Intervention de Pascale Crozon

Réunion du 25 novembre 2014 à 17h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascale Crozon :

Le projet de loi relatif à la réforme de l'asile que nous examinons aujourd'hui vient parachever un grand nombre de contributions visant à apporter des réponses durables à une crise du système d'asile que tous ses acteurs, qu'ils soient institutionnels ou associatifs, reconnaissent.

Il s'agit tout à la fois de transposer les directives européennes révisées du « paquet asile » avant juillet 2015, de donner une base légale à la réforme interne de l'OFPRA – qui, depuis dix-huit mois et sous l'impulsion de Pascal Brice, produit d'ores et déjà ses premiers effets –, de tirer les enseignements de la concertation menée par Jean-Louis Touraine et Valérie Létard et de l'audit réalisé pour le CEC par Jeanine Dubié et Arnaud Richard.

Mais il s'agit avant tout de redonner tout son sens au système d'asile. À contre-courant des réformes précédentes, votre projet de loi ne regarde pas le demandeur d'asile comme un fraudeur en puissance, mais comme une personne potentiellement menacée et qui doit se voir offrir les moyens d'exprimer sa part de vérité. Notre enjeu est d'identifier les situations d'urgence pour protéger plus rapidement ceux qui en ont le plus besoin, améliorer la qualité de décision de l'OFPRA pour désengorger le contentieux devant la CNDA et, à l'issue de ces procédures équitables, permettre l'éloignement effectif des déboutés pour dissuader les filières qui dévoient le système.

La suppression des délais d'accès à la demande d'asile, ainsi que de la procédure prioritaire qui privait d'un recours suspensif et du droit à l'hébergement, la prise en compte des situations de vulnérabilité, ou bien encore la présence du tiers à l'entretien, sont autant de garanties nouvelles que nous saluons. Au cours de nos débats, le groupe socialiste proposera une transposition plus fine de certains points concernant notamment l'appréciation des pays d'origine sûrs et les conditions spécifiques qui peuvent être proposées en cas de vulnérabilité, par exemple pour les victimes de la traite et autres formes de violences sexuelles. Nous aurons par ailleurs ensemble le débat sur les mineurs isolés qui, de notre point de vue, doivent avant tout être considérés comme des mineurs en danger et bénéficier des garanties les plus protectrices prévues par le projet de loi.

L'hébergement directif, vous le savez, est le point du texte qui soulève le plus d'inquiétudes de la part des acteurs associatifs, notamment de ceux qui sont appelés à le gérer. Nous pensons que ce système représente tout à la fois une contrainte légitime, dès lors que notre ambition est de généraliser et de mieux répartir l'hébergement pérenne de type CADA, et une protection contre un certain nombre de filières et de marchands de sommeil. Nous vous proposerons toutefois de mieux prendre en compte les besoins des demandeurs, notamment en matière d'accès aux soins et de respect de la vie privée et familiale. Si nous soutenons l'idée de sanction concernant les conditions d'accueil, l'idée qu'un demandeur qui préférerait in fine résider dans sa famille puisse risquer la clôture de son dossier nous paraît disproportionnée et contraire à l'objectif de recentrer l'OFPRA sur le seul besoin de protection.

Plus largement, le groupe socialiste ne se résigne pas au constat selon lequel le mode d'hébergement est aujourd'hui un déterminant majeur de l'issue de la procédure. Il nous semble donc essentiel de prévoir dans la loi les conditions d'accès au droit de ceux qui ne bénéficieraient pas d'un hébergement en CADA. Voilà pourquoi nous proposerons d'inscrire dans un même schéma l'ensemble des éléments du dispositif d'accueil, et non simplement l'implantation des hébergements, afin d'établir clairement qui fait quoi dans chaque région et d'associer les collectivités locales.

Enfin, le groupe socialiste est favorable à l'ouverture du droit à la formation professionnelle pour les demandeurs, mais nous souhaiterions connaître les intentions du Gouvernement sur ce point et, plus largement, sur le droit au travail.

Vous l'aurez compris : si nous soutenons l'ensemble des dispositions de ce projet, qui permet de répondre plus vite sans réduire les droits procéduraux des demandeurs d'asile, nous serons attentifs à ce que la situation de chacun soit réellement prise en compte pour que la décision définitive, qu'elle soit positive ou négative, soit juste et respectée. Il en va de la crédibilité de notre système d'asile, auquel nous sommes très attachés.

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