Intervention de Marc Robert

Réunion du 26 novembre 2014 à 17h00
Commission de réflexion sur le droit et les libertés à l’âge du numérique

Marc Robert, procureur général près la cour d'appel de Versailles, auteur du rapport Protéger les internautes relatif à la cybercriminalité :

Pas simplement, il concerne aussi les États et les systèmes juridiques. Vous pourrez le constater dans maintes directives ou recommandations européennes qui insistent sur la nécessité de mettre fin à la pédopornographie, notamment grâce aux blocages. Et vous le retrouverez outre-Atlantique alors que nous savons que nos amis américains sont beaucoup plus prudents en ce qui concerne la protection de la vie privée et l'atteinte à la liberté d'expression.

En matière de blocage, vous connaissez notre position. Nous sommes bien obligés de constater qu'en France, depuis dix ans, les techniques qui y sont associées ont subi de multiples allers et retours. Tout a été essayé dans les normes françaises – blocage administratif, blocage civil, blocage pénal – et de nombreuses législations n'ont pas reçu d'application depuis dix ans, sans compter celles qui ont été abrogées avant même d'être mises en oeuvre, notamment dans le domaine réglementaire.

Pour nous, le blocage doit être la réponse ultime : on ne doit y avoir recours que lorsque toutes les autres possibilités ont été épuisées. Ce principe de subsidiarité nous paraît extrêmement important. Le déréférencement, autrement dit l'obligation faite aux moteurs de recherche de déréférencer certains sites, nous paraît plus simple et plus efficace, même si la loi ne le permet pas encore. Nous considérons que même s'il y a lieu à blocage, il faut laisser à l'hébergeur ou au fournisseur d'accès le soin de trouver d'autres solutions qui aient la même efficacité afin de véritablement encourager cette subsidiarité.

Enfin, selon nous, le blocage doit être judiciaire, exclusivement judiciaire. La seule exception est la pédopornographie, compte tenu du consensus international, de la loi française et de la décision du Conseil constitutionnel.

L'intérêt du blocage est en réalité relatif : il permet d'éviter que le plus grand nombre puisse facilement accéder à des données illicites mais il ne constitue qu'un outil parmi d'autres. Le débat de nature technique sur ses modalités me dépasse très nettement. Beaucoup de pays ont choisi la voie de la facilité qui consiste à laisser au prestataire lui-même le choix du mode de blocage qui lui paraît le plus efficace. Dans certains cas, il est gratuit, y compris lorsqu'il est mis en oeuvre sur décision judiciaire – je vous renvoie à la loi HADOPI.

Bref, ma préférence va aux solutions portant sur les outils de recherche.

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