Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mesdames et messieurs les députés, nos concitoyens doutent de l’efficacité de l’argent public affecté chaque année à la politique de protection sociale et de santé. Comment dissiper ce doute ? C’est là l’enjeu de nos débats, alors que l’actualité tend à conforter ces interrogations.
Tel est notamment le cas de la publication de la dernière étude de l’Observatoire citoyen des restes à charge, qui évalue à un peu plus de 7 milliards d’euros le reste à charge supporté par les particuliers pour pouvoir bénéficier de certains dispositifs médicaux. Le coût de ces derniers est de ce fait très élevé, alors qu’ils sont indispensables – qu’il s’agisse des lits médicaux, des fauteuils électriques, des audioprothèses ou des implants.
De même, le retard pris depuis plusieurs mois dans l’instruction des dossiers de nouveaux retraités empêche ceux-ci de bénéficier de leurs pensions et nourrit les interrogations sur l’efficacité de notre système de retraites. Ainsi, dans le Nord, en dépit de la mobilisation des équipes et de la fermeture des accueils de certaines agences de la CARSAT, la Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail, pour combler le retard, ce sont 1 740 dossiers qui restent en instance – et il n’y a aucune garantie que le problème ne se reproduise pas.
Bien sûr, il s’agit de sujets complexes, qui ne relèvent pas tous de la responsabilité directe de la ministre et qui requièrent souvent des solutions sur le long terme ; mais les difficultés ou les craintes que connaissent dans ces deux cas nos concitoyens nourrissent le décalage entre la réalité vécue et le discours que nous tenons tous – en particulier nos rapporteurs – sur l’exemplarité de notre modèle social.
Oui, nous pouvons être fiers de notre système de protection sociale, mais nous ne pouvons cependant nier ses difficultés, voire ses dysfonctionnements, ni nous exonérer de prendre les mesures nécessaires.
Le texte que nous examinons en nouvelle lecture a été assez nettement remanié par le Sénat. Il contient, sur la maîtrise des dépenses de santé, le respect du principe d’universalité des allocations familiales et la réforme de notre régime de retraites, un certain nombre de mesures fortes, qui sont de nature à préserver à la fois les grands principes de notre régime de protection sociale et son bon fonctionnement.
C’est pour le groupe UDI un premier motif de satisfaction : la discussion parlementaire a suivi son cours normal. On se souvient en effet que, l’année dernière, l’examen du texte avait été plus chaotique, surtout au Sénat, où le Gouvernement ne parvenait pas à faire partager à sa propre majorité les options qu’il avait arrêtées. Cette fois, la nouvelle majorité du Sénat a proposé des mesures qui constituent autant d’avancées significatives vers un texte équilibré. En résumé, le Sénat a placé le PLFSS sur la bonne voie, et, à l’occasion de cette nouvelle lecture, le groupe UDI présentera des amendements et formulera des propositions visant à faire en sorte que la totalité du chemin soit parcourue.
De fait, cet examen en nouvelle lecture constituera une sorte de test pour le Gouvernement : sera-t-il, oui ou non, au rendez-vous des réformes tant attendues pour notre protection sociale ?
Les défis posés à celle-ci sont en effet majeurs, qu’il s’agisse de son financement, de l’organisation de l’offre de soins ou de l’harmonisation des régimes spéciaux pour plus d’équité entre nos concitoyens. Face à ces défis et à l’impératif d’une maîtrise de la dépense publique et des déficits, un gouvernement responsable peut-il s’accorder avec une opposition constructive sur quelques réformes majeures qui permettraient de refonder et de rendre notre protection sociale durable, en tout cas à moyen terme ?
Malheureusement, je crains de disposer d’ores et déjà d’éléments de réponse, compte tenu des débats qui ont eu lieu en commission et des propos qui viennent d’être tenus par la ministre et par les rapporteurs. Toutefois, je ne voudrais pas préjuger de nos échanges sur un texte que le Sénat a considérablement enrichi.
C’est d’ailleurs un deuxième motif de satisfaction pour le groupe UDI : le Sénat a complété le texte par des dispositions que nous avions proposées ici même, en première lecture.
Ainsi, avions-nous suggéré, dans un souci de justice sociale, de relever le taux de la contribution exceptionnelle de solidarité appliquée aux retraites chapeaux les plus élevées ; nous nous réjouissons que le Sénat ait adopté ce dispositif.
De même, le report de l’âge légal de la retraite à 64 ans à l’horizon de 2024 est une proposition que le groupe UDI avait faite en première lecture. La réduction du déficit structurel de notre régime de retraites ne pourra pas résulter en effet d’une augmentation du niveau des cotisations ou d’une baisse du niveau des pensions ; la seule solution serait de repousser progressivement l’âge légal du départ à la retraite, de manière à tenir compte des évolutions démographiques de notre société et de la réduction du nombre d’actifs cotisants pour assurer le financement de la retraite par répartition.
Une telle solution demanderait à chacun un effort substantiel. C’est pourquoi nous restons persuadés que cette mesure devrait s’accompagner de dispositions visant à repenser les parcours professionnels, à dynamiser les secondes parties de carrière en anticipant les évolutions professionnelles rendues nécessaires par l’avancée en âge, et à envisager sur le long terme des améliorations des conditions de travail.
Ce report de l’âge légal du départ à la retraite devrait également s’accompagner, bien évidemment, d’une remise à plat des régimes spéciaux de protection sociale et de retraite, afin d’assurer une plus grande équité entre nos concitoyens. La prochaine mise en oeuvre du compte pénibilité serait l’occasion d’une telle refonte des régimes spéciaux, la possibilité d’accéder plus tôt à la retraite étant bien souvent une mesure de compensation de la pénibilité de la profession exercée.
Troisième motif de satisfaction pour le groupe UDI : nous avons pu constater qu’au-delà du PLFSS, la réflexion sur le financement de la protection sociale suivait une direction que nous avions indiquée il y a déjà plusieurs semaines.
Le groupe UDI avait ainsi défendu ici même un amendement ayant pour objet de remplacer le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi par la suppression de la totalité des cotisations patronales familiales. Or à peine le Gouvernement avait-il repoussé notre proposition que le Président de la République lui-même en confirmait le bien-fondé : au cours de son intervention télévisée du 6 novembre, il a en effet indiqué son intention de faire évoluer, en 2017, le CICE vers une baisse des cotisations sociales ; c’est exactement le sens de la proposition du groupe UDI – qui souhaite toutefois l’appliquer dès 2015. En effet, si l’idée est juste, il est inutile d’en différer l’application : mettons-la en oeuvre le plus vite possible, de façon à en faire bénéficier nos entreprises et nos concitoyens.
Enfin, ce PLFSS, même amendé dans le bon sens par le Sénat, nous semble devoir être encore complété sur plusieurs points.