Intervention de Philippe Aigrain

Réunion du 25 septembre 2014 à 8h00
Commission de réflexion sur le droit et les libertés à l’âge du numérique

Philippe Aigrain :

La démarche des lanceurs d'alerte intervient souvent au terme d'une dérive dont les étapes précoces sont ponctuées par des avertissements formulés dans un autre cadre. Ainsi dans l'affaire Snowden, de hauts responsables de la NSA avaient-ils alerté l'opinion publique dès l'adoption du Foreign Intelligence Surveillance Act of 1978 Amendments Act of 2008. On touche ici à la question du devoir de réserve ; or si en matière de protection des lanceurs d'alerte, nous ne pouvons en effet nous inspirer d'aucun exemple étranger, la définition du devoir de réserve a fait l'objet d'une décision intéressante du médiateur européen qui a autorisé la quasi-totalité des fonctionnaires européens à exprimer leur désaccord avec une politique conduite à condition de le faire à titre d'opinion personnelle. Ce n'est qu'à partir du niveau de directeur général de la Commission européenne que le devoir de réserve doit s'appliquer. Dans le cadre du rapport « Vers une société de la connaissance ouverte » rédigé en 2007, Godefroy Beauvallet avait pour sa part recommandé de substituer au devoir de réserve des fonctionnaires un « devoir de participation ». Il serait utile de situer le cas extrême des lanceurs d'alerte et des territoires d'action régalienne qui jouissent de protections légitimes dans un contexte plus large, car dans bien des dysfonctionnements, l'ampleur des dégâts – causés par l'amiante, le tabac ou certains médicaments – est liée au défaut d'une parole précoce.

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