Intervention de François Rebsamen

Réunion du 25 novembre 2014 à 16h00
Commission d'enquête relative à l'impact sociétal, social, économique et financier de la réduction progressive du temps de travail

François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social :

Par rapport à une base 100 en 1999, le niveau d'emplois atteint près de 115 en France – malgré un plafonnement depuis 2007 et le début de la crise – et seulement 109 en Allemagne : notre pays a donc créé plus d'emplois que l'Allemagne malgré les 35 heures, et le même constat peut être dressé en comparant le nombre d'heures travaillées.

Les étapes de diminution du temps de travail ont marqué l'histoire de notre pays, et je pourrais vous répondre avec facilité que les 35 heures constituent un bon compromis entre ceux qui veulent poursuivre le mouvement et passer à 32 heures et ceux qui veulent revenir à 39 heures. M. John Maynard Keynes disait que les idées ne cessent d'avancer, et la baisse du temps de travail reprendra peut-être à l'avenir grâce au dialogue social même si, aujourd'hui, la durée légale doit rester à 35 heures.

Certaines entreprises ont profité du passage légal aux 35 heures pour mettre en place de manière négociée les 32 heures – et parmi elles des sociétés importantes et bénéficiaires – grâce à l'utilisation constante des machines. Ce modèle ne peut être généralisé actuellement.

M. Xavier Bertrand, alors ministre du travail, déclarait en 2012 son opposition à la remise en cause des 35 heures car les salariés en pâtiraient ; il affirmait que les salariés ont subi une modération salariale au moment des 35 heures et verraient leur salaire horaire diminuer si l'on augmentait le temps de travail légal. Pour ces raisons, je ne souhaite pas changer la loi pour accroître la norme du temps de travail.

La loi sur la sécurisation de l'emploi du 14 juin 2013, transcription de l'accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013, offre déjà de la flexibilité en prévoyant la possibilité, dans des circonstances particulières, de déroger à la loi par un accord d'entreprise ou de branche ; ainsi, les employés de la métallurgie travaillent 39 heures, mais le cadre légal oblige l'employeur à mieux rémunérer les quatre heures supplémentaires.

Le passage aux 35 heures a donné lieu à une vaste discussion collective, dans la société et dans les entreprises, sur la vie professionnelle et personnelle des salariés. Il faut laisser aux entreprises le temps de s'adapter – dix ans représentent une courte période –, et on peut permettre des souplesses supplémentaires pour les aider tout en conservant la durée légale de 35 heures.

Certains métiers s'avèrent en tension, malgré la crise économique et le niveau du taux de chômage, et les chefs d'entreprises de ces filières utilisent les heures supplémentaires, ce qui ne nuit pas à l'embauche, celle-ci pâtissant d'une offre de travail inadaptée aux besoins. Cette situation ne crée pas de distorsion d'attractivité aux dépens de ces secteurs, et le volume d'heures supplémentaires, porté à 220 heures, permet aux entreprises de s'ajuster à la conjoncture. En outre, la loi sur la sécurisation de l'emploi ouvre la possibilité de négocier une modulation du temps de travail si l'entreprise rencontre des difficultés. S'il reste encore des verrous, levons-les !

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