État déconcentré, qui relève de l’organisation interne de l’administration, n’entre pas dans l’objet de ce projet de loi. Plusieurs d’entre vous ont cependant tenu à souligner l’importance de maintenir, et même à renforcer cette présence de l’État au plus près des territoires. Le Gouvernement partage totalement cette conviction et au moment où les nouvelles régions seront mises en place, au 1er janvier 2016, l’organisation des services de l’État aura été modernisée, si les réformes suivent leur rythme, que ce soit au niveau régional ou infra-départemental.
Parallèlement, une revue des missions sera engagée, comme je l’ai indiqué tout à l’heure, afin d’amener l’État à concentrer son action sur les domaines où elle est la plus efficace et la plus nécessaire.
Certains orateurs continuent à nourrir des doutes quant à la cohérence de la réforme. Ils auraient préféré, comme M. Warsmann ou Mme Zimmermann, que la discussion relative aux compétences précède celle concernant la délimitation des régions. Cette objection aurait pris tout son sens si nous étions plongés dans la plus complète incertitude mais le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dit projet NOTRe, a été déposé avant l’été sur le bureau du Sénat. L’objectif du Gouvernement est clair : élargir les compétences des régions, et non pas les restreindre. Le débat en la matière s’engagera du reste dans quelques semaines.
D’autres orateurs, comme Mme Pécresse, M. Verchère ou M. Piron, ont regretté que le Gouvernement ait accepté de prendre en considération les points de vue exprimés au sein des deux assemblées et qu’il ait fait ainsi évoluer son projet, en particulier pour ce qui concerne l’avenir des conseils départementaux. Ils y voient le signe d’une coupable hésitation, d’une tendance à la tergiversation, voire au renoncement. N’est-ce pas la preuve au contraire que nous croyons sincèrement à la vertu du dialogue républicain, du travail parlementaire ? Comment leur collègue M. Sauvadet peut-il, dans le même temps, nous accuser d’être autistes, sourds à la critique, obstinés à faire prévaloir un point de vue partisan ? C’est soit l’un soit l’autre, mais pas les deux. À mon tour de leur demander de faire preuve de cohérence.
Enfin, l’opposition me paraît mal venue à instruire en permanence un procès d’improvisation à l’encontre du Gouvernement.