Monsieur le Premier ministre, la privatisation des autoroutes, décidée en 2006 par le gouvernement de Dominique de Villepin, a conduit à l’époque une immense majorité des dirigeants politiques, quelles que soient leurs appartenances partisanes, à se montrer extrêmement critiques vis-à-vis d’un choix qui portait, selon eux, atteinte à l’intérêt général.
En effet, l’État, en déléguant à des sociétés privées l’exploitation d’autoroutes, déjà largement financées par les impôts des citoyens et les péages des automobilistes, se privait ainsi pour de nombreuses années d’importantes ressources pérennes. Au fil des ans, cette gestion a continué à susciter des interrogations suffisamment graves pour que la Cour des comptes puis l’Autorité de la Concurrence soient saisies d’une demande de rapport par la commission des finances de l’Assemblée nationale.
Ces deux études, publiées l’une le 24 juillet 2013 et l’autre le 18 septembre 2014, ont fait prendre conscience à tous, sur la base d’éléments factuels, précis et incontestables, de l’évolution excessive du montant des péages et du retour financier exceptionnel pour les sociétés concessionnaires d’autoroutes.
Par ailleurs, la puissance publique, confrontée à une dette de 2000 milliards d’euros, ne peut plus aujourd’hui financer ses infrastructures de transport, qu’il s’agisse de les maintenir en bon état ou d’en créer de nouvelles, plus adaptées à notre obligation de lutte contre le réchauffement climatique.
Ne pensez-vous pas, monsieur le Premier ministre, que le moment est venu pour l’État de se donner les moyens de gérer autrement le réseau autoroutier, sur de nouvelles bases plus conformes aux priorités de la Nation, c’est-à-dire au bénéfice de l’intérêt général, qui ne peut être confondu avec l’intérêt des actionnaires des actuelles sociétés concessionnaires ?
L’État peut-il, dans ce domaine, recouvrer sa pleine souveraineté sur le service public autoroutier ?