Intervention de Alain Rémy

Réunion du 3 décembre 2014 à 9h00
Commission des affaires étrangères

Alain Rémy, ambassadeur de France en Ukraine :

L'élément nouveau qui devrait susciter l'intérêt – et non le désespoir, monsieur Myard – est représenté par la cinquantaine de jeunes députés, anciens participants du Maïdan, élus le 26 octobre. On les avait vus, l'hiver dernier, par moins 30 degrés, animer la tribune nuit et jour; passés de l'action sociale à la politique, ils sont pour la plupart regroupés dans le parti créé par le jeune maire réformateur de Lviv, Samopomitch – mot qui signifie « auto-assistance ». Très mobilisés, ces élus sont porteurs de tous les espoirs et de toutes les attentes de réformes de la population. Ils veulent faire de l'Ukraine un pays européen au fonctionnement transparent et démocratique. Répartis dans la Rada – en dehors du groupe Samopomitch, les grands partis traditionnels en accueillent également un certain nombre –, ils feront masse pour exiger les réformes, que souhaitent également les dirigeants ukrainiens.

Sur la politique de la France en Ukraine, j'évoquerai plusieurs points. Le 20 février 2014, notre pays a joué un rôle de premier plan lorsque le ministre des affaires étrangères, Laurent Fabius, s'est rendu à Kiev avec ses deux homologues du « Triangle de Weimar » ; l'accord négocié dans la nuit tragique du 20 au 21 février a déclenché les événements politiques – mais non les violences – qui ont suivi. La France a ensuite pris une option forte le 6 juin en permettant la première rencontre, en Normandie, entre les présidents Poutine et Porochenko, avant même l'investiture de ce dernier. Cette initiative – confortée le lendemain par le déplacement de M. Fabius en Ukraine pour l'investiture du président Porochenko – a eu des conséquences positives sur l'image de notre pays, renforçant notre visibilité et notre influence en Ukraine. Depuis, notre relation passe par les entretiens téléphoniques du Président de la République avec le Président Porochenko, les nombreuses rencontres à Bruxelles et ailleurs au niveau ministériel, les contacts téléphoniques fréquents. Nous sommes très présents dans le paysage ukrainien et nous y affirmons notre regard particulier et notre engagement au service d'une sortie de crise. Bien sûr il y a des points sensibles comme la question des Mistral : des manifestations sont organisées devant l'ambassade, l'affaire est commentée dans la presse et à la télévision. Mais globalement notre image reste positive.

La France accompagne les réformes ukrainiennes. Cet été, nous avons dépêché un conseiller spécial auprès du ministère de l'intérieur pour préparer, pendant quatre mois, les élections législatives, en particulier dans les zones où la sécurité était mal assurée. Nous avons mis en place des crédits de sortie de crise ; nous agissons dans le domaine humanitaire, notamment pour le traitement des blessés et l'accompagnement des déplacés intérieurs. Nous sommes parmi les principaux investisseurs en Ukraine. 170 entreprises françaises sont présentes dans le pays, dans tous les secteurs – automobile, bancaire, financier, assurance, pharmaceutique, grande distribution. Elles se plaignent du climat des affaires, toujours déplorable. En effet, la corruption a changé de visage, mais reste omniprésente : centralisée aux mains du clan présidentiel sous Ianoukovitch, elle est désormais devenue multipolaire, traversant les régions et les services administratifs. Nous travaillons beaucoup pour aider nos entreprises face à cette corruption.

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