Les enveloppes financières dédiées à la Méditerranée ou aux partenaires orientaux de l'Union européenne constituent une source de financement bien distincte de l'augmentation de capital, qui est prévue pour soutenir la croissance et à l'emploi en Europe. Nous essaierons assurément de maintenir à hauteur de 10 % notre soutien aux politiques de voisinage dans le cadre de l'augmentation de capital, mais il n'est pas certain que nous y parvenions : si nos activités au sein de l'Union européenne sont très dynamiques, cette proportion baissera mathématiquement. Toutefois, notre mobilisation reste constante. C'est ainsi que M. Hoyer sera au Caire la semaine prochaine pour la première réunion du groupe de travail Union européenne-Egypte consacrée au métro de la capitale égyptienne. Pour ma part, je me rendrai en Tunisie et au Maroc, où nous accompagnons la démocratisation en cours.
S'agissant de la France, je tiens à mentionner quatre grandes orientations, qui sont susceptibles d'être renforcées dans le cadre de l'augmentation de capital.
La première concerne le soutien aux petites et moyennes entreprises. La BEI a simplifié ses produits. De plus, directement ou à travers sa filiale, le Fonds européen d'investissement, qui apporte des garanties au capital investissement, elle est prête, comme elle l'a proposé à M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances, et à M. Jean-Pierre Jouyet, futur président de la Banque publique d'investissement, à cofinancer toutes sortes de projets dès le début de l'année 2013.
La deuxième orientation vise les infrastructures qui exigent des financements longs. Le grand transport public français, comme les lignes à grande vitesse ou les lignes de tramway, a été partiellement financé par la BEI. Les collectivités locales ont un besoin de marchés très important, comme j'ai pu le constater lors du congrès de l'Association des régions de France des 18 et 19 octobre 2012. La BEI, aux côtés de la Caisse des dépôts et consignations – CDC – ou de ses équivalents européens, notamment la KfW – Kreditanstalt für Wiederaufbau – allemande ou la CDP – Cassa Depositi e Prestiti – italienne, est la dernière banque à pouvoir proposer des financements sur vingt, trente ou quarante ans permettant d'accompagner le virage écologique et économique de demain, qui exige de prévoir de grandes infrastructures de transport efficaces, y compris transfrontalières.
Quant à Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, elle réfléchit également avec la BEI à un plan de financement 2012-2020 des hôpitaux, en vue d'étaler la charge du remboursement des investissements nécessaires.
La troisième orientation concerne les nouvelles énergies. Nous avons lancé des lignes de crédits, en partenariat avec les régions ou les banques commerciales, visant à développer les énergies renouvelables. C'est un des objectifs européens majeurs en termes de créations d'emploi au plan local et de modernisation. Région après région, nous développons le recours à l'éolien, au solaire, voire à la biomasse sous certaines conditions.
La quatrième et dernière orientation vise la recherche et l'innovation, au travers du financement de différents programmes : développement des voitures électriques avec plusieurs constructeurs, modernisation des flottes aériennes, en vue de promouvoir des moteurs moins gourmands en kérosène, nouveaux produits pharmaceutiques avec les laboratoires Pierre Fabre. Nous nous efforçons de nous adresser à tous les interlocuteurs possibles, même si c'est souvent plus difficile avec les entreprises de taille intermédiaire qu'avec les grandes entreprises, compte tenu des montants en jeu. C'est pourquoi nous avons lancé, au plan européen, une étude de marché en direction tant des acteurs que nous avons déjà financés que de ceux que nous n'avons pas encore réussi à atteindre – y compris les universités et les centres de recherche –, afin de déterminer la nature de leur attente. Nous espérons tenir fin février 2013 à Paris une conférence à Bercy sur le sujet, afin d'accroître notre effort en direction de l'innovation.
Les project bonds sont, quant à eux, une belle ambition pour des temps difficiles. Le marché, en effet, ne finance plus spontanément de grands projets qui sont très mal notés en raison de la disparition des sociétés de rehaussement de crédits qui les appuyaient. Les project bonds ont dès lors pour objectif, en mobilisant à la fois les moyens budgétaires de la Commission européenne et l'expertise financière de la BEI, de doter d'un rehaussement de crédit certains projets, ce qui permettra d'améliorer leur notation et donc de les rendre acceptables aux yeux des investisseurs professionnels. L'effet de levier ainsi créé sera démultiplié : une augmentation du capital de 10 milliards permettra à la BEI de prêter 60 milliards sur trois ans et, grâce à un effet de levier, de débloquer jusqu'à 180 milliards d'euros pour des projets d'investissements. Les project bonds permettront donc, si les tests de marché auxquels nous procéderons le confirment, de faire passer l'effet multiplicateur, qui est habituellement d'un à trois, à un effet moyen d'un à dix-huit. Encore faut-il réussir les premiers projets. Or, comme l'Europe arrive au terme des perspectives financières, la Commission n'a réussi à dégager que 230 millions d'euros pour l'ensemble de l'Union : 200 millions ont été pris sur le budget des transports transeuropéens, 10 millions sur les réseaux transeuropéens d'énergie et 20 millions sur le déploiement des réseaux à haut débit. En accord avec la Commission européenne, nous devons nous limiter dans la phase pilote, qui s'arrêtera à la fin de 2014, à des projets modestes, qui ne devraient pas dépasser 200 millions d'euros chacun, ce qui nous permettra d'en soutenir une dizaine en tout pour l'ensemble de l'Union européenne. Compte tenu de l'origine des crédits, ils relèveront, par ordre décroissant, des secteurs suivants : les transports, l'énergie et le haut débit.
S'agissant de la France, deux projets autoroutiers sont en cours d'instruction – il en de même de l'Allemagne, de la Belgique, des Pays-Bas et du Royaume-Uni. La France est également concernée par deux initiatives régionales de déploiement de réseaux à haut débit, dans le Limousin et en Auvergne. Je tiens à préciser que ce n'est pas la BEI qui prendra la décision à la place des porteurs de projets : ce mode de financement obligera en effet leurs avocats et leurs conseillers fiscaux à se lancer dans une documentation nouvelle, ce qui est d'une grande complexité. Nous espérons que ces projets pourront être finalisés en 2013 puisque l'année 2014 sonnera pour les project bonds l'heure de vérité : il s'agira alors de leur donner, ou non, une dimension financière supérieure, permettant de couvrir des projets transeuropéens bien plus importants.