Le texte permet effectivement aux maires d'autoriser le travail dominical, dans les commerces dont il choisit le positionnement, douze dimanches dans l'année, dont cinq de droit.
Monsieur Heinrich, je pense avoir répondu à vos inquiétudes relatives à la profession d'avocat en évoquant la postulation territoriale. Pour ce qui est de la libre installation, elle se fera dans les zones situées sous la moyenne, mais pas dans celles où il y a déjà suffisamment de notaires : elle ne sera donc pas un facteur de concentration ou de création de déserts notariaux ; idem pour les huissiers. En ce qui concerne l'ouverture des commerces le dimanche, l'initiative revient aujourd'hui aux maires et aux présidents d'EPCI pour les zones touristiques, et les communes concernées se verront demander leur avis avant que la décision ne soit prise s'agissant des zones touristiques internationales.
Enfin, vous soulevez la question importante du rôle de l'Autorité de la concurrence. Il s'agit simplement, dans le cadre du contrôle de légalité, d'un avis pouvant être demandé par le préfet ou par l'Autorité autosaisie sur les textes d'urbanisme mentionnés. J'insiste sur le fait que ce n'est qu'un avis destiné à éclairer le contrôle de légalité, dont l'existence se justifie par le caractère extraordinairement malthusien de certains textes d'urbanisme, qui ne permettent l'ouverture d'aucun nouveau commerce. Plutôt que de rouvrir le dossier bien connu des commissions départementales d'aménagement commercial (CDAC) et de la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC), récemment traité par la loi, il a semblé préférable de mettre en oeuvre un examen plus approfondi des documents d'urbanisme dans le strict respect de la libre administration des collectivités territoriales.
Monsieur Castaner, vous avez souligné l'importance du dialogue social, ce à quoi je souscris pleinement, notamment pour ce qui est des travaux du COPIESAS, qui nous permettront certainement d'améliorer notre texte. Vous avez également mentionné la compensation pour les commerces alimentaires, actuellement ouverts de droit jusqu'à 13 heures. Dans le cas général, la compensation n'est pas prévue par le texte, et elle n'est d'ailleurs pas souhaitée par les professionnels, souvent couverts par des accords de branche existant depuis très longtemps – car il est dans les gènes de ces professions, notamment les commerces de bouche, de travailler le dimanche – et prévoyant des compensations salariales de l'ordre de 1,2 ou 1,3. Étendre la compensation pourrait faire courir un risque économique à certaines entreprises. En tout état de cause, nous avons décidé de ne pas rouvrir ce dossier concernant des commerces très spécifiques. Peut-être jugerez-vous opportun, dans un objectif de simplification, de tout ramener à un accord de branche, d'entreprise ou de territoire, mais je précise que nous n'avons pas concerté sur ce point. Il a seulement donné lieu à des discussions avec Carole Delga, secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire, et l'ensemble des professionnels concernés, qui ont tous déclaré préférer en rester au statu quo.
M. Francis Vercamer a fait au texte le reproche d'un manque de cohérence, ce que je ne peux accepter. Ce qui est proposé avec la réforme du conseiller prud'homal n'est qu'un élément de représentation et de simplification : la suppression des élections constitue une réforme de structure complémentaire. Sur l'inspection du travail, c'est le même texte qui servira de base à la concertation.
Pour ce qui est du travail du dimanche, je n'ai pas d'élément de réponse au sujet des aspects transfrontaliers. La diversité des situations évoquée par M. Francis Vercamer me conforte dans l'idée qu'il faut donner plus de flexibilité aux territoires : en effet, une commune frontalière peut avoir, contrairement à des communes situées en d'autres points du territoire, un intérêt à passer de cinq à douze dimanches d'ouverture. J'y vois un exemple concret du besoin de respiration territoriale pour ce qui est de l'ouverture le dimanche, et de notre volonté de donner le maximum de latitude aux élus locaux, hormis dans les zones touristiques internationales, dont le périmètre est toutefois extrêmement réduit.
