Intervention de Isabelle Le Callennec

Réunion du 9 décembre 2014 à 9h00
Commission d'enquête relative à l'impact sociétal, social, économique et financier de la réduction progressive du temps de travail

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaIsabelle Le Callennec :

Je tiens à féliciter Mme la rapporteure pour le travail qui a été effectué, même si je suis loin de partager son parti-pris. La Commission d'enquête avait pour objet de mesurer l'impact des 35 heures dans notre pays et de formuler des propositions. Elle a procédé à de nombreuses auditions, et nous avons là un rapport assez complet.

Un chapitre est intitulé : « Le temps de travail a été réduit par des majorités de gauche » ; cela ne nous avait pas échappé. La droite et le centre n'ont pas repris cette idée, qui avait été mise en place alors que les autres pays européens faisaient des choix différents. La baisse de la durée du temps de travail a été interrompue entre 2002 et 2010, au profit d'une incitation aux heures supplémentaires. Heureusement ! ai-je envie de dire, car l'économie de notre pays avait besoin d'être relancée par le travail.

S'agissant des effets de la réduction du temps de travail sur l'emploi, j'ai plutôt tendance à penser qu'elle a créé des emplois, quoique de façon conjoncturelle, mais augmenté le coût du travail et baissé la compétitivité. Je ne partage donc pas le point de vue défendu par le rapport d'un impact très positif. Le coût de la RTT a certes été modéré pour les finances publiques, mais il n'en a pas été de même quand il a fallu réaugmenter le temps de travail en défiscalisant les heures supplémentaires.

La réduction du temps de travail aurait été un facteur de progrès social. Oui, mais pas pour tout le monde. Les ouvriers et les employés, plus touchés par la réorganisation du temps de travail, ont vu leurs conditions de travail se dégrader. Aujourd'hui, je suis d'accord sur le fait qu'il est indispensable de réfléchir à la qualité de vie au travail. L'amélioration de la qualité de vie n'est pas aussi réelle que le laisse entendre le sommaire.

Face au défi de la compétitivité, le rapport entend formuler des propositions. Mais pour ce qui est des 35 heures, puisque les responsables d'entreprise auditionnés ne souhaitent pas les remettre en cause, c'est « circulez, il n'y a rien à voir ! ». Pourtant, un débat existe dans notre pays pour savoir si la durée légale du travail doit demeurer à 35 heures. D'ailleurs, le rapport reconnaît qu'il y a de grandes variations entre ceux qui sont à 40 heures et d'autres qui travaillent plutôt 32 ou 24,5 heures. En tout cas, en matière de propositions, on reste un peu sur sa faim.

Je m'inquiète du parti-pris de Mme la rapporteure en faveur de la poursuite de la politique de réduction du temps de travail en tirant les leçons du passé. Pour ma part, j'ai plutôt le sentiment qu'il faut travailler davantage pour relever le défi de la compétitivité. Renouer avec la croissance, résorber les déficits passe par la mobilisation des forces de travail à la fois dans le secteur privé et dans le secteur public. Le rapport n'aborde pas suffisamment la réduction du temps de travail dans la fonction publique, qu'elle soit d'État, territoriale ou hospitalière. Cela devrait pouvoir faire l'objet d'un travail entre nous, fourni et abouti, car les Français attendent une harmonisation des temps de travail. Pour ma part, je fais la différence entre les temps de travail à l'hôpital, dans les collectivités territoriales et dans la fonction publique d'État.

Enfin, je crois aux accords d'entreprise, je fais confiance au terrain et au dialogue social au plus près des responsabilités.

Pour finir, je pense que le rapport fera beaucoup parler de lui. Il sera l'occasion pour chacun d'exprimer ses convictions sur le meilleur moyen d'aller chercher ce point et demi de croissance qui seul permettra de recréer des emplois dans notre pays. Je vous rappelle que, depuis deux ans, nous en avons perdu 500 000.

Bien évidemment, nous ne sommes pas d'accord avec les conclusions de ce rapport – pour ce qui me concerne, je voterai contre. Surtout, nous attendons que le Gouvernement nous dise ce qu'il va en faire.

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