Intervention de Pierre Bellanger

Réunion du 18 décembre 2014 à 8h00
Commission de réflexion sur le droit et les libertés à l’âge du numérique

Pierre Bellanger, président-directeur-général du groupe Skyrock :

Le contrôle des données par les utilisateurs m'apparaît comme un subterfuge destiné à masquer un siphonnage global de nos données. Dans le domaine du numérique, l'absence de normes publiques tend à laisser reposer sur l'acceptation individuelle certaines décisions extrêmement graves. Tout se passe comme si un automobiliste pouvait choisir un modèle de voiture avec ou sans ceinture de sécurité.

L'individu dispose en réalité d'un faux pouvoir sur ses données dont l'auto-détermination informationnelle, vers laquelle le Conseil d'État s'est orienté, n'est que le prolongement. Dans le domaine numérique, il faudrait à l'utilisateur un mois et demi pour lire toutes les clauses d'acceptation des contrats auxquels il est lié, contrats, qui, soit dit en passant, dépendent pour leur grande majorité du tribunal de Sacramento. Il se doit d'être un expert du droit de la consommation et du droit d'Internet doublé d'un ingénieur informaticien. Un médicament, un produit alimentaire, une margelle de piscine sont soumis à une somme impressionnante de normes quand, dans le domaine numérique, l'accès à un service ou un produit n'est soumis qu'à une clause d'acceptation.

En outre, j'aimerais savoir de quels moyens de contrôle dispose un internaute pour savoir si sa demande de suppression de données a bel et bien été effectuée car, en réalité, tout dépend de manoeuvres menées depuis un territoire qui ne dépend pas de notre souveraineté.

Il importe de sortir de cette mascarade par le haut en imposant une protection de l'intérêt général par le droit. Les citoyens français ne sont pas des super-héros ninjas capables de se protéger contre des sociétés disposant de bataillons d'influenceurs et de lobbyistes et imposant des contrats qui ne dépendent pas de nos tribunaux ; ce sont simplement des gens pressés. En n'assurant pas la défense des utilisateurs face au siphonnage de leurs données personnelles, les pouvoirs publics se rendent coupables de non-assistance à personne en danger.

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