Intervention de Gérard Bapt

Séance en hémicycle du 24 novembre 2014 à 16h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Bapt, rapporteur de la commission des affaires sociales :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames et messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, après l’échec de la commission mixte paritaire qui s’est réunie le 18 novembre au Sénat, notre assemblée procède aujourd’hui à l’examen, en nouvelle lecture, du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2015, dans sa rédaction adoptée par le Sénat en première lecture.

Contrairement à ce à quoi l’on aurait pu s’attendre dans la configuration politique actuelle, le Sénat a adopté un texte. Il a même adopté quarante-sept articles conformes au texte voté par l’Assemblée, lesquels ne sont donc plus en discussion. Compte tenu des articles additionnels, il revient à notre assemblée d’examiner les soixante-neuf articles qui restent encore en discussion.

Bien que le Sénat ait donc accepté un grand nombre des articles que notre assemblée lui avait transmis – Mme la ministre vient de le rappeler –, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale que nous examinons aujourd’hui est bien différent de celui que nous avons examiné en première lecture. Nous devons donc, chers collègues, nous atteler à un travail de rétablissement.

Le Sénat a sensiblement modifié les équilibres budgétaires de ce projet de loi, en particulier en ce qui concerne les dépenses des branches : il a ainsi remis en cause les économies prévues, s’agissant notamment de la branche famille.

En contrepartie, le Sénat propose de réaliser 1 milliard d’euros d’économies supplémentaire dans la branche assurance maladie, tout en remettant en cause les mécanismes de régulation des dépenses de médicaments, notamment des plus onéreux. Cela me semble complètement irréaliste : ces dispositions feraient porter la totalité des efforts d’économies sur les hôpitaux, les établissements de santé et sur la médecine de ville.

De plus, les économies proposées par le Sénat sur la branche maladie ne sont pas suffisamment étayées pour être crédibles. On ne peut pas faire porter à la branche maladie tous les efforts d’économies de la Sécurité sociale. La branche famille doit y contribuer également, de façon équilibrée.

En ce qui concerne les recettes de la Sécurité sociale, la commission vous proposera de supprimer certains articles ajoutés par le Sénat, que nous ne jugeons pas opportuns.

L’article 8 bis A, tout d’abord, élargit les allégements généraux de charges pour les entreprises et associations d’aide à domicile, structures qui bénéficient déjà d’un statut très avantageux, avec exonération totale des cotisations patronales, quel que soit le salaire.

L’article 12 bis A, ensuite, soumet aux cotisations sociales, dès le premier euro, toutes les indemnités de rupture du contrat de travail dépassant cinq fois le plafond de la Sécurité sociale.

L’article 12 sexies, enfin, exonère partiellement de cotisations d’assurance vieillesse des médecins retraités exerçant en zone sous-dense, au titre du cumul emploi retraite. Il existe, selon nous, d’autres moyens plus efficaces de favoriser l’installation et le maintien dans les territoires qui manquent de médecins.

Enfin, s’agissant de la lutte contre la fraude, nous vous proposerons de supprimer les articles 66 bis et 66 ter introduits par le Sénat de manière, là encore, étonnante. Le premier vise à contraindre le travail des inspecteurs de l’URSSAF, lesquels luttent contre la fraude ; le second prévoit que la contestation de la mise en demeure suspend toute procédure en recouvrement des cotisations. Ces articles ne sont pas de nature à renforcer la lutte contre la fraude et à la rendre plus efficiente, bien au contraire.

Par ailleurs, la commission vous proposera de rétablir certains articles supprimés par le Sénat en ce qui concerne la partie recettes : l’article 8, qui tend à créer un cadre social adapté à certaines activités occasionnelles accomplies par des professionnels, en général à titre accessoire, sous forme de concours à des missions de service public, notamment dans les domaines sanitaire et social ; l’article 28 et l’annexe B sur les prévisions pluriannuelles des comptes de la Sécurité sociale.

Cependant, un certain nombre d’initiatives des sénateurs nous ont paru intéressantes ; nous proposons de maintenir quelques modifications ou nouveautés adoptées par le Sénat et d’en examiner d’autres en séance publique. Outre des améliorations techniques et rédactionnelles, dont je vous fais grâce, la commission vous propose d’accepter les dispositions suivantes : la réduction forfaitaire de cotisations de 1,50 euro par heure déclarée pour l’emploi à domicile, quel que soit le type d’emploi – mesure qui fait l’objet d’un amendement du Gouvernement que nous examinerons en séance publique ; le relèvement de la contribution exceptionnelle des employeurs sur les retraites chapeaux ; l’exclusion des boissons à base de soja de l’assiette de la contribution sur les boissons sucrées.

La commission vous propose aussi de maintenir la suppression de l’assujettissement aux cotisations sociales des dividendes versés aux dirigeants majoritaires de sociétés anonymes et sociétés par actions simplifiées – je conviens qu’il faut travailler à nouveau sur ce sujet afin d’élaborer un dispositif permettant de limiter l’optimisation visant seulement à échapper aux cotisations sociales, sans pour autant pénaliser l’investissement et enfreindre la liberté d’entreprendre.

La commission a confirmé la suppression par le Sénat de la prime de partage des profits, dispositif compliqué qui n’a pas atteint ses objectifs. Elle retient aussi l’extension de l’exonération de contribution sociale de solidarité sur les sociétés – la C3S – aux coopératives maritimes – nous avions adopté cette disposition en première lecture pour les coopératives artisanales et de transport.

Enfin, la commission propose au Gouvernement de maintenir la suppression par le Sénat de l’augmentation de la fiscalité sur les cigares et cigarillos ; il faudrait remplacer ce relèvement très brutal par un alignement plus progressif sur les droits qui s’appliquent aux cigarettes.

En définitive, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale que la commission a adopté est un texte responsable, qui prévoit de réels efforts en dépenses, car il est indispensable de poursuivre les efforts entamés depuis le début de la législature pour le redressement des comptes sociaux. Pour autant, ce n’est pas un budget d’austérité.

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