Je rappellerai tout d'abord ce que sont les certificats d'économies d'énergie, qui existent depuis huit ans, et qui sont au coeur du projet de loi relatif à la transition énergétique et à la croissance verte, puisqu'ils visent à améliorer l'efficacité énergétique. Ces certificats, qui ont été créés en 2006 dans le cadre de la loi de programmation fixant les orientations de la politique énergétique (POPE), ont été révisés par le Grenelle de l'environnement et reconduits dans le projet de loi relatif à la transition énergétique pour leurs troisième et quatrième périodes. Leur fonctionnement s'inscrit en effet dans des périodes triennales : la première a couru de juin 2006 à juin 2009 ; après une période transitoire, la deuxième, qui a débuté en janvier 2011 et aurait dû s'achever en décembre 2013, a été prolongée jusqu'à fin 2014. Commencera alors la troisième période, qui devrait s'étendre jusqu'en 2017, avant une quatrième adoptée par voie d'amendement.
L'État a créé, avec les certificats d'économies d'énergie, un mécanisme qui permet de mesurer les économies d'énergie. Cet outil est à la disposition des vendeurs d'énergie, qui ont désormais tous l'obligation d'aider leurs clients à moins consommer, leur permet de tracer les différentes actions qu'ils entreprendront dans le cadre de cette aide.
L'objectif que doit remplir chaque énergéticien est calculé en fonction de son volume de vente. Il doit y parvenir selon trois modalités : en s'acquittant d'une pénalité libératoire – 20 euros par gigawattheure cumac ; en mettant en oeuvre les actions nécessaires à la réalisation d'investissements conduisant à des économies d'énergie, au travers de fiches standardisées qui sont établies par des professionnels et des organismes qui délibèrent sur les économies réalisées par opération ; en recourant au marché, les énergéticiens qui génèrent un nombre de certificats supérieur à leurs besoins ayant la possibilité de les vendre.
Le rôle du GPC2E est de faciliter la création d'opérations d'efficacité énergétique donnant lieu à des certificats en vue de les mettre à la disposition des énergéticiens obligés.
Plus de 200 opérations sont aujourd'hui en cours de révision : elles concernent l'ensemble des secteurs. S'agissant du secteur résidentiel, elles ciblent l'isolation des combles, le changement de chaudière ou la mise en place de systèmes de régulation. De nombreuses opérations ont été révisées pour s'assurer qu'elles contribuaient bien à réaliser des économies d'énergie. L'objectif est de permettre à la France de se conformer à l'article 7 de la directive européenne 201227 relative à l'efficacité énergétique, ce qu'elle a fait dans le cadre du projet de loi relatif à la transition énergétique.
Chaque période triennale a fixé des objectifs croissants. Nous sommes, à l'heure actuelle, dans la phase de discussion des objectifs de la troisième période. Si des sujets ne sont pas encore définitivement tranchés, nous savons déjà que l'ensemble des énergéticiens sont désormais assujettis, y compris les vendeurs de carburant, contrairement à la première période. Le volume des économies à générer sera de 700 térawattheures cumac, les vendeurs d'électricité devant réaliser 28 % du total.
Ce dispositif remporte un vif succès : l'objectif de la première période a été largement dépassé ; quant à la deuxième période, à la fin de l'année 2014, non seulement le volume des certificats d'économies d'énergie réalisé dépassera largement l'objectif fixé, mais on peut même supposer, sur la base des chiffres actuels, qu'il aura une année d'avance.
Le mécanisme des certificats d'économies d'énergie s'applique dans d'autres États membres de l'Union européenne – Italie, Flandre, Royaume-Uni ; d'autres pays ont fait état de leur intérêt à le développer.
Il a également permis de financer des actions de formation des artisans et des entrepreneurs impliqués dans la rénovation et la mise en oeuvre des différents travaux d'efficacité énergétique. Ces actions ont révélé un déficit important de main-d'oeuvre disponible pour réaliser l'ensemble des travaux, puisque, en France, un logement sur deux n'atteint pas la catégorie F du diagnostic de performance énergétique créé dans le cadre de la loi POPE, en même temps que les certificats d'énergie. Ces logements ont une consommation six à huit fois supérieure à celle d'un logement neuf. Il est d'autant plus nécessaire de le rappeler que le projet de loi relatif à la transition énergétique prévoit d'élever le nombre des rénovations annuelles de 300 000 à 500 000 : or ce ne sont pas moins de 15 millions de logements qu'il est nécessaire de rénover en France. Le sujet est donc au coeur du débat politique et sociétal français.
Votre commission d'enquête se penche aujourd'hui sur l'impact sur le prix de l'électricité du coût de ces certificats et des mesures mises en place pour réaliser des économies d'énergie.
Il faut savoir que chaque entreprise est libre de mettre en oeuvre les actions qu'elle jugera nécessaires pour inciter ses clients à entreprendre des travaux énergétiques : c'est une véritable gageure, sachant que cette question n'est pas au coeur des préoccupations des Français. Il importe donc de conduire un important travail d'éducation du marché, comprenant des actions de sensibilisation et d'information. Il convient aussi de prévoir des outils permettant, dans le secteur résidentiel, d'accompagner les ménages à prendre les bonnes décisions : ils doivent, à cette fin, savoir quels travaux sont éligibles, qui les réalisera et comment ils seront réalisés.
Si les premières mesures adoptées en la matière datent déjà de huit ans, toutefois, le défi à relever n'en est encore qu'à son commencement. Il faut en effet persuader, avec des mécanismes de décision et des types d'intervenants différents, le plus grand nombre possible de ménages à réaliser des travaux d'économies d'énergie, sachant que le secteur résidentiel se répartit en trois principales catégories : le logement social, les copropriétés et les maisons individuelles, qui représentent 54 % du parc de logements en France.
Pour l'ensemble des opérations à conduire, que ce soit en termes de sensibilisation, d'information, d'aide à la décision, d'accompagnement ou de suivi, les énergéticiens sont maîtres des coûts puisqu'il leur appartient de promouvoir les différents moyens d'inciter les Français à entreprendre des travaux de rénovation énergétique. Ces travaux ont un retour sur investissement puisque, en réduisant la consommation énergétique des logements, ils améliorent à terme leur valeur. En effet, différents observatoires notent l'apparition sur le marché de la valeur « verte ».
À l'heure actuelle, les coûts liés aux différentes étapes de la démarche d'efficacité énergétique figurent, pour la plupart des entreprises, dans le chapitre des coûts commerciaux, qu'il est difficile de mettre à plat. En octobre 2013, la Cour des comptes a publié un rapport qui fait état d'un écart important entre, d'une part, le coût affiché par l'énergéticien électricien de référence français, c'est-à-dire le prix de revient des opérations mises en oeuvre et, d'autre part, le prix du marché. Cet écart, de trois, pour le prix du marché – 3,5 ou quatre en prix de revient – à dix, a été réduit de 40 % dans le rapport publié plus récemment par la Commission de régulation de l'énergie (CRE). Il est difficile de donner plus d'éléments en l'absence d'une comptabilité analytique détaillée de chaque énergéticien.
Pour le GPC2E, il convient, dans le cadre de cette commission d'enquête, de prendre en compte tous les coûts constitutifs du prix de l'électricité, en levant notamment des ambiguïtés sur des éléments de coût qui pourraient être perçus comme plus importants qu'ils ne sont en réalité, a fortiori lorsqu'on les replace dans le contexte du projet de loi relatif à la transition énergétique.