Intervention de Roger Genet

Réunion du 24 septembre 2014 à 17h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Roger Genet, directeur général de la recherche et de l'innovation au ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche :

La politique des Idex, qui consistait à faire émerger des pôles d'enseignement supérieur et de recherche au meilleur niveau international, trouve tout à fait son prolongement dans la loi du 22 juillet 2013 avec la mise en place des politiques et des contrats de sites. Les politiques de sites, celles des Idex, des ISITE et des Labex, favorisent un dialogue entre tous les acteurs de l'écosystème enseignement supérieur–formation–recherche–innovation (écoles, universités, organismes nationaux, sociétés d'accélération du transfert de technologie (SATT), instituts de recherche technologique (IRT), pôles de compétitivité, collectivités locales et État) sur un territoire et donnent des moyens pour créer une politique scientifique territoriale cohérente, à partir d'une mise en commun des diagnostics des forces et des faiblesses. La politique de sites a prolongé l'initiative prise par le ministère dans les années 2007-2008 pour établir un diagnostic et une stratégie territoriaux, qui soient un outil de dialogue entre la région et l'État et de mise en oeuvre entre les acteurs.

En revanche, nous avons à progresser sur le financement des priorités en matière de recherche – et nous le faisons. S'appuyer en 2009 sur les travaux de la commission Juppé-Rocard pour essayer d'établir des priorités dans les axes de développement scientifique devant être financés par le PIA a été utile. Cependant, cela ne s'est pas fait en concertation avec les différents ministères qui touchent à la recherche, qu'il s'agisse de ceux de la recherche, de l'industrie ou de l'agriculture, de la défense ou de la santé. Il est essentiel que ce soit le cas.

La loi du 22 juillet 2013 a institué une stratégie nationale de recherche, avec un conseil stratégique de la recherche conseillant le Gouvernement, en s'appuyant sur le ministère de la recherche, au travers de la DGRI qui est chargée de coordonner son élaboration. Nous avons à cette fin mis en place depuis décembre dernier un comité opérationnel, qui réunit, d'un côté, les directeurs d'administration centrale des huit ministères porteurs de politiques de recherche – avec notamment ceux de la défense, de la santé, de l'agriculture, de l'écologie ou de la culture –, le commissariat général à l'investissement (CGI), le commissariat général à la stratégie et à la prospective, la délégation à l'intelligence économique, et, de l'autre, les présidents d'alliances, le président de la Conférence des présidents d'université, celui de la Conférence des directeurs des écoles françaises d'ingénieurs, le CNRS, le CEA, l'ANR, le CNES, deux représentants des pôles de compétitivité et deux représentants des industriels. Nous avons ainsi créé un outil de dialogue entre les attentes en matière de politique de recherche et les opérateurs de recherche qui permette au ministère chargé de la recherche non pas d'imposer sa vision, mais de coordonner l'action des acteurs de la recherche de façon à ce que la France ait non pas plusieurs mais une politique de recherche, qui réponde aux attentes de l'ensemble des acteurs publics.

Nous avons bâti sur cette base les travaux préparatoires à la stratégie nationale de recherche, dont l'objectif est de proposer au Gouvernement quelques priorités. Il n'y a pas de raison que ce dispositif, dont des équivalents ont été mis en place en Allemagne ou au Japon, ne fonctionne pas. Il permet de réfléchir aux priorités offrant un levier fort au développement économique ou social du pays. On peut espérer que la partie d'investissements exceptionnels alimentant la politique de recherche en vue d'un tel développement s'appuie à l'avenir sur cette concertation interministérielle dans la durée, et non, seulement, sur un groupe d'experts réunis à un moment donné – ce qui peut entraîner, dans certains cas, la déresponsabilisation des services de l'État.

Par exemple, la France est dotée d'un outil, étroitement lié à notre industrie – et très utilisé par nos industriels –, dont peu de pays européens disposent : notre flotte océanographique, qui a été un des fleurons de notre recherche. Cet outil nécessite un budget de 600 millions d'euros, amortissable sur 30 ans. Cela signifie que, pour pérenniser cette flotte, il nous faudrait être en mesure de provisionner 20 millions d'euros par an pour assurer le renouvellement et la jouvence de ses bâtiments. Le financement de la flotte s'est toujours effectué par abondement exceptionnel des crédits de la MIRES. Aujourd'hui, ces financements exceptionnels passent entièrement dans le PIA, et pas par les programmes budgétaires. Il sera donc très difficile de financer le maintien de la flotte océanographique si le PIA se limite à sélectionner des appels à projet lancés selon la méthode « bottom-up » à partir des propositions des laboratoires. Il faut qu'il y ait une cohérence entre nos politiques scientifiques, ce que l'on inscrit dans les contrats d'objectifs de nos opérateurs et les financements, qui ne peuvent se limiter à être incitatifs.

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