Vous avez raison, madame Capdevielle, d'évoquer la question des avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation, dont le projet de loi ne fait pas mention, mais au sujet de laquelle le rapport de Mme Cécile Untermaier apporte des éléments de réflexion. Il me semble que cette commission doit se saisir de la question et s'interroger sur les voies et moyens de moderniser cette profession de manière méritocratique, conformément à l'objectif poursuivi par l'ensemble des réformes que nous entendons mener au moyen de ce projet de loi. Il est important de le faire en préservant la qualité des avis rendus et, sur ce point, je reste ouvert à vos suggestions.
Pour ce qui est des bureaux secondaires, je pense qu'il faut prévoir une simple déclaration avec contrôle a posteriori du bureau local sur la réalité de l'activité, afin d'éviter les avocats hors sol. Il est important de faciliter l'installation de ces bureaux afin de prendre en compte le maillage territorial, ce qui passe par une inscription dans le texte.
Deux voies sont envisageables pour la réforme des prud'hommes. La première consiste à croire en la phase de conciliation et à lui donner le plus de substance possible, en accroissant les conditions de motivation et en déjudiciarisant cette phase autant que faire se peut, afin d'éviter que ce qui est dit durant la conciliation puisse être retenu contre les parties ultérieurement. Cette façon de procéder – celle que nous avons choisie, sans peut-être aller suffisamment loin – est fondée sur le paritarisme, puisque le bureau de conciliation est une structure paritaire. La deuxième consiste à supprimer la phase de conciliation et équivaut à un constat d'échec, puisque ce faisant, on renonce à un principe se trouvant au coeur même de la justice prud'homale. Elle entraîne une confrontation à une logique de moyens, car on s'oriente alors beaucoup plus vite vers le juge départiteur, ce qui implique de recourir à des juges professionnels – je n'irai pas jusqu'à parler d'échevinage, mais chacun aura compris ce que je veux dire.
Je suis très favorable à ce que nous ayons des discussions techniques approfondies sur cette question pour déterminer quelle solution est préférable en termes d'efficacité mais aussi de philosophie, afin de préserver le principe de paritarisme et de limiter les contraintes et incidences sur les finances publiques. On peut toujours se faire plaisir en instaurant des délais courts dans les textes de loi, mais cela ne sert à rien si l'on ne crée pas ensuite les postes de magistrats permettant de les respecter. Je partage vos aspirations et suis bien conscient des limites du texte, qui n'y répond qu'imparfaitement mais, en tout état de cause, nous aurons à choisir entre ces deux solutions inspirées de deux philosophies distinctes.
Pour ce qui est du sujet important qu'est le sort de Nexter, je veux d'abord dire, monsieur Vitel, que ce n'est pas une privatisation qui est envisagée, mais une ouverture de capital en vue d'un rapprochement avec l'entreprise allemande KMW. Nous avons choisi d'inscrire cette opération dans le texte qui vous est soumis pour mettre fin à un mouvement circulaire qui se poursuit depuis plusieurs mois : faute de dispositif légal adapté, les Allemands nous reprochent de ne pas être en situation d'avancer ; quant à notre entreprise française, elle ne parvient pas, à elle seule, à faire progresser les négociations. Je suis parfaitement conscient des réticences de mon homologue allemand, Sigmar Gabriel, au sujet des exportations d'armes, et des discussions politiques et techniques sont en cours entre nos pays respectifs afin de trouver des réponses. Si, aujourd'hui, les Allemands ne changent pas leur attitude de repli, même en deçà des textes des accords Debré-Schmidt, nous aurions un problème non seulement pour le rapprochement entre Nexter et KMW, mais aussi pour certaines activités d'EADS.
Au-delà des sensibilités politiques, chacun est parfaitement conscient de la nécessité de trouver une sortie par le haut, et l'ouverture de capital qui est proposée est l'une des conditions nécessaires pour cela. Enfin, les syndicats verront leurs préoccupations parfaitement prises en compte : comme c'est souvent le cas lors de telles opérations de rapprochement, on crée une holding – la plupart du temps basée aux Pays-Bas pour des raisons de gouvernance ; c'est ce qui a été fait notamment pour EADS et pour l'alliance Renault-Nissan. Cela dit, les structures opérationnelles ne seront en aucun cas vidées de leur contenu, et nous devons d'ailleurs attendre de voir comment les opérations se déroulent : en l'état actuel, nous sommes très loin de disposer d'une solution réglant l'ensemble du problème. Notre première préoccupation doit être de permettre l'ouverture du capital, de mettre en place une vraie négociation, actuellement très loin d'aboutir, sur nos valeurs communes, ainsi qu'une discussion sur les accords Debré-Schmidt – purger cette question est pour nous une condition essentielle à la poursuite du processus de rapprochement.
Madame Dumas, vous avez évoqué les associations, un sujet important, comme je l'ai dit dans le cadre de l'examen de la loi relative à l'économie sociale et solidaire. Sur ce point, notre texte peut et doit être enrichi, car les associations représentent un levier d'activité participant pleinement à l'activité et à la croissance du pays ; elles sont souvent aussi, et de plus en plus fréquemment, un élément de transition dans la carrière des salariés. Il convient donc de déverrouiller les accès aux associations, et je suis tout à fait favorable à ce que l'on puisse enrichir le texte de dispositions sur ce point.
Madame Guittet, j'ai pris note de votre scepticisme et de vos interrogations. Pour ce qui est des lignes d'autocar, j'ai envie de vous donner ce simple conseil : ne vous compliquez pas la vie ! Il n'y a pas à craindre que l'on réduise le service public des lignes d'autocar, puisqu'il n'existe pas à l'heure actuelle – sauf dans le cadre de certains groupements mis en place par des collectivités locales. Ce que nous proposons, c'est simplement d'ouvrir ce secteur. Il y aura des lignes rentables – ce qui est une bonne chose, car l'exploitation d'une affaire rentable, c'est le principe même de l'économie –, qui vont permettre de créer de l'activité, donc de l'emploi, dans le secteur marchand. Les lignes ne seront pas rentables partout et, là où elles ne le seront pas, la question se posera de savoir s'il est opportun de les créer tout de même au moyen de subventions publiques. De même, quand les investissements nécessaires n'auront pas été réalisés, il faudra se demander s'il n'est pas plus judicieux pour la collectivité et l'argent public d'aider à la création d'une ligne d'autocar plutôt qu'à celle d'une ligne de train. En tout état de cause, nous protégerons d'une concurrence sauvage des autocars les lignes de train ayant bénéficié d'investissements compensés – c'est l'objet de l'avis préalable de l'Autorité de régulation pour l'ouverture infrarégionale. Pour le reste, de grâce, laissons respirer l'activité en permettant l'émergence de nouveaux modes de transport et de nouvelles formes d'activité !
Pour ce qui est des travailleurs détachés, nous sommes tout à fait d'accord. Sur ce point, les dispositions du texte sont celles que vous aviez déjà travaillées et qui n'avaient pas pu être intégrées aux précédents textes : on reprend quasiment mot pour mot ce qui se trouvait dans votre rapport, en renforçant les conditions de sanction. La carte dans le BTP, préparée par François Rebsamen et annoncée par le Premier ministre, répond à une demande forte du secteur du bâtiment. Les plus grandes entreprises de travaux publics sont réticentes en raison des contraintes qu'un tel dispositif entraîne au niveau européen, mais il s'agit là d'un élément de régulation fortement souhaité. Pour ce qui est des décrets d'application, je n'étais pas informé du problème que vous soulevez, mais je vais me renseigner.
En ce qui concerne le travail dominical, là encore, n'ayez pas peur des libertés que nous proposons d'introduire. Cette loi n'obligera pas les maires à ouvrir douze dimanches par an, ni les commerces à ouvrir tous les dimanches, pas plus qu'elle n'enchaînera les Français à des chariots de supermarché : ce n'est pas le projet de société que nous soutenons. Notre texte donne l'opportunité aux maires d'ouvrir jusqu'à douze dimanches par an, à des salariés de travailler le dimanche en bénéficiant d'une compensation, et aux Français, qui consomment déjà le dimanche, de le faire encore plus s'ils le souhaitent. La société du choix, c'est aussi la société de l'émancipation, et c'est le projet de société que nous devons porter.
Je pense avoir répondu à toutes les questions qui m'ont été posées, monsieur le président.