Intervention de Erwann Binet

Réunion du 26 novembre 2014 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaErwann Binet :

Cette question sensible mérite autre chose que des débats caricaturaux ou des procès d'intention. Si le groupe SRC vote contre ce texte, il est pour autant, dans sa très grande majorité, favorable au maintien de l'interdiction de la GPA et considère comme nulles les conventions qui l'autorisent. Nous considérons également qu'il faut pénaliser les agences qui font office d'intermédiaires. Mais nous ne nous retrouvons pas sur la méthode.

Tout d'abord, monsieur le rapporteur, vous motivez votre démarche par l'existence d'un décret de la ministre de la Justice. Or il ne s'agit pas d'un décret, mais d'une circulaire, ce qui emporte une différence de taille : le décret est créateur de droits, pas la circulaire. En l'espèce, comme le confirmera probablement le Conseil d'État d'ici quelques semaines, la circulaire Taubira se borne à rappeler aux tribunaux le droit existant, en l'occurrence l'obligation d'appliquer l'article 47 du code civil, lequel dispose que les actes établis à l'étranger sont aussi valables dans notre pays. Si un acte d'état civil étranger établit la paternité d'un Français, alors son enfant est français, au titre de la loi de la République. Et je m'étonne que, tout en condamnant des Français qui ne respectent pas la loi, vous reprochiez dans le même temps à la garde des Sceaux de vouloir la faire appliquer.

Ajoutons que votre texte ne règle rien. L'arrêt de la CEDH, pris dans l'intérêt supérieur de l'enfant né d'une GPA, s'impose à nous. Il est probable même qu'il fera évoluer la jurisprudence de la Cour de cassation dans des affaires aujourd'hui pendantes.

Le renforcement des mesures répressives visant à lutter contre la GPA n'aura aucun effet dissuasif sur les agences, pour la plupart installées à l'étranger et donc hors de portée de notre droit. Sera-t-il propre à dissuader les parents ? J'en doute, si l'on considère que le parcours du combattant terrible qu'ils doivent déjà affronter ne suffit pas à les faire reculer : j'ai dans ma circonscription l'exemple d'un couple hétérosexuel dont l'un des conjoints n'a pas hésité à séjourner pendant un an en Inde avant de pouvoir ramener leur enfant en France.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion