Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, je tenterai de répondre assez brièvement et de revenir à l'essentiel.
Monsieur Zumkeller, je ne vous fais pas le « coup » d'une énième commission ou le « coup » des droits de l'homme, encore que saisir la CNCDH, c'est s'assurer que ce fichier, que nous pourrions souhaiter mettre en oeuvre en 2013, ne sera pas contradictoire avec une liberté fondamentale. Voilà pourquoi j'ai sollicité la CNCDH parce que je pensais que son avis, qui devrait être rendu prochainement, en janvier, était important.
Les arguments de M. Lagarde sont justes. La CNIL n'a jamais rejeté la création d'un fichier positif ; elle a simplement émis un certain nombre de réserves, qu'elle propose au législateur de contourner s'agissant notamment de la capacité d'une centrale à gérer un fichier de 25 millions de personnes et de l'utilisation qui pourrait être faite de ce fichier. Nous tiendrons compte de cet avis.
Il ne s'agit donc pas de faire un « coup » avec une proposition de loi sur le fichier positif si cela ne doit pas marcher. Notre objectif commun est de traiter le surendettement et, si nous mettons en place un fichier positif, de faire en sorte que celui-ci fonctionne.
J'ai cru comprendre que Mme Le Calennec n'avait pas exprimé une opposition de principe au fichier positif, mais qu'elle avait demandé une évaluation de la loi Lagarde. La DGCCRF a d'ailleurs commencé d'évaluer, sur le terrain, la mise en oeuvre de cette loi, qui était une première étape dans l'encadrement du crédit à la consommation. Les premières conclusions montrent que l'offre alternative – crédit amortissable ou crédit renouvelable – ne fonctionne pas comme le législateur l'aurait souhaité. Aussi faudra-t-il peut-être se doter d'instruments supplémentaires.
Parmi ceux-là, pourquoi pas ce registre national du crédit ? Là encore, l'honnêteté commande de dire que la CNIL a émis des réserves quant au recours au NIR. Il existe d'autres possibilités, comme l'utilisation du FICOBA. La CNIL s'exprimera et le Gouvernement vous fera des propositions, le législateur restant souverain. Mais je ne crois pas que quiconque ici cherche à s'abriter derrière la CNIL pour refuser le fichier positif. Nous voulons simplement que ce fichier fonctionne. Si les conditions sont réunies, nous proposerons alors la création d'un registre national du crédit dans le cadre d'un projet de loi sur la consommation.
Vous voulez responsabiliser le prêteur, monsieur le rapporteur. La loi prévoit déjà que celui-ci doit s'assurer de la solvabilité de l'emprunteur en consultant le FICP. À défaut, il peut être déchu du droit à intérêts. Nous verrons si nous pouvons aller plus loin. Je ne suis pas sûr que la proposition que vous faites d'exiger le remboursement du capital passe le cap du Conseil constitutionnel, puisqu'elle est susceptible d'attenter au droit de la propriété. Il y a là un sujet qui mérite d'être davantage creusé qu'il ne l'a été jusqu'à présent.
Vous avez évoqué le rôle de la Banque de France. Celle-ci, effectivement, se réorganise, et ne me parlez pas de plan social, monsieur le rapporteur ! Le seul plan social que je connaisse, et que vous avez voté, c'est la suppression de 160 000 postes de fonctionnaires entre 2007 et 2012. Cette réorganisation de la Banque de France se fait selon certains principes. Il y aura des bureaux d'accueil et d'information pour traiter le surendettement dans tous les départements, dès lors que le nombre de visites annuelles sera supérieur à 1 000.
Je retiens à cet égard votre proposition quant aux dossiers incomplets. Il ne faut pas que, demain, des ménages surendettés ne reviennent pas faute d'avoir pu remplir leur dossier, parce qu'ils sont confrontés à des difficultés personnelles ou qu'ils n'en ont pas les moyens. C'est une question importante, que mes services traiteront.
Mme Sas, M. Zumkeller, Mme Le Callenec, M. Serville ont soulevé la question de la CNIL. M. Tardy a parlé des zones grises de la loi Lagarde. M. Blein et Mme Dubié ont parlé de la nécessité d'une approche globale. Je veux insister sur ce dernier point.
Certains ont laissé entendre que ce Gouvernement serait sensible à je ne sais quel lobby. J'espère que lorsque je défendrai l'action de groupe dans le cadre du projet de loi sur la consommation, je retrouverai sur tous ces bancs, notamment ceux de l'UDI, des soutiens. Quand il s'agira de protéger les consommateurs contre ces grands groupes qui, par la rente et par des pratiques anti-concurrentielles, lèsent les consommateurs, il y aura des pressions et du lobbying, notamment du monde économique. Nous verrons alors qui nous soutiendra dans cette entreprise.
L'action de groupe est un instrument qui manque aujourd'hui en France. Je le regrette. Nous mettrons en place un dispositif « à la française », qui ne sera pas la copie du modèle américain un peu perverti, où l'action de groupe, qui pour l'essentiel sert à rémunérer des cabinets d'avocats et des chasseurs de prime, ne protège pas efficacement les consommateurs. Je rappelle que l'action de groupe avait été voulue par Jacques Chirac, mais n'avait pas fait l'objet d'une loi, qu'elle a été voulue par Nicolas Sarkozy, mais qu'elle n'a pas été présentée au Parlement. François Hollande la souhaite, je la proposerai l'année prochaine. Elle complétera, dans le projet de loi sur la consommation, les dispositions en matière d'encadrement du crédit à la consommation, de procédure de lutte contre le surendettement, de sanction par la DGCCRF des clauses abusives de certains contrats et d'un certain nombre d'infractions de la part de professionnels.
Je vous demande aujourd'hui de rejeter cette proposition de loi. Elle paraît insuffisante et ne présente pas toutes les garanties pour la création d'un fichier efficace. Le Gouvernement, d'ici le dépôt du projet de loi sur la consommation, s'efforcera de réunir toutes ces garanties pour vous proposer, en temps et en heure, la création d'un registre national du crédit. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)