S'agissant de la difficulté à rétablir des structures administratives dans un pays en post-crise comme la Centrafrique, je ne peux que partager votre constat. Une telle tâche n'est pas directement à la portée de l'Agence. Et l'on imagine mal revenir à une situation où des coopérants techniques prendraient en main l'ensemble des manettes d'un État défaillant ! L'effet boomerang que vous évoquiez au sujet des interventions militaires, monsieur Bacquet, ne risquerait-il pas de s'étendre alors à la coopération civile ? Très sincèrement, j'ignore jusqu'à quel point on peut envisager de remettre une administration sur pieds via une forme de coopération résidentielle de substitution.
Ce que je puis affirmer, en revanche, dans les secteurs où nous intervenons, c'est que nous essayons de travailler non seulement avec les ONG mais aussi avec les administrations. C'est un des principes d'intervention de l'AFD tels que définis par le Gouvernement : travailler à reconstituer la légitimité des États. Au Mali, par exemple, notre objectif est également de renforcer la légitimité des acteurs publics, qu'ils soient nationaux ou locaux. On ne peut se contenter de réaliser des actions à leur place ou de les faire réaliser par des ONG : ce serait manquer la cible ! Si nos programmes sont parfois difficiles à mettre en oeuvre, c'est justement parce qu'ils ne font pas l'impasse sur les acteurs publics et essaient de les impliquer dans la reconstruction des États.
Nous pourrons revenir plus longuement sur la question de l'énergie si nous consacrons une réunion spécifique à l'action en matière de climat. Il y a bien sûr des orientations importantes à faire avancer, en particulier en Afrique où le mix énergétique est déjà composé à 50 % d'énergies renouvelables alors que la moyenne mondiale n'est que de 20 %. Il existe un fort potentiel de production d'énergies « propres ». Certaines sont déjà rentables et nous participons à leur financement : géothermie, éolien, centrales photovoltaïques assorties de moyens de stockage de l'électricité… Mais il faut faire plus. On sait à quelles distorsions sont soumis les prix de l'énergie qui, en particulier, ne reflètent pas le vrai prix des énergies fossiles. En conséquence, il me paraît justifié d'apporter de la subvention ou de la bonification pour corriger cette myopie, d'autant que le sujet, en Afrique, est l'augmentation de la capacité énergétique et pas seulement le « verdissement » du mix. Beaucoup d'initiatives très intéressantes sont prises dans ce domaine, au profit desquelles nous pourrions mobiliser davantage les fonds européens dans le cadre général de l'initiative « Une énergie renouvelable pour tous » des Nations unies.
En matière d'énergie, il conviendrait que l'Afrique fasse comme pour la téléphonie, où elle a sauté l'étape du réseau filaire pour aller directement à la technologie d'avenir. L'adoption d'énergies durables la mettra à l'abri de la variation des prix des énergies fossiles, qui ne cesseront d'augmenter à moyen et à long terme.
Je répondrai par écrit à M. Mariani sur l'action de l'AFD dans la zone Asie-Pacifique. Nos financements s'y élèvent à 1 milliard d'euros. Certes, nous y mobilisons très peu de dons, ce qui explique peut-être l'emploi de l'expression « portion congrue ». La plupart des pays sont soit à revenus intermédiaires, soit à revenus intermédiaires supérieurs, et nous y intervenons avec des prêts peu ou pas bonifiés.