Intervention de Jean-Claude Zerbib

Réunion du 24 novembre 2014 à 16h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Jean-Claude Zerbib, ingénieur, expert indépendant en radioprotection et sûreté nucléaire :

Les malveillances comme les actions terroristes posent à la sûreté nucléaire des problèmes aussi difficiles à traiter que ceux résultant des anomalies qui affectent un dispositif et ses éléments importants pour la sûreté. Pour des raisons évidentes de sécurité, l'étude de ces problèmes ne fait pas l'objet de publications par les organismes chargés de sûreté ou de sécurité nucléaire. Mais, ce qui est frappant, c'est que l'analyse générale des incidents et accidents survenus montre que des éléments technologiquement simples comme des vannes, des pompes, des diesels ou des tuyauteries peuvent, s'ils viennent à être défaillants, mettre en péril une installation de haute technologie. Il est important de noter ce contraste. Pour moi, l'accident le plus redouté est celui de la défaillance malveillante d'un ou plusieurs éléments qui conduiraient à la rupture d'étanchéité d'une piscine d'entreposage, soulevée par M. Yannick Rousselet. Elle conduirait à une dégradation significative des assemblages combustibles nucléaires irradiés. La réduction importante du refroidissement de ces assemblages entraine toujours une détérioration du combustible.

Dans le cas où le combustible a été extrait depuis quelques jours, quelques semaines ou quelques mois, cette défaillance peut être la fusion du combustible avec le relâchement des iodes. En l'absence de prophylaxie avec des iodes stables, il peut y avoir des impacts sanitaires importants dans l'environnement de l'installation. Aussi la production d'hydrogène peut, par explosion ou inflammation, dès que l'on dépasse 4 % dans l'air, faire des dommages importants. Au bout d'une année de refroidissement, la détérioration du combustible est moindre, la fusion n'est plus possible, mais si la piscine se vide, l'approche humaine est quasiment impossible ou très périlleuse.

Pour fixer quantitativement le risque, il y a à peu près 14 000 tonnes de combustible déchargé aujourd'hui, 4 000 se trouvant dans les piscines des réacteurs nucléaires, et 10 000 dans les quatre piscines d'entreposage de La Hague. Elles sont dans des locaux industriels non blindés. Un orifice d'une dizaine de centimètres sur une piscine, provoqué par un tir de bazooka par exemple, pourrait rendre extrêmement difficile le renoyage du combustible.

L'utilisation malveillante des drones peut consister en une géolocalisation des zones sensibles, qui permettraient de guider un tir d'une ou plusieurs roquettes. Je vous rappelle qu'il y a eu cinq tirs de roquettes sur le réacteur de Creys-Malville lorsqu'il était en construction en 2003. Cela a été avoué récemment par le tireur, un ingénieur suisse.

Un deuxième problème se pose : les survols actuels par des drones civils constituent peut-être des galops d'essai avant l'usage de drones militaires.

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