Si nous nous retrouvons avec mon collègue Christophe Caresche sur l'analyse de l'examen annuel de croissance et des orientations de politique économique pour 2015 proposées par la Commission européenne, nous avons en revanche, et c'est bien normal, des points de désaccord qui portent à titre principal sur la stratégie budgétaire et économique du Gouvernement.
Dans notre rapport d'information de juin dernier, j'avais relevé que non seulement la trajectoire présentée par le Gouvernement n'était pas conforme aux exigences du pacte de stabilité et de croissance, mais qu'en outre, il apparaissait clairement que le Gouvernement ne serait pas en mesure de respecter cette trajectoire. Et bien, nous y sommes !
Alors que la France a fait l'objet en mars dernier d'une recommandation de la Commission européenne, qui lui demande de prendre des mesures de correction rapides, afin de respecter les objectifs fixés par le Conseil en matière de déficit public, force est de constater que rien n'a été fait et que le dérapage est manifeste.
La Commission européenne ne s'y trompe pas, puisqu'elle estime dans son avis sur le projet de budget pour 2015 qu'il existe un risque qu'aucune action suivie d'effets ne soit prise en 2014 (puisqu'elle examine 2014 aussi à cette occasion) et que les exigences posées dans le cadre de la procédure pour déficit excessif ne seront pas respectées en l'absence de mesures nouvelles.
La dégradation du déficit nominal de la France entre 2013 et 2014 et les prévisions relatives aux déficits nominaux et structurels pour 2014 et 2015 d'une part et la faiblesse de la croissance et le risque croissant de déflation en France d'autre part montrent l'inefficacité de la politique menée par le Gouvernement. Celle-ci vient d'ailleurs de se voir à nouveau sanctionnée par l'agence de notation Fitch, qui a abaissé la note de la France de « AA+ » à « AA ».
L'avis de la Commission européenne me conforte dans les analyses que j'avais développées dans nos précédents rapports. Ainsi, la Commission européenne estime que – je cite – « peu d'efforts ont été faits » pour assurer la viabilité des finances publiques à long terme. La Commission déplore en particulier que, dans le domaine des retraites, aucune mesure n'est envisagée par le Gouvernement au-delà de la réforme de 2013, qui, souligne-t-elle, « a peu modifié le régime de retraite de la fonction publique ainsi que les autres régimes spéciaux, et ne permettra de combler que la moitié du déficit du système d'ici à 2020 », confirmant ainsi la nécessité, que j'évoquais déjà dans le précédent rapport, d'une véritable réforme des retraites qui devrait notamment reposer sur une mise en cohérence de l'âge de départ en retraite avec l'allongement de la durée de vie, comme cela s'est déjà fait dans tous les pays européens.
Je relève par ailleurs que les 3,6 milliards d'euros d'effort supplémentaire annoncés par le Premier ministre le 27 octobre 2014 ne résultent, à mes yeux, absolument pas d'économies structurelles, mais de révisions de prévisions de recettes, dont on peut douter de la fiabilité, et de nouvelles augmentations d'impôts. Il apparaît en outre que le Gouvernement présente la révision à la baisse du prélèvement sur recettes au profit du budget de l'Union comme une mesure contribuant à l'amélioration du solde structurel, alors qu'il figure expressément dans le document de travail de la Commission européenne analysant le projet de budget de la France que tel ne sera pas le cas.
Les réformes annoncées par le Gouvernement ne sont, enfin, pas à la hauteur des défis que la France doit relever. Ainsi, il existe de sérieux doutes sur l'efficacité et les conséquences en termes d'économies de certaines réformes engagées. Je pense, par exemple, à la réforme territoriale, dont il ne me semble pas qu'elle soit facteur de simplification, de lisibilité et d'économie. Nous, élus franciliens, savons qu'il est ainsi nécessaire d'avoir une balise argos pour nous y retrouver. De même, j'ai quelques doutes sur le fameux le projet de loi pour la croissance et l'activité, qui ne me semble pas devoir répondre aux exigences de compétitivité et d'amélioration du fonctionnement du marché du travail.
Au total, la stratégie du Gouvernement ne me semble pas adaptée aux défis auxquels la France est aujourd'hui confrontée.
Je voterai donc contre la proposition de conclusions présentée à la commission des Affaires européennes.