Je salue le sérieux du travail difficile de la Commission sur un dispositif vieux de plus de quinze ans. Je regrette le propos très désobligeant de M. Accoyer qui ose déclarer que le rapport n'est pas fidèle au contenu des auditions – chacun pourra en juger puisque les comptes rendus en sont publiés. Quoi qu'il en soit, il est incontestable que la mise en place des 35 heures a permis la création massive d'emplois sans dégradation de la situation des entreprises, et de dégager du temps pour la famille et pour soi. Ainsi, dans le secteur médical, les jeunes médecins revendiquent du temps et se prononcent d'ailleurs majoritairement pour le salariat qui leur permet de mieux organiser leur temps.
Évidemment, il ne s'agit pas de nier les limites, les insuffisances, les effets pervers même de ce dispositif – je pense à la législation incitative mais permissive qui a autorisé le patronat à flexibiliser davantage le travail des ouvriers et des employés.
En ce qui concerne l'hôpital, la bonne application du dispositif s'est heurtée à un manque de moyens, même s'il a permis des embauches. Je trouve significatif que la droite insiste sur la situation des hôpitaux publics, à la dégradation de laquelle elle a pourtant contribué de façon majeure avec la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, en particulier avec la mise en place de la tarification à l'acte (T2A), appliquée n'importe comment. Il faut donc se montrer sérieux et responsable dans les appréciations que l'on porte sur la situation des hôpitaux – il est un peu facile de tout mettre sur le dos des 35 heures.
Quant à l'augmentation du coût du travail, il ne faut pas faire l'impasse sur les exonérations massives de cotisations sociales patronales ni sur le gel des salaires pendant plusieurs années. Pour ce qui est du coût des 35 heures pour la puissance publique, je note que la droite exprime beaucoup moins d'émotion quand il s'agit de dégager 41 milliards d'euros d'argent public sans contrepartie au bénéfice des entreprises.
En tout état de cause, nous n'en sommes pas, dans notre pays, à 35 heures hebdomadaires effectives. Il faut tâcher d'y parvenir : rien de sérieux ne justifie leur remise en cause, même du point de vue des entreprises, car la productivité en France est parmi les plus élevées d'Europe. Par ailleurs, le chômage massif, et qui augmente, le temps partiel subi, notamment par les femmes, nous préoccupent et doivent nous amener à réfléchir autrement à l'organisation du travail et de notre société.
Aussi, j'approuve les conclusions du projet de rapport qui invitent à ne pas remettre en cause les 35 heures et à aller plus loin tout en tirant les leçons de l'expérience – afin d'en corriger les effets pervers – et tout en tenant compte de l'évolution de la société car, je le répète, les lois dont il est ici question datent de plus de quinze ans. Cela d'autant plus que, dans tous les pays d'Europe, la tendance est à la diminution du temps de travail. Je pense très sincèrement que, pour ceux qui veulent vraiment réfléchir au temps de travail, à l'organisation du travail et, au-delà, à l'organisation de la société, ce document contient des éléments très intéressants. Il s'agit, j'y insiste, d'un rapport des plus sérieux qui doit permettre d'aller plus loin pour repenser le partage du temps consacré à la famille, aux loisirs, au travail, à la formation, à l'éducation des enfants…