Intervention de Bernard Deflesselles

Réunion du 3 décembre 2014 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Deflesselles, rapporteur :

Monsieur le président, c'est effectivement la deuxième fois que vous nous auditionnez, mais Jérôme Lambert et moi-même en sommes à notre sixième rapport sur le sujet… Nous avons également participé à de nombreuses COP.

Le GIEC est un réseau international de 800 scientifiques qui travaillent depuis vingt ans sur la question du réchauffement climatique, sur laquelle ils ont publié quelque 20 000 notes. Le GIEC comprend des économistes, des biologistes, des glaciologues et un grand nombre de scientifiques de toutes spécialités. Son président est M. Pachauri, un Indien, que M. Lambert et moi-même avons rencontré il y a quelques années et qui continue de porter la bonne parole sur le sujet.

C'est le cinquième rapport du GIEC. Je le commenterai en mettant en valeur différents chiffres.

Premier chiffre : 95 %. C'est le taux de certitude que le réchauffement climatique a pour origine l'activité humaine. Dans l'avant-dernier rapport du GIEC, publié en 2007, ce taux n'était que de 66 % : au fil des rapports, le GIEC conforte donc sa certitude en la matière, ce qui permet de tordre le cou aux arguments des climato-sceptiques. Nous en avons rencontré bon nombre, notamment aux États-Unis, où les représentants du lobby pétrolier du Texas s'évertuent à nous expliquer que le réchauffement climatique n'est évidemment pas dû à l'activité humaine – autrement dit, que nous sommes à côté de la plaque.

Deuxième chiffre : 4,8 degrés. C'est la perspective du GIEC d'élévation de la température à la fin du siècle. Une telle élévation serait considérable car elle bouleverserait les problématiques liées à la sécurité sanitaire, aux cultures ou aux déplacements de population, s'agissant notamment des îliens. Il suffit de regarder le trait de côte de la France : il recule. L'équilibre planétaire et l'activité humaine seraient totalement chamboulés par une telle augmentation. Je rappelle qu'en 1990 le GIEC avait avancé le chiffre de trois degrés et en 2007, celui de quatre degrés : progressivement, la prévision s'aggrave et finit par osciller entre quatre et cinq degrés d'élévation, à comparer avec l'augmentation de la température au XXe siècle : 0,85°. La tendance est lourde.

Troisième chiffre : un mètre. C'est la montée possible des océans à la fin du siècle. Elle a été très précisément mesurée au XXe siècle : dix-neuf centimètres. Autrement dit, c'est une augmentation facteur cinq ! Tous ceux qui habitent dans des îles ou près des côtes sont dans une mauvaise passe et doivent s'attendre à des conséquences dramatiques.

Quatrième chiffre : 70 %. C'est la réduction des gaz à effet de serre à laquelle il faut parvenir pour tenir l'objectif de la communauté internationale de maintenir l'élévation de la température à deux degrés, ce qui permettrait de contenir dans les limites supportables les bouleversements dus au réchauffement climatique en matière de cultures, de sécurité sanitaire et de santé publique ou de déplacement des populations.

Je tiens à vous rappeler que les COP se tiennent sous l'égide des Nations unies : il appartient à 195 pays de prendre les décisions nécessaires. Ces conférences ont du reste déjà permis d'engranger quelques résultats plutôt satisfaisants. Une réduction de 70 % est considérable. La décision de l'Union européenne du 24 octobre dernier, qui se substitue à la règle des « 3 fois 20 » de 2009 – baisse de 20 % des émissions de gaz à effet de serre, 20 % d'énergies renouvelables dans le mix énergétique et 20 % d'efficacité énergétique –, prévoit une baisse de 40 % des émissions, 27 % d'énergies renouvelables dans le mix énergétique et 27 % d'efficacité énergétique. Une fois de plus l'Europe montre la voie et éclaire le chemin, comme elle l'a toujours fait : son accord du 24 octobre n'est pas sans avoir inspiré celui que la Chine et les États-Unis ont récemment signé. La communauté internationale semble s'être décidée à entrer dans un cercle vertueux, même si nous pouvons légitimement nous interroger sur la sincérité des engagements des uns et des autres.

Cinquième et dernier chiffre : 0,06 %. C'est l'impact sur la croissance mondiale des décisions que les Nations unies devront prendre pour remplir l'objectif d'une élévation de la température de deux degrés. Ce chiffre permet de répondre aux propagateurs de mauvaises ondes qui soutiennent qu'un changement du paradigme énergétique contraindrait une croissance déjà bien faible. L'analyse des économistes du GIEC montre que l'effet serait au final négligeable.

Tels sont les cinq chiffres qui résument le rapport du GIEC.

La COP de Varsovie, en 2013, était une COP de transition – il est vrai qu'on le dit de toutes les COP ou presque, comme de celle de Lima qui s'est ouverte lundi, voire de celle de Paris de décembre 2015, qui, souhaitons-le, débouchera sur la signature d'un accord international. La COP de Varsovie a eu le mérite d'établir un calendrier, de donner des perspectives et de réfléchir aux types d'accords juridiquement contraignants auxquels il serait possible d'aboutir – les fameuses règles MRV en termes de mesure, rapportage et vérification. Varsovie a permis de fixer un programme et un calendrier particulièrement serré. Il faut savoir que, pour réussir la COP de Paris de décembre 2015, les feuilles de route de tous les États devront avoir été collectées au plus tard au mois de mai. Il conviendra alors de les traduire puis d'établir à partir d'elles un outil juridique adapté : il faudra en effet définir la nature de l'OVNI juridique qui pourrait être signé à Paris. Pour réaliser ce calendrier, la COP de Lima et la session de négociations de Bonn devront prendre des décisions qui permettent de tracer la route.

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