Je souhaite aborder trois points : les enjeux de l'enseignement supérieur et de la recherche pour cette rentrée, le budget qui s'y rapporte, et le bilan de la mise en place des écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE).
L'objectif pour cette rentrée demeure l'élévation du niveau de qualification du plus grand nombre d'étudiants. C'est une nécessité non seulement pour ouvrir des horizons aux jeunes, mais aussi parce que, face à la crise économique, le fossé se creuse entre eux selon leur niveau de diplôme.
L'étude du Centre d'études et de recherches sur les qualifications (Céreq) de mars dernier, réalisée sur un échantillon de 700 000 jeunes de la génération 2010, montre qu'en 2013, un jeune sur deux non diplômé est en recherche d'emploi, soit une hausse de seize points par rapport à la génération 2004. En revanche, les diplômés bac+5 et plus sont moins touchés par la crise, la durée de la période d'inactivité restant inchangée. Le diplôme apparaît donc comme une protection, un rempart contre le chômage. Dès lors, les pouvoirs publics doivent accompagner les jeunes le plus loin possible dans leurs études.
On peut raisonnablement espérer atteindre notre objectif d'amener 50 % d'une classe d'âge au niveau de la licence en agissant sur plusieurs déterminants. Tout d'abord, il faut absolument lever les freins sociaux à l'accès à l'enseignement supérieur : les conditions de vie des étudiants sont un élément essentiel de leur réussite. Deux mesures fortes répondent à cette ambition : l'attribution de 77 500 bourses supplémentaires, destinées aux plus modestes mais aussi aux classes moyennes, qui viennent s'ajouter aux bourses supplémentaires allouées l'année dernière, portant à plus de 140 000 le nombre d'étudiants bénéficiaires de bourses en deux ans ; la généralisation de la caution locative étudiante par laquelle l'État se porte garant pour tout étudiant de moins de vingt-huit ans recherchant un logement.
Ensuite, nous souhaitons améliorer l'orientation et la pédagogie. En matière d'orientation, la nécessité d'une articulation entre le lycée et l'université, qui est affirmée dans la loi ESR, trouve sa traduction dans le dispositif bac-3bac+3. Afin d'assurer cette continuité, garante de choix d'orientation mûris et non par défaut, nous comptons également sur les mécanismes d'orientation prioritaire, que nous avons mis en place pour les bacheliers professionnels et technologiques, vers les sections de techniciens supérieurs (STS) et les instituts universitaires de technologie (IUT). Nous avons enfin travaillé à la diffusion de bonnes pratiques en matière de réorientation pendant le premier cycle universitaire. Il ne faut pas avoir peur de la réorientation ; il faut, au contraire, multiplier les passerelles qui la permettent.
En matière de pédagogie, le numérique est l'un des grands chantiers de la rentrée. Il représente une opportunité pour développer les savoirs et transformer les modes de transmission des connaissances. Je signale la mise en oeuvre du plan France Université Numérique (FUN), le développement des MOOCs (massive open online courses, formation en ligne ouverte à tous) et le lancement, avant la fin de l'année, de l'appel à projets pour les initiatives d'excellence en formations innovantes (IDEFI) numériques dans le cadre du programme d'investissements d'avenir.
Enfin, nous entendons continuer à faire de l'enseignement supérieur un lieu de transformation de la société et de l'économie. Nous avons mis en place les pôles étudiants pour l'innovation, le transfert et l'entrepreneuriat (PEPITE) dans chaque site universitaire, afin d'accompagner les étudiants et de les former à innover et à entreprendre. Ce dispositif, très attendu par les étudiants, rencontre déjà un grand succès. Nous avons parallèlement créé un nouveau statut d'étudiant-entrepreneur qui permet de mener de front études et projet d'entreprise. Celui-ci garantit le maintien du statut d'étudiant et de ses protections pendant les premiers pas du projet.
Le budget pour 2015 permet de répondre au mieux aux enjeux que je viens d'évoquer, en dépit du contexte économique. Le Gouvernement poursuit ses efforts en faveur de l'amélioration de la vie étudiante dont il a fait sa priorité. Les crédits augmentent ainsi de 45 millions d'euros par rapport à 2014. Au total, ce sont 458 millions d'euros qui sont consacrés aux aides aux étudiants sur critères sociaux, soit près des deux tiers de l'augmentation du budget de l'enseignement supérieur et de la recherche depuis 2012.
La baisse du budget alloué à la recherche est limitée, confirmant notre volonté de préserver au maximum ce secteur. La priorité donnée à l'emploi scientifique est maintenue : nous respectons l'engagement de remplacer chaque chercheur partant à la retraite. Les universités connaissent une diminution inévitable de leur budget. J'insiste néanmoins sur le caractère conjoncturel de cette baisse, d'une part, et sur son caractère ciblé et limité, d'autre part. Cette diminution affectera les universités disposant de fonds de roulement importants. Pour objectiver le choix, nous avons confié à une mission d'inspection le soin d'identifier les universités susceptibles d'être mises à contribution.
Enfin, nous pouvons nous satisfaire qu'un an après la réforme, chaque académie soit dotée d'une ESPE malgré des délais de mise en oeuvre serrés. La mise en place de ces écoles répond à la double volonté de remettre le geste professionnel au coeur de la formation des enseignants et de placer les ESPE au sein des universités, afin de renforcer le lien entre la pédagogie et la recherche. Notre souhait est de faire en sorte que les méthodes pédagogiques s'appuient davantage qu'elles ne le font aujourd'hui sur les résultats des recherches. Les enseignants en devenir doivent aussi être formés à voir évoluer leurs pratiques et à les évaluer.
Dès la première année, ce sont plus de 25 000 jeunes qui sont entrés dans cette nouvelle formation. Ces chiffres témoignent d'un regain d'intérêt pour le métier d'enseignant, qui se confirme cette année : le nombre d'inscrits aux concours des métiers de l'enseignement a considérablement augmenté ; pour les concours du premier degré, il a progressé de 72 % entre 2013 et 2015.
Néanmoins, plusieurs points substantiels méritent encore notre attention. Il n'y a là rien d'anormal compte tenu de la nouveauté de ces établissements. Nous souhaitons améliorer encore le tronc commun en master « Métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation » (MEEF) pour en faire le maillon fort de la nouvelle formation des enseignants. Nous comptons également progresser dans la formation des formateurs ; nous avons créé deux statuts, celui de professeur des écoles maître formateur pour le premier degré et celui de professeur formateur académique pour le second degré. Nous devons, en outre, veiller à donner toute sa place à la recherche au sein des ESPE, notamment grâce à la mise en place du mémoire. Enfin, les ESPE doivent s'adapter davantage à la diversité des profils des lauréats. Cela fut l'une des principales difficultés de cette rentrée, mais les ESPE ont prouvé leur capacité dans ce domaine.
En résumé, nous faisons en sorte d'améliorer les conditions de vie des étudiants, de préserver le budget et de faire progresser les ESPE afin qu'elles remplissent leur mission prioritaire de redonner une formation aux futurs enseignants.