Intervention de Patrice Carvalho

Réunion du 18 novembre 2014 à 11h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrice Carvalho :

Le Gouvernement, après plusieurs reculades, a lâché un peu vite sur un texte qui n'avait pas été compris bien qu'il ait été adopté à l'unanimité. Lorsqu'il s'était agi du mariage pour tous, il n'avait rien cédé, il est allé jusqu'au bout du débat. Je n'ai pas compris qu'il n'en ait pas été de même ici, que l'on n'ait pas expliqué le fond du problème à ces salariés qui manifestaient aux côtés de transporteurs qui, eux, allaient chercher des produits à l'étranger pour les rapporter en France… Nous avons été très mauvais en communication et nous en payons aujourd'hui les dégâts.

Je ne sais pas si Mme Ségolène Royal a lu ou non le dossier avant de prendre sa décision ; quoi qu'il en soit, et c'est un peu fort de café, alors que le président Jean-Paul Chanteguet avait été désigné pour rapporter sur cette question, on n'a même pas attendu qu'il remette ses conclusions pour balancer tout le travail fait par les députés… Bel exemple de démocratie, il y a de quoi être inquiet ! Et lorsque nous examinons le budget de l'écologie, on nous répond systématiquement que ce que nous proposons est déjà dans le texte, que ce n'est que du baratin et que nous ferions mieux de retirer notre amendement… Il serait bien temps de clarifier les choses, monsieur le secrétaire d'État.

La loi « Grenelle », adoptée à l'unanimité et qui posait le principe du pollueur-payeur – il est vrai qu'avec des camions de plus en plus lourds, l'effet de poinçonnement est de plus en plus fort et les routes tiennent de moins en moins longtemps : nous-mêmes le voyons dans nos villes et dans nos départements –, prévoyait initialement d'appliquer la redevance sur 15 000 kilomètres de routes, ce qui aurait dégagé 1,2 milliard d'euros de recettes destinées à l'AFITF et aux départements. Première reculade : seulement 4 000 kilomètres étaient désormais concernés pour une recette ramenée à 500 millions d'euros, les automobilistes devant payer à la place des poids lourds – c'est le plus fort : on fait payer des gens qui n'ont rien à voir avec le système prévu à l'origine ; ceux qui n'esquintent pas les routes vont devoir payer 2 centimes de plus par litre de gazole. Deuxième reculade : tout le dispositif est annulé et on augmente de nouveau le prix du litre de gazole de 2 centimes pour les automobilistes ! Je ne suis pas surpris que les gens n'y comprennent plus rien : il suffit d'arriver à détruire quelques sous-préfectures ou quelques préfectures pour obtenir gain de cause sur des mesures a priori incontestables !

Les automobilistes ne subiront pas que l'augmentation du diesel : ils devront s'attendre à celle de la taxe d'habitation et du foncier bâti, car il va bien falloir financer la réfection de ces routes départementales et communales ! Quant aux poids lourds, eux, ils ne s'acquittent plus que de la taxe à l'essieu et le gazole qu'ils consomment est détaxé ! Bravo ! On peut bien évoquer le transfert du transport modal vers le rail et la voie d'eau, mais tout est bien fait pour qu'on continue comme avant qu'on se retrouve, finalement, pourquoi pas, avec une augmentation du tonnage des poids lourds !

L'AFITF a perçu 400 millions de recettes en 2013 et devait en percevoir 750 millions par an. Les appels à projets lancés en 2013 montrent qu'une cinquantaine de collectivités et de syndicats de transports avaient posé leur candidature pour 117 projets. Le budget de l'AFITF est de 1,8 milliard d'euros ; mais pour réaliser les engagements pris par l'État, il en faudrait 2,2 milliards au minimum. Pour mettre en oeuvre les objectifs de la commission Mobilité 21, soit 30 milliards d'euros d'ici à 2030, il faudrait 2,5 milliards d'euros de plus par an !

Ma question est donc double. Où irez-vous chercher les recettes complémentaires nécessaires ? Enfin, pouvez-vous nous en dire plus sur le versement des compensations à la société Ecomouv', dont on sait très bien par qui elle est dirigée, et sur la solution envisagée pour les salariés concernés ?

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