Intervention de Marc Boudier

Réunion du 3 décembre 2014 à 18h00
Commission d'enquête relative aux tarifs de l'électricité

Marc Boudier, président de l'Association française indépendante de l'électricité et du gaz, AFIEG :

Sans être insignifiante, la concurrence, en France, s'est développée à la marge, surtout si l'on considère que l'ouverture théorique du marché remonte à plusieurs années. Ce phénomène tient d'abord à la position d'EDF, qui avait en main de nombreux atouts, à commencer par ses moyens de production très compétitifs, dans le nucléaire comme dans l'hydraulique. D'autre part, cette ouverture ne s'est pas étendue à la participation à l'appareil de production lui-même, contrairement à ce qui s'est passé ailleurs en Europe, y compris au bénéfice d'EDF, par exemple en Angleterre où le groupe, détenu à 85 % par l'État français, s'est vu confier la création et la gestion de centrales. Certes, des adhérents de l'AFIEG ont eu, dans le passé, un « droit de tirage », mais l'on ne peut pas dire que la voie soit ouverte ; M. Lévy l'a encore rappelé récemment.

L'ouverture à la concurrence de l'hydraulique est un peu l'arlésienne ; mais on y viendra un jour, sans pour autant privatiser l'ensemble du système comme certains articles de presse aiment à le faire croire. J'ajoute que les acteurs existants ont des positions, qu'ils défendront. En l'absence de participation aux meilleurs moyens de production, la compétitivité repose, par exemple, sur les frais de commercialisation ; c'est évidemment plus difficile.

Tout change dès lors qu'est donnée la possibilité de se fournir sur le marché de gros – que ce soit pour de bonnes ou de mauvaises raisons – à des prix compétitifs. J'ai donné l'exemple de la clause de monotonie. Une réforme en la matière nous permettrait de proposer aux industriels français des prix plus bas encore que le prix de l'ARENH, fixé à 42 euros le mégawattheure, contre 32 euros en Allemagne. Le marché français se caractérise par une « arenhisation » des prix de gros qui pénalise la compétitivité. Certes, la vérité d'aujourd'hui n'est pas forcément celle de demain ; mais si les prix de gros baissent en Europe – par exemple en raison de subventions payées par nos voisins –, il faudra disposer d'un système suffisamment souple pour que nous puissions en bénéficier.

Avec un prix régulé proche de celui du marché, l'ouverture à la concurrence, c'est un peu ceinture et bretelles – sans compter qu'elle flatte les instances bruxelloises… Mais dès lors que sont supprimés les tarifs réglementés, la concurrence devient une impérieuse nécessité : il faut alors tout faire, non pour l'entraver, mais pour la rendre équitable.

La dépression du marché ne signifie pas que les prix sont à leur juste niveau. Les coûts, on le sait, iront croissant, ne serait-ce qu'en raison de la modernisation et de la sécurisation du parc nucléaire. Toutefois, il ne serait pas normal de répercuter sur les prix des dérapages imputables à un certain laxisme dans la gestion. Le régulateur excepté, il n'existe rien de mieux que la pression concurrentielle pour éviter les abus en ce domaine.

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