J’ai déjà dit que le délai est l’arme du fort contre le faible. Or l’État est de plus en plus souvent condamné pour la lenteur de la justice : 51 condamnations en 2013 pour cause de durée excessive du traitement des dossiers par les conseils de prud’hommes.
Quatre-vingt-dix-neuf pour cent des demandes introduites devant les prud’hommes étant le fait de salariés – pour dénoncer un licenciement abusif, des relations de travail dégradées, le recours à des CDD à répétition, etc. –, ils sont les premiers intéressés à un meilleur fonctionnement des prud’hommes.
Cette réforme réaffirmera le caractère paritaire de la juridiction prud’homale, qui en est sa raison d’être : une justice du monde du travail assurée par le monde du travail.
Elle s’appuiera sur certaines propositions formulées par Alain Lacabarats, à l’issue de la concertation avec les organisations syndicales et patronales.
Elle modifiera la procédure afin de réduire drastiquement les délais. Elle renforcera la déontologie et la discipline des conseillers.
Enfin, elle permettra une avancée en matière de formation des conseillers de prud’hommes. Aujourd’hui, chaque organisation forme, transmet une culture et une expertise de l’interprétation de la jurisprudence et du code du travail. C’est important, et c’est évidemment légitime. Mais des voies de progrès existent – nous les avons évoquées à Orléans avec la garde des sceaux, il y a quelques jours – pour parvenir à une justice plus homogène et à des jugements juridiquement plus sûrs. Cela suppose une formation initiale obligatoire commune à tous les conseillers.
Cette formation sera un véritable creuset pour une justice prud’homale plus cohérente. Je suis convaincu – et j’ai le sentiment qu’il s’agit là d’un sentiment partagé – que le respect des différences et de l’identité de chacun n’empêche pas d’acquérir progressivement une culture commune, notamment sur les questions procédurales et contentieuses.
La réforme définira également un statut du défenseur syndical. Cette proposition a reçu un accueil très favorable des organisations syndicales. Aujourd’hui, il n’existe aucune règle encadrant les conditions de recrutement, de formation et de travail des défenseurs syndicaux. Le statut précisera le contenu de leur formation obligatoire, la rémunération de leurs heures de délégation, les obligations de confidentialité et de non-cumul liées à l’exercice de certaines fonctions.
Nous débattrons chacun de ces points le moment venu, mais il me semblait important d’éclairer la représentation nationale dès à présent, même si, je le répète, ce n’est pas l’objet de ce texte.
Une justice prud’homale revivifiée et incontestable est de l’intérêt de tous : des employeurs, qui ont intérêt à ce que les décisions rendues gagnent en sécurité juridique ; des salariés, qui ont intérêt à ce que les délais de jugement soient significativement raccourcis ; de notre société dans son ensemble, enfin, car une juridiction prud’homale qui fonctionne, c’est la garantie de relations sociales plus sereines. La réforme que je présente devant vous aujourd’hui est, en un sens, la première pierre de ce travail d’ampleur que nous avons entrepris avec la garde des sceaux.