Intervention de Philippe Goujon

Réunion du 25 novembre 2014 à 17h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Goujon :

Il est en effet nécessaire de répondre aux difficultés d'un système à bout de souffle, ce qui montre l'urgence de réformer les modalités d'exercice du droit d'asile.

Si la création d'un guichet unique pour tous les demandeurs et le principe de l'hébergement directif sont de bons principes, qui financeront, de l'État ou des collectivités locales, le transport des demandeurs d'asile ayant accepté l'hébergement directif, entre les régions où ils arrivent massivement et les centres d'accueil où ils seront placés ? Certaines régions d'affluence comme l'Île-de-France seront très concernées par ces transferts et le poids financier de ceux-ci ne sera donc pas négligeable. Comment seront effectués ces transferts ? Cette charge va-t-elle incomber aux départements, pour autant qu'ils continueront à exister ?

Votre projet de loi prévoit également de dispenser des conditions du regroupement familial – notamment les conditions de ressources et de logement – les familles des demandeurs d'asile afin de permettre leur réunification familiale. À l'heure où de nombreux réseaux d'immigration utilisent la voie des mariages frauduleux pour parvenir à leurs fins, pourquoi ne pas inclure dans la dérogation au droit à la réunification familiale, outre le fait de ne pas respecter les principes essentiels qui régissent la vie familiale en France ou le fait de constituer une menace pour l'ordre public, celui d'avoir contracté une union à des fins principalement migratoires ?

Le fait de constituer une menace pour l'ordre public, permettant d'exclure ces personnes du dispositif très favorable de réunification familiale précédemment évoqué inclura-t-il bien les délits de mendicité agressive et d'atteinte aux biens et aux personnes ? Je rappelle que le Conseil d'État a déjà reconnu le 1er octobre que la mendicité agressive constituait une menace qui touche aux intérêts fondamentaux de la société.

Je tiens également à souligner l'impact de la transposition des directives européennes dans notre droit en termes d'alourdissement de la charge procédurale, le droit à un conseil et celui à l'interprétariat risquant, outre leur impact financier, de poser d'importantes difficultés d'organisation et par conséquent de réduire voire d'anéantir le gain de temps escompté de la réforme.

L'équilibre des droits et des devoirs serait mieux garanti si, à l'article 3, on instituait en obligation, et non en simple faculté, le fait pour l'OFPRA de mettre fin à la protection subsidiaire lorsqu'il apporte la preuve que celle-ci n'est plus nécessaire.

Il en serait de même des échanges prévus à l'article 5 entre l'autorité judiciaire et le président de l'OFPRA ou de la CNDA si on rendait la communication de ces informations obligatoire et non facultative.

En matière de lutte contre la fraude documentaire et identitaire, il serait pertinent d'inclure cet élément dans ceux donnant lieu d'office à une procédure accélérée.

Je tiens également à déplorer l'impossibilité de mettre en exécution d'office avant l'échéance d'un délai de sept jours une décision de transfert vers un autre État membre d'un demandeur qui avait initialement présenté sa demande dans celui-ci. Étant donné le taux très important de soustraction à ces transferts, il ne fait nul doute que ces personnes vont continuer à s'y soustraire et à encombrer les structures d'hébergement d'urgence de droit commun ou liées au droit d'asile, au détriment des demandeurs légitimes.

À propos des déboutés du droit d'asile, le projet de loi ne propose aucune mesure d'éviction alors qu'une grande partie des nuitées d'hébergement d'urgence est liée à ces personnes, représentant un coût important pour la solidarité nationale. Je rappelle que, selon un rapport de l'IGF, de l'IGA et de l'IGAS d'avril 2013, moins de 5 % des déboutés seraient éloignés. Dans la région parisienne, on dénombrait, en octobre 2014, 32 000 nuitées hôtelières, dont seules 4 000 étaient destinées aux demandeurs d'asile, le reste servant à héberger des déboutés. Quelles mesures entendez-vous prendre pour organiser l'éloignement effectif des déboutés ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion