Merci pour cet exposé très clair. Je souhaite maintenant approfondir quelques questions et, peut-être, vous pousser dans vos retranchements.
Il apparaît en creux dans vos propos que le dispositif français actuel n'est pas assez concurrentiel et qu'il subit des effets de structure dus à l'organisation du service public de l'électricité. Est-ce cela qui explique que nous ne bénéficiions pas des baisses de prix auxquelles vous faites références ? Depuis le début de ses travaux, notre commission d'enquête débat beaucoup des effets de la concurrence, les uns considérant que celle-ci n'a jamais vraiment fait baisser les prix, les autres estimant que les prix baisseraient si on la renforçait.
Après avoir indiqué que les prix de l'électricité sont plus élevés en Europe que dans beaucoup d'autres pays, vous faites la part entre les coûts d'infrastructures, les taxes et la fourniture. En France, il est exact que ce n'est pas tant la fourniture que le poids des taxes qui augmente. Notre pays doit également supporter des investissements de long terme particulièrement importants, avec la modernisation, la mise aux normes de sûreté et l'éventuelle prolongation des installations nucléaires au-delà de quarante ans. Pensez-vous à cet égard – même si la Commission européenne ne souhaite pas forcément entrer dans ce type de considération – que la façon dont nous bâtissons nos tarifs par « empilement » est elle-même génératrice d'augmentation ? Ne pourrait-on concevoir un système qui intégrerait d'une autre façon dans le prix acquitté par le consommateur les investissements de long terme, certains éléments spécifiques à l'histoire de notre pays comme la péréquation assurée par la CSPE, ou encore l'intégration du renouvelable dans les taxes puis, progressivement, dans la production ?
Lors d'une précédente audition, nous avons évoqué le parallèle que l'on peut faire, du moins partiellement, avec le secteur des télécommunications qui, lui aussi, repose sur des infrastructures en réseaux et qui, après des années d'évolution, propose un système tarifaire reposant sur des dispositifs de forfait.
Il était très pertinent de votre part de présenter la position de l'Union européenne tout en nous démontrant les marges de manoeuvre dont disposent les États membres et, partant, les parlements nationaux. De ce point de vue, estimez-vous que la France n'utilise pas toutes ses marges de manoeuvre ? La semaine dernière, nous avons eu une discussion très serrée avec votre collègue de la direction de la concurrence.
Vous constatez que l'électricité est plus coûteuse dans l'Union européenne que dans beaucoup d'autres pays du monde, ce qui pose un problème de compétitivité pour les entreprises, y compris celles qui ne sont pas classées parmi les électro-intensives. Un grand cimentier français a indiqué à la commission des affaires économique que l'électricité représente plus de 20 % de ses coûts de production.
Le prix de l'électricité est souvent très faible chez nos concurrents, et d'autant plus faible que cette énergie est souvent subventionnée. Dès lors, en dépit des marges de manoeuvre que vous avez décrites, le cadre de l'Union européenne n'est-il pas trop contraignant ? Permet-il à nos entreprises, notamment aux électro-intensifs, de disposer d'une compétitivité équivalente ? Nous le savons, certaines d'entre elles se posent la question du déplacement de leur production en dehors de l'Union européenne. Agissons avant qu'il ne soit trop tard ! L'année dernière, la commission d'enquête que l'Assemblée nationale a consacrée à la situation de la sidérurgie et de la métallurgie en France et en Europe a montré combien notre situation était difficile dans le contexte international.