Je salue un rapport précis et argumenté, réalisé dans des délais extrêmement serrés.
Il faut avoir le courage de dire que la situation du transport aérien français, sans être désespérée, est aujourd'hui critique : s'agissant d'une activité internationale par nature, il subit les chocs frontaux de la globalisation dans toute leur brutalité. La distance n'y fait rien et la concurrence y est totale.
Un premier élément est l'augmentation du trafic. L'avenir du transport aérien est mirobolant : des masses d'individus s'éveillent à la mobilité, partent en vacances, franchissent les continents... Mais l'essentiel de cette nouvelle clientèle vit dans le sud-est asiatique : les Émirats et la Turquie tentent donc de jouer de leur position géographique pour « assécher » les hubs européens, avec un risque réel de marginalisation de nos vénérables compagnies historiques.
Par ailleurs, la libéralisation des marchés a réussi au-delà de toute espérance, en termes de démocratisation du transport aérien : les prix évoluent tendanciellement à la baisse, alors que les coûts ne se contractent pas dans la même proportion. Négligé par les compagnies conventionnelles, le low cost a fait une entrée fulgurante dans le paysage des opérateurs : il représente aujourd'hui plus de 50 % du marché européen et Ryanair occupe désormais la première place des compagnies aériennes de notre continent.
Tout se passe donc comme si nous étions désormais pris entre deux mâchoires concurrentielles, l'une représentée par le low cost sur le court-courrier – une innovation économique remarquable, un modèle plébiscité par les consommateurs, en dépit de la présence de quelques « voyous » –, l'autre représentée par les compagnies du Golfe persique sur le moyen-long courrier. Nous ne pouvons donc rester dans la béatitude de notre splendeur passée : il faut agir.
Il n'existe plus que trois groupes aujourd'hui en Europe, à savoir British Airways, Lufthansa et Air France-KLM, qui ont absorbé la plupart des autres compagnies historiques. Quant à Alitalia, il semblerait que son avenir passe par un rapprochement avec Etihad.
Air France est en difficultés financières depuis 2008, avec un résultat opérationnel déficitaire à hauteur de 500 millions d'euros environ. Inversement, le résultat opérationnel d'Aéroports de Paris avoisine le milliard d'euros – même si l'opérateur perd des positions par rapport à ses concurrents en Europe.
Face à ce constat, les réponses apportées par notre collègue sont des solutions d'évidence. L'État sera-t-il en mesure de les assumer – il faudrait injecter de l'ordre de 300 millions d'euros par an dans le système aérien ? Mais le repositionnement de la France et de l'Europe ne se résoudra pas dans un seul allégement de taxes : il faut des reploiements stratégiques rapides et d'envergure et la puissance publique, après avoir tant tardé, doit montrer sa capacité à appréhender de manière distincte les enjeux de compétitivité qui s'attachent à Aéroports de Paris et ceux qui s'attachent à Air France.
La question de la « double caisse » est totalement pertinente : il est évident qu'Aéroports de Paris se « nourrit » des clients d'Air France et que, sans Air France, il n'y aurait pas les commerces d'Aéroports de Paris. Ne serait-il donc pas légitime que cette double caisse disparaisse ? Mais ne risque-t-on pas alors de se retrouver dans un « syndrome autoroutier », puisqu'Aéroports de Paris se propose désormais de financer la liaison Charles-de-Gaulle Express ?
Pour ce qui concerne l'avenir de l'aéroport de Toulouse, faut-il continuer d'ouvrir le capital ou ne pouvons-nous pas considérer que l'infrastructure est publique, même si le marché est ouvert – comme en matière de gaz ou d'électricité ?