Intervention de Barbara Romagnan

Réunion du 27 novembre 2014 à 11h00
Commission d'enquête relative à l'impact sociétal, social, économique et financier de la réduction progressive du temps de travail

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBarbara Romagnan, rapporteure :

À mon tour, je tiens à vous remercier d'avoir accepté de venir rendre compte du travail que vous avez réalisé.

Je prends acte de ce que vous avez dit s'agissant de la disponibilité des données et de leur existence même.

Vous travaillez à partir de données existantes. Mais nous n'en tirons pas tous les mêmes conclusions.

Vous avez retenu le chiffre de 12 milliards d'euros. Ce qui m'étonne toujours, c'est que l'on ne cherche pas à connaître le retour sur investissement, si je puis dire, même si je peux convenir qu'il soit difficile de l'évaluer. Dans une entreprise, si l'on ne fait pas d'investissements parce qu'ils ont un coût et que l'on n'essaie pas d'anticiper ce que cela peut rapporter, alors on ne fait jamais rien. À mon sens, on ne peut pas se contenter de dire que les 35 heures ont coûté 12 milliards d'euros. Mais le fait que davantage de gens travaillent a généré des cotisations supplémentaires et moins de chômeurs à payer. Lors de la mise en place des 35 heures, on a constaté également une hausse de la consommation qui a permis des rentrées de TVA.

Nous avons constaté nous aussi que, même si l'on manque de données, nombre de collectivités territoriales avaient baissé le temps de travail de leurs employés avant la mise en place de la loi.

À la page 6 de votre document, vous comparez la durée effective moyenne de travail des salariés à temps plein dans les pays de l'Union européenne en 2013. Elle serait de 1 650 heures en France, c'est-à-dire inférieure à 39 heures par semaine. Or, selon l'INSEE, le temps de travail d'un salarié à temps plein est supérieur à 39 heures. Comment aboutissez-vous à ce chiffre ? Il est noté en effet que ces données ont été retraitées par Coe-Rexecode.

On met toujours en avant le travail à temps plein. Or ce qui compte, à mon sens, c'est l'ensemble du temps qui est travaillé. On ne peut pas faire comme si le temps partiel était un élément secondaire. Dans tous les pays, les femmes sont plus nombreuses que les hommes à travailler à temps partiel. En France, le nombre d'heures travaillées par les femmes à temps partiel est supérieur à la moyenne des autres pays et elles sont moins nombreuses à être à temps partiel qu'en Allemagne ou aux Pays-Bas par exemple. Si l'on ne prend pas en compte le temps partiel, on obtient un résultat qui peut donner l'impression que les Français travaillent moins que les autres, ce qui n'est pas vrai, y compris lorsque l'on se compare à l'Allemagne. Et l'on pourrait même penser que si les hommes peuvent travailler à temps plein, et largement au-delà de 39 heures, c'est aussi parce que leurs femmes travaillent à temps partiel et s'occupent de la maison. Une étude réalisée dans la fonction publique montre que si des hommes font des carrières longues et consacrent beaucoup de temps à leur travail, c'est très largement parce que leurs femmes, qui sont aussi diplômées qu'eux, passent moins de temps à leur travail pour s'occuper du reste.

Vous nous avez surtout parlé de la fonction publique. Or la loi s'est surtout appliquée au secteur privé. Vous dites les choses clairement, et c'est très agréable. Si j'ai bien compris, selon vous les 35 heures n'auraient pas induit de progrès quels qu'ils soient. Mais peut-être que je sur-interprète vos propos.

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