La Cour ne refuse pas, en effet, des restrictions significatives. Et, comme le mot « syndicat » provoque beaucoup de prurit en France, je pense que nous pourrions nous inspirer du modèle portugais, qui utilise l'expression d'« association professionnelle de militaire ».
Colonel Michel Goya. Vous proposiez d'auditionner des auteurs de blogs militaires, madame Chabanne. Cela tombe bien, je tiens moi-même un blog dénommé « La Voix de l'épée » !
Je m'exprime en mon nom propre, certes, mais mon analyse repose sur des centaines de contacts et de discussions avec des militaires de tous grades. Vous retrouverez sans peine l'étude que l'armée de terre a consacrée en 2008 à cette question. Interrogés sur ce qu'ils pensaient le plus à même de défendre leurs intérêts, militaires se prononçaient à environ 25 % pour des syndicats, à 25 % également pour les organes de concertation et à 50 % pour le commandement. Des variations se faisaient jour suivant les corps. Les militaires du rang étaient les moins intéressés par la syndicalisation – ne serait-ce, peut-être, que par le fait qu'ils effectuent une carrière courte. C'est le corps des sous-officiers qui semblait le plus favorable, quoique de manière toujours minoritaire. Je pense que l'on pourrait observer également des variations suivant les armées.
Je ne nie pas la nécessité du dialogue social et son utilité pour l'efficacité, mais je pense qu'il s'est dégradé en même temps que le fonctionnement du commandement. Aujourd'hui, lorsqu'un militaire du rang va voir son chef de corps pour un problème de paiement de solde, le chef ne peut que lui répondre qu'il n'a plus la possibilité de l'aider. Toute une série de réformes a restreint les prérogatives du commandement, si bien que celui-ci est moins apte à faire face à certains problèmes de condition militaire. D'où la tendance à se tourner vers d'autres solutions. Les organes de concertation pourraient éventuellement être modifiés. Si le CSFM était élu, peut-être pourrait-il passer pour une association professionnelle et satisfaire la Cour.