Heureusement que vous avez fait une mise au point d'emblée, monsieur le président, sur le fait que notre débat n'était pas idéologique. Il me semble bien que les propos qui viennent d'être tenus l'étaient. Depuis mon arrivée à l'Assemblée nationale, en 2007, j'entends la droite répéter qu'il faut supprimer les 35 heures mais nous n'avons jamais rien vu venir. Pourquoi ? Peut-être, parce que les enquêtes montrent que les Français y sont attachés, y compris au prix d'une dégradation de leurs conditions de travail.
Revenons au fond du débat. Quand les entreprises se sont emparées du dialogue social, disiez-vous, monsieur Barou, les négociations se sont très bien déroulées. On oublie souvent que le terrain avait été préparé par la loi du 11 juin 1996 dite loi Robien. Une société d'économie mixte chargée des transports, que je présidais en tant qu'élue, avait négocié un accord de réduction du temps de travail dans ce cadre, mais il avait été annulé à la suite d'une procédure judiciaire engagée par un syndicat. Un nouvel accord a été négocié à la faveur de la loi Aubry 1. Quand les dispositifs ont été vraiment négociés par des partenaires en mesure de le faire, les choses se sont bien passées ; quand ils ont été imposés, ils ont été sources de tensions et de stress au travail.
Quinze ans plus tard, que propose-t-on ? Il faut tenir compte de la crise, de la hausse du chômage et de l'explosion du travail à temps partiel des femmes. Les Françaises, qui sont plus actives et font plus d'enfants que dans d'autres pays, ne rentreront pas à la maison. Leur volonté de continuer à exercer une activité professionnelle se retrouve dans l'explosion du temps partiel dans les années 1990. Rappelons que 80 % des emplois à temps partiel sont occupés par des femmes et que ces dernières gagnent en moyenne 25 % de moins que les hommes. Les horaires des salariés à temps partiel sont extrêmement flexibles, au point d'être incapables de savoir à l'avance quand ils vont travailler. Dans leur cas, le code du travail ne me semble pas très rigide.
Comment fait-on pour améliorer le sort de tous les salariés, sachant que les situations sont très différentes ? Pour les cadres, le télétravail induit une porosité complète entre les vies professionnelles et familiales. En France, les jeunes cadres supportent aussi des temps de travail anormaux, en raison du présentéisme qui les oblige à rester tard le soir dans leur entreprise, aux dépens de leur vie familiale. Pour les emplois moins qualifiés, le télétravail peut s'apparenter au travail à la tâche à la maison, très mal vécu par les femmes concernées à une époque.