Bien que je ne sois pas pressenti à la présidence du futur institut national de santé publique, puisqu'il n'est pas encore créé, je dois vous dire deux ou trois choses pour répondre à certaines de vos questions.
Ce futur institut sera centré sur la population, alors que certaines agences sont centrées sur les produits de santé, ce qui vous a amenés à évoquer également l'ANSES. Le lien entre les deux est forcément naturel : on ne peut pas évoquer les farines animales indépendamment de l'encéphalopathie spongiforme bovine, par exemple. Aussi le lien entre les établissements devra-t-il s'opérer d'abord au niveau des directeurs généraux et du ministère de la santé, mais aussi au niveau du président du conseil d'administration.
Le futur institut national de santé publique est très attendu, d'autant qu'il correspond à un modèle international. Le Center for Disease Control and Prevention (CDC) d'Atlanta a ajouté il y a quelques années le terme « prévention » à sa dénomination. Or le lien entre l'INPES et l'InVS sur lequel vous m'interrogez, c'est justement cette dimension de prévention. Nous sommes donc dans une logique totale. S'y ajoutera la particularité de l'EPRUS, c'est-à-dire une capacité opérationnelle en termes de réactivité tout à fait remarquable.
Je n'ai pas abordé les budgets, car vous les connaissez mieux que moi, mais je vais tout de même vous en dire un mot.
Le budget de l'InVS passera de 60 millions d'euros cette année à 54,3 millions en 2015, au titre de la subvention pour charges de service public. Le plafond d'emplois sera de 392 pour 2015, contre 402 cette année. Une optimisation est donc demandée à l'Institut.
L'EPRUS compte peu de personnels : sa réserve s'élève à 1 700 personnes, mais son plafond d'emplois sera ramené de trente-quatre personnes cette année à trente l'année prochaine. Cet établissement bénéficie d'un financement à parité entre l'État et l'assurance maladie, pour un budget d'environ 65 millions d'euros. En 2015, l'État lui versera 16 millions et l'Assurance maladie 22 millions, sachant que le prélèvement sur son fonds de roulement, qui sera ramené à son niveau prudentiel, permettra d'équilibrer le budget de l'établissement.
Quant à l'INPES, où travaillent plus de 130 personnes, son budget s'élève à 70 millions d'euros, un tiers provenant de l'État et deux tiers de l'assurance maladie.
Le futur institut unique aura, bien sûr, un conseil d'administration. Or les actuels conseils d'administration de l'InVS et de l'EPRUS sont fondamentalement différents. Celui de l'InVS compte vingt-trois membres, essentiellement des représentants de l'État, auxquels s'ajoutent des personnalités qualifiées et des représentants des personnels. Celui de l'EPRUS est un conseil paritaire de vingt-cinq membres y compris le président, composé de représentants de l'État et de l'assurance maladie. Il faudra donc prendre en compte ces spécificités lors de la mise en place du futur institut.
J'ajoute que la question de la démocratie sanitaire se posera pour le futur institut, en vertu du projet de loi de santé qui prévoit la représentation des usagers au sein des instances. Par contre, il ne faudra pas oublier que, dans le cadre de l'EPRUS, la confidentialité est requise pour les membres du conseil d'administration, car la préparation à certaines menaces sanitaires de grande ampleur ne peut être rendue publique.
En tout état de cause, ce sera au préfigurateur de l'institut national, M. François Bourdillon, directeur général de l'InVS, de répondre à cet ensemble de questions.
S'agissant de la déclinaison territoriale, je crois savoir que l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) étudie actuellement la question de l'articulation régionale, notamment avec les cellules interrégionales d'épidémiologie de l'InVS. En effet, sur le plan local, les ARS devront être en première ligne, mais il sera également indispensable que les données soient consolidées au niveau national pour permettre une logique d'action à chaque alerte.
Voilà pour le futur institut national.
