Intervention de Jean-Christophe Lagarde

Séance en hémicycle du 22 novembre 2012 à 15h00
Prévention du surendettement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Christophe Lagarde, rapporteur de la commission des affaires économiques :

Je ne vous en veux pas – vous ne pouviez pas le savoir puisque vous n'étiez pas là –, mais Mme Lagarde, lors de la discussion de la loi à l'initiative des centristes, a accepté un comité de préfiguration. Or ce sont les travaux du comité qui ont amené Mme Lagarde, qui a donné son nom à la loi, à reconnaître ici, en séance publique, la nécessité du fichier positif que vous contestez aujourd'hui. Bien évidemment, vous n'êtes pas obligée d'être d'accord avec elle, pas plus qu'avec le président de la commission des affaires sociales de l'époque, M. Méhaignerie – que vous connaissez bien, je crois – et qui reconnaissait la nécessité d'ériger un barrage. Il est dommage que vous ne soyez pas du même avis que votre prédécesseur.

Quant au fichier des incidents de paiement, reconnaissez avec nous que lorsqu'il est activé, il est déjà trop tard. Ce n'est pas une fois que l'accident a eu lieu que l'on doit essayer de le prévenir ; il faut le faire en amont. C'est bien ce à quoi servirait un fichier positif.

Je terminerai par votre intervention, monsieur le ministre, en faisant plusieurs remarques.

S'agissant de la baisse que l'on observe du nombre de ménages qui déposent un dossier de surendettement, vos services auraient avantage à examiner auprès de la Banque de France les raisons de cet infléchissement. Dans le cadre des auditions des représentants syndicaux de la Banque de France, il m'a été signalé qu'aujourd'hui on rendait aux personnes surendettées leur dossier lorsqu'il n'était pas complet alors qu'auparavant on leur demandait de venir le compléter ultérieurement. Je crains que ce ne soit la raison de l'abandon, par ces personnes fragiles, d'un certain nombre de demandes. Si tel était le cas, cela ne serait pas acceptable. J'imagine que le Gouvernement en conviendra.

Vous dites par ailleurs que des améliorations sont possibles. C'est certain. Mais pour ma part, je ne crois pas à la déclaration sur l'honneur, ni même au dialogue. Lorsque l'on sait qu'il y a dans notre pays 15 % au moins d'illettrés, lorsque l'on rencontre dans nos circonscriptions des gens qui éprouvent des difficultés ne serait-ce qu'à exprimer ce qu'est leur situation financière, on ne peut croire à cet exercice librement consenti de façon éclairée – comme on le dirait dans d'autres domaines.

Vous dites aussi qu'il faut appliquer la loi. Mais elle est appliquée – je pense à la disposition de déchéance des droits à intérêts, lorsque le crédit a été consenti de façon abusive. La proposition de loi va plus loin, en prévoyant que le capital peut être lui aussi perdu. Si je viens vous demander de l'argent, monsieur le ministre, non pas en tant que membre du Gouvernement, mais en tant qu'individu (Sourires), vous vous assurerez d'abord de ma capacité à rembourser. Si vous ne le faites pas, tant pis pour vous. C'est le raisonnement que j'applique à certains organismes de crédit.

L'UDI a fait une proposition qui paraît raisonnable. Certes, elle est répétée ; certes, elle peut lasser. Mais ses dispositions pourraient entrer en vigueur au bout de dix-huit mois environ, si vous faites les bons choix sur l'identifiant. On pourrait ainsi gagner un peu de temps puisque, si j'ai bien compris, ce n'est qu'au premier semestre 2013, en comptant la navette parlementaire, que ce fichier pourrait être éventuellement adopté dans un texte présenté par le Gouvernement.

À rebours du jeu parlementaire parfois curieux qui donne plus d'importance aux auteurs qu'au contenu du texte, le Gouvernement s'est en tout cas montré ouvert à la création d'un fichier. Le plus tôt sera le mieux, croyez moi. J'espère que vous ne serez pas bloqué dans cet exercice par de puissants lobbies ou intérêts. Je veux le dire dans cet hémicycle, n'ayant pas la faculté de le faire ailleurs, vous imaginez bien pourquoi : il existe des fichiers tenus par la BNP, qui dispose de Cetelem, et par le Crédit agricole, propriétaire de Sofinco, via de grands commercialisateurs comme le groupe Carrefour. Ces fichiers propriétaires contreviennent aux libertés publiques. Ils ne sont pas contrôlés. Je préférerais un fichier public qui garantisse les libertés individuelles, protège une partie considérable des personnes qui entrent en surendettement et enfin, ouvre les possibilités de crédit à ceux qui en sont privés par les pratiques des organismes de crédit. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.)

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