Intervention de Angèle Malâtre-Lansac

Réunion du 27 novembre 2014 à 11h00
Commission d'enquête relative à l'impact sociétal, social, économique et financier de la réduction progressive du temps de travail

Angèle Malâtre-Lansac, directrice des études :

Nous avons noté également que certaines collectivités locales avaient des durées effectives du travail inférieures à la durée légale de travail. Nous nous sommes appuyés sur des rapports de la Cour des comptes, notamment celui de 2013.

Un autre thème relevé au cours de notre étude concerne celui des cadres au forfait dans la fonction publique, comparé au secteur privé. Seuls 5,3 % des agents des trois fonctions publiques travaillent au forfait alors que près de 30 % des agents sont des fonctionnaires de catégorie A. Même si tous ne pourraient pas être au forfait, on peut imaginer que davantage d'agents pourraient bénéficier de ce régime. D'ailleurs, le secteur privé compte 13 % de cadres au forfait pour 18 % de cadres. Ainsi, une part importante de cadres du secteur public sont aux 35 heures et accumulent de ce fait des jours de récupération.

Une incitation financière au temps partiel existe dans la fonction publique avec un surplus de rémunération accordé aux travailleurs à 80 % et 90 %. Comme vous le savez, les agents publics travaillant à 80 % sont payés l'équivalent de 85,7 % et les agents publics à 90 % sont payés l'équivalent de 91,6 %. Ce surplus de rémunération représente un montant de 600 millions d'euros net pour les agents des trois fonctions publiques, soit un coût pour les finances publiques évalué à 1,1 milliard d'euros par an.

J'en viens à la question de l'absentéisme. Pour comparer les trois versants de la fonction publique, on est obligé de se référer à l'enquête INSEE de 2003. On a constaté un taux d'absentéisme plus élevé dans le secteur public mais variable en fonction des versants de la fonction publique.

La question de l'absentéisme des salariés pour des raisons de santé selon la catégorie socioprofessionnelle et le statut dans l'emploi a été abordée par la Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) en 2003. On constate, là aussi, des écarts assez marqués selon que vous êtes en contrat à durée indéterminée (CDI), en contrat à durée déterminée (CDD) ou titulaire de la fonction publique et selon que vous êtes cadre, profession intermédiaire, employé ou ouvrier.

Enfin, l'absentéisme dans le secteur public est plus élevé que la moyenne des pays de l'OCDE. Nous sommes en effet en quatrième position en ce qui concerne le nombre annuel moyen de jours de travail pendant lesquels les fonctionnaires sont en congé maladie. Les données qui vous sont présentées remontent à 2009.

On remarquera que les titulaires de la fonction publique sont davantage absents que les non-titulaires. La Cour des comptes a évalué à 1,2 milliard d'euros le coût direct des absences pour maladie ordinaire dans la fonction publique territoriale en 2013. Quand on regarde le tableau relatif au nombre moyen annuel de jours d'absence par agent pour raison de santé, on constate une hausse entre 2005 et 2011. Par exemple, dans les régions, les titulaires étaient absents 13,3 jours en 2005, contre 28,1 jours en 2009 et 29,9 jours en 2011, soit une hausse très marquée. Le tableau présenté est extrait des bilans sociaux dans les collectivités territoriales. Il montre une différence très marquée entre le type de collectivité territoriale et le statut d'emploi de la personne qui s'absente. Le total d'absence des titulaires dans les collectivités territoriales était de 21,1 jours en 2005, contre 23,6 jours en 2011. Cette hausse est moins marquée qu'au niveau des régions, mais elle est notable. Quant aux non-titulaires sur emplois permanents, ils ont été absents 8,8 jours pour raison de santé en 2005, contre 9,6 jours en 2011, soit une légère hausse, avec des divergences fortes entre régions, départements et communes.

Nous avons également étudié la question du jour de carence qui avait été mis en place pour les fonctionnaires le 1er janvier 2012 et abrogé dans la loi de finances pour 2014. Au sein du secteur privé, il existe théoriquement trois jours de carence, mais entre 50 et 80 % des salariés du privé sont en fait indemnisés dès le premier jour d'absence. Nous avons noté également que le contrôle des arrêts maladie est plus rigoureux dans le privé, notamment avec l'envoi des arrêts maladie dans les quarante-huit heures.

Les conséquences de la fin du jour de carence dans le secteur public n'ont pas été étudiées totalement. Elles pourraient l'être au vu des données dont nous disposons dans l'enquête Emploi de l'INSEE. Mais selon une enquête de la Fédération hospitalière de France (FHF) réalisée auprès de dix-sept établissements de santé, le jour de carence aurait permis une baisse du taux d'absentéisme de 7 % et une économie de 0,17 % de la masse salariale. Le projet de loi de finances pour 2014 évalue le coût de la suppression du jour de carence à 157 millions d'euros dans les trois fonctions publiques.

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