Intervention de Didier Migaud

Réunion du 25 septembre 2012 à 16h15
Commission des affaires sociales

Didier Migaud, premier président de la Cour des comptes :

Madame Pinville, nous ne remettons pas en cause, pour les personnes fragiles ou dépendantes, le principe de l'exonération de cotisations sociales patronales dont bénéficient les particuliers de plus de 70 ans employant un salarié à domicile. Toutefois, l'exonération étant accordée du seul fait de l'âge, indépendamment du niveau de revenus, une personne âgée de plus de 70 ans bien portante et dotée de revenus confortables est traitée de la même manière qu'un retraité modeste. C'est pourquoi la Cour propose de soumettre cette exonération à conditions de ressources. Il faut savoir que cette exonération, qui est aujourd'hui plafonnée à 65 fois le SMIC horaire par mois – soit une économie maximale de quelque 245 euros par mois – et profite à 585 000 bénéficiaires, coûte 380 millions d'euros.

Du reste, l'INSEE relève que le taux de dépendance des hommes et des femmes n'est que de 5 % jusqu'à 75 ans, l'âge moyen de la dépendance étant de 78 ans pour les hommes et de 83 pour les femmes. C'est pourquoi nous proposons la remise à plat de certains dispositifs, qui méritent d'être réévalués en fonction des besoins réels.

M. Issindou a pensé relever une contradiction entre deux des recommandations de la Cour. Celle-ci constate, en effet, que de nombreuses personnes éligibles à l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) ne la demandent pas, par manque d'information, ce dispositif ne faisant pas l'objet de campagnes de communication, contrairement à d'autres prestations. La Cour recommande donc de systématiser l'information à destination des personnes éligibles à l'ASPA. Cela ne lui interdit pas toutefois de demander en même temps le déplafonnement de la récupération sur succession, afin de mieux tenir compte, au nom de l'équité, de l'effort de solidarité nationale consenti envers les bénéficiaires du minimum vieillesse. Du reste, ce n'est pas tant son éventuel déplafonnement mais le principe même de la récupération sur succession qui peut conduire certaines personnes éligibles à renoncer au dispositif. Dès lors, la Cour estime que les conséquences de ce déplafonnement seraient faibles.

Madame Rabault, si la Cour s'est appesantie cette année sur la situation des retraités – l'ensemble des dispositions dérogatoires dont ils bénéficient s'élève à quelque 12 milliards d'euros –, c'est dans le cadre d'un travail continu sur les niches sociales et fiscales. Les dépenses fiscales, quelles qu'elles soient, sont insuffisamment évaluées alors même que, comme le relèvent plusieurs rapports de la Cour et de l'Inspection générale des finances, le rapport coût-efficacité de plusieurs niches fiscales est loin d'être pertinent, notamment au regard des nouveaux besoins ou des nouveaux objectifs définis par le pouvoir politique.

La situation des retraités est très contrastée. S'ils sont loin d'être tous des privilégiés, il convient néanmoins de réévaluer plusieurs mécanismes, tels que la CSG ou la fiscalisation des majorations de pension, qui ne sont pas fiscalisées pour les retraités ayant eu au moins trois enfants. De même, les retraités doivent-ils continuer de bénéficier de l'abattement de 10 % pour frais professionnels sur les pensions ? La Cour invite la représentation nationale à réexaminer l'ensemble de ces dispositions, tout en appelant son attention sur la situation très précaire dans laquelle se trouvent de nombreuses personnes âgées.

La Cour n'a pas abordé la question de la création d'un régime de retraite unique et universel dans le chapitre qu'elle consacre à l'interlocuteur social unique. Ce chapitre est essentiellement consacré aux perturbations du recouvrement des cotisations des travailleurs indépendants. Le dispositif actuel est moins performant et plus coûteux que les précédents qui, déjà, ne donnaient pas satisfaction. Une nouvelle réforme s'impose donc.

S'agissant des différents modes de garde des enfants – je réponds aux questions de Mmes Rabault et Poletti sur le sujet –, l'État doit-il aider tous les foyers indépendamment de leur niveau de revenus ? Ma réponse est négative. Les prestations ne sauraient être toutes universelles.

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