Revenons maintenant aux deux instituts dont il est question aujourd'hui. La thématique « environnement et santé » fait partie des missions de l'InVS. En effet, l'étude de santé sur l'environnement, la biosurveillance, l'activité physique et la nutrition (ESTEBAN), qu'il réalise actuellement, porte, comme son titre l'indique, sur des aspects très divers. L'InVS est donc totalement engagé dans cette thématique, et le recueil des données sera finalisé dans les prochains mois.
Vous avez posé la question de la consommation des antibiotiques. Lorsque j'ai commencé mes études de médecine, il y a plus de quarante ans, on m'a expliqué que la prescription d'antibiotiques en cas de grippe se justifiait par le risque de surinfection bronchique. Il s'agissait donc d'éviter les complications dues au virus. Aujourd'hui, cette recommandation n'est plus d'actualité, mais le choix doit être laissé au médecin traitant.
Vous avez abordé ensuite la gratuité des vaccins. Il s'agit là d'un sujet très complexe, car le fait que les vaccins ne soient pas tous gratuits laisse penser que certains d'entre eux sont prioritaires par rapport à d'autres, ce qui amène des familles à renoncer à certaines vaccinations non obligatoires, les jugeant moins importantes. Cette question fondamentale a été posée par le Haut Conseil de la santé publique.
Concernant le budget du site de Marolles-Vitry-le-François, je ne dispose pas des chiffres exacts. J'ai retenu que le budget s'élèvera à 33 millions d'euros pour un établissement de 33 000 mètres carrés. Pour l'heure, je ne suis pas capable de vous dire si le budget a été dépassé – je n'ai, en tout cas, pas été alerté par le directeur général.
La remontée des informations est une question fondamentale. Il s'agit de savoir comment une menace naissante peut être identifiée à partir de quelques cas. Cela suppose, comme je l'ai expliqué dans mon propos liminaire sur les objectifs de l'InVS, de disposer d'outils spécifiques en lien avec les données de la recherche pour être capable d'identifier des signaux très faibles dans une population. La remontée d'information en provenance des professionnels de santé est réalisée à partir de cellules, certains médecins étant engagés plus que d'autres dans cette démarche. Bien évidemment, il est indispensable que l'ensemble des professionnels de santé soient davantage associés à l'identification et à la transmission d'informations sur les signaux sanitaires, même de faible intensité. Il faut rappeler que le CDC d'Atlanta a pu identifier le sida aux États-Unis à partir de moins de dix cas, simplement parce que la maladie de Kaposi, qui sévit dramatiquement en Afrique, est survenue étonnamment sur le continent américain chez une population blanche qui n'avait pas eu de lien avec le continent africain.
Parmi les maladies, non pas émergentes, mais dont on parle un peu plus, figure en effet la maladie de Lyme, dont on nous a toujours appris qu'elle était provoquée par les piqûres de tiques. Aujourd'hui, la question est de savoir si cette maladie est en recrudescence ou si elle est mieux identifiée. En la matière, le rôle de l'InVS est de transmettre à la direction générale de la santé (DGS) les données les plus récentes.
Quant aux clusters de maladies rares, celles-ci surviennent parfois de manière regroupée, sans lien génétique démontré, et dans certaines zones géographiques, ce qui justifie une étude approfondie.
L'EPRUS est né à la suite de la crise du chikungunya à La Réunion. Comme je l'ai dit dans mon propos liminaire, l'un des objectifs de l'établissement est de mettre à proximité des populations, y compris en outre-mer, les stocks stratégiques dont elles ont besoin. Cela étant dit, les stocks sont une chose, la veille en est une autre et nous verrons ce qu'il en est avec M. Bourdillon.
Enfin, les urgences psychologiques ou psychiatriques font bien partie des missions de l'InVS. En effet, les thématiques abordées dans les plans de santé publique concernent aussi bien le suicide et les pathologies psychosociales, que les maladies neurodégénératives notamment.