Je dois avouer un certain embarras. Auditionné en tant que directeur du Budget, je n'ai pas à émettre de jugement personnel sur un champ qui ne relève pas de mes fonctions. Si, dans le passé, je me suis intéressé à l'hôpital et à la sécurité sociale, je ne pense pas que le directeur du Budget soit habilité à se prononcer sur ces sujets. L'avis du directeur de la sécurité sociale, voire du directeur général de l'offre de soins (DGOS) serait plus pertinent que le mien.
Vous me demandez de calculer sur une période exceptionnellement longue la traçabilité de facteurs déterminant le coût d'un dispositif. Ces informations, je le répète, ne sont pas faciles à réunir. En outre, nous butons sur un obstacle culturel propre à nos politiques publiques. Alors qu'une pratique spontanée et systématique de l'évaluation – parfois menée en temps réel – permet au Gouvernement ou au Parlement d'autres pays européens de réfléchir au jour le jour à la pertinence de l'emploi des fonds public, l'administration française témoigne d'une certaine réticence dans ce domaine. Aucune décision politique n'interdit de calculer l'effet des 35 heures, mais d'autres sujets prioritaires ont pu mobiliser les directions d'études, qui ne disposent pas toujours d'effectifs importants. La direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), qui dépend du ministère des affaires sociales, possède des moyens limités et doit faire des choix dans ses travaux. L'INSEE vous fournira sans doute des informations utiles.
Vos questions posent en fait le problème délicat du coût du travail, sur lequel le Gouvernement se penche actuellement. Le pacte de responsabilité et de solidarité mobilise tous les dispositifs permettant d'alléger le coût du travail non qualifié. Les 35 heures ne sont qu'un élément d'une question plus vaste : doit-on prendre en compte le coût du travail pour apprécier la compétitivité de la France dans le contexte international ? Depuis 1998, les gouvernements ont choisi de ne pas toucher aux 35 heures, mais ils ont tous réduit le coût du travail. La loi TEPA, pour citer cet exemple, a défiscalisé temporairement les heures supplémentaires.
Vous l'avez rappelé, les 35 heures ont été mises en place dans un contexte favorable. Cependant, le taux de chômage s'établissait à 12,7 %, niveau que nous n'avons pas retrouvé ensuite. La logique de partage du travail était alors à l'oeuvre. Le dispositif Robien, mis en place en 1996, sur la base du volontariat, représentait un coût très lourd pour les finances publiques. À l'époque où l'on se plaignait d'avoir tout essayé pour combattre le chômage, la réduction de la durée du travail restait une piste à explorer. Les économistes que vous avez auditionnés vous ont sans doute signalé que les incitations fortes visant à alléger le coût du travail, complétées par le pacte de responsabilité et de solidarité, ont une incidence notable sur l'évolution du chômage.
En ce qui concerne la fonction publique territoriale, nous disposons des données de la Cour des comptes, qui rédige chaque année un rapport sur la situation des finances locales. Au moment où le Gouvernement définit sa stratégie pour les finances publiques, il a besoin de données agrégées sur les différents secteurs de l'administration publique, qu'il s'agisse des collectivités territoriales ou de la sécurité sociale. Ces données permettent de porter un diagnostic, soumis à débat contradictoire, sur l'évolution de l'emploi et de la productivité dans la fonction publique territoriale. C'est là que sont intervenues des créations d'emploi, en particulier dans les administrations non concernées par les transferts de compétences, comme le bloc communal et intercommunal. Nous ne disposons pas de données aussi précises sur le rythme de l'avancement, les procédures de recrutement ou la durée effective du travail. Peut-être la direction générale des collectivités locales (DGCL) possède-t-elle davantage d'informations.