Au nom du groupe SRC, je tiens à dire que c'est pour nous un plaisir et un honneur d'auditionner le professeur Jean-Claude Ameisen, chercheur en immunologie internationalement reconnu, écrivain de talent et président en exercice du CCNE. Créé par le président Mitterrand, ce comité s'est penché sur une diversité de sujets scientifiques nouveaux et sur les questions qu'ils posent aujourd'hui à notre société, à nos concitoyens – en particulier les jeunes générations, à l'intention desquelles il développe une action pédagogique –, au législateur et aux pouvoirs publics.
Cette approche diffère évidemment d'une réflexion philosophique. Si les philosophes actuels pourraient, le cas échéant, converser avec Socrate, Platon ou Aristote, le bio-éthicien d'aujourd'hui ne saurait avoir d'échanges fructueux avec ses éventuels homologues de l'Antiquité, dont les connaissances n'étaient pas assez avancées pour que se posent dans les termes présents les problèmes que nous affrontons. Les greffes, les cellules souches embryonnaires, les cellules souches pluripotentes induites, les neurosciences, l'acharnement thérapeutique, les autotests de dépistage du sida, les tests génétiques foetaux sur sang maternel : tout cela est le fruit de la recherche récente. Cela confirme que les esprits doivent pouvoir se mobiliser en permanence pour trouver des solutions, parfois évolutives, en acceptant de se remettre en question lorsque l'évolution des techniques et des sciences le nécessite.
Parmi les préoccupations actuelles, la fin de vie est aujourd'hui, pour nous, la plus importante, à l'heure où s'annoncent de nouvelles dispositions. La loi Leonetti a apporté un bénéfice, elle était d'ailleurs plutôt consensuelle, mais l'on s'aperçoit qu'elle ne suffit pas. D'une part, elle n'est pas assez appliquée. D'autre part et surtout, elle ne rend pas compte de toutes les situations de détresse de certaines personnes qui souhaitent – selon leur conception – décider dans la dignité de leur fin de vie et qui ne trouvent pas satisfaction dans l'état actuel de la loi. En la matière, si certains cas défrayent la chronique, d'autres sont la partie immergée de l'iceberg.
Deux attitudes sont possibles, qui ont été abondamment débattues à diverses reprises : soit compléter la loi en l'étendant légèrement, soit faire une nouvelle loi. Sur ce point, j'aimerais connaître la position de M. Ameisen, celle du Comité qu'il préside, voire son avis personnel. Comment progresser en ce domaine en allant au-delà de la loi Leonetti ? Par quelles dispositions nouvelles pourrait-on la faire évoluer en toute sérénité ?
J'ai beaucoup apprécié les propos sur la nécessité d'une implication collégiale, en effet essentielle à la qualité de la décision, mais aussi au confort de tous : de la société, qui ne verra pas un parti pris unique l'emporter, des familles concernées, des personnels de santé eux-mêmes, appelés à prendre des décisions lourdes, difficiles, parfois sources de tourments.
Je tiens également à saluer la manière dont le professeur Ameisen et l'ensemble du Comité cherchent à produire non seulement des réflexions mais aussi des décisions concrètes, en s'aidant – ce qui est nouveau – du contexte international. C'est essentiel s'agissant de la fin de vie, car nous sommes entourés de pays dotés de dispositifs distincts qu'il ne s'agit pas de copier mais dont il faut savoir qu'ils existent, d'autant que les Français peuvent y avoir recours. Il en va de même de la GPA : des couples français se rendent à l'étranger afin d'utiliser ce moyen de procréation. Que devons-nous faire ensuite ? Nous serions coupables de faire l'autruche.
La vérité, disait Condorcet, appartient à ceux qui la cherchent et non à ceux qui prétendent la détenir. Telle est la démarche du CCNE, en quête permanente de la vérité, avec détermination mais humilité, en acceptant de reconsidérer les décisions d'avant-hier pour élaborer celles de demain.
Pour toutes ces raisons, le groupe SRC émettra un avis très favorable à la reconduction de M. Ameisen à la présidence du CCNE.