Oui, car cela marche. Il faut informer les jeunes sur les mesures incitatives, mais pour ce faire, il faut vraiment mouiller la chemise. Dans ma région, de jeunes internes viennent faire des gardes pendant le week-end pour découvrir l'exercice en Lozère. Des contrats sont passés avec des étudiants, avec des internes en troisième cycle d'études médicales. Le conseil général de la Lozère est allé jusqu'à organiser des week-ends de découverte du département, ouverts aux étudiants en médecine de deuxième et troisième cycles : une trentaine d'étudiants de la faculté de médecine de Montpellier sont ainsi venus, on leur a fait découvrir le département du point de vue touristique, on leur a fait faire du rafting ; bref, on a tout fait pour leur vendre l'exercice en Lozère. Parallèlement, les collectivités locales ont participé au financement de maisons de santé pluri-professionnelles. Bref, toute une action d'accompagnement a ainsi été engagée, proprement extraordinaire. Résultat des courses : le nombre d'étudiants qui envisage de s'installer d'ici deux à trois ans dans le département représente l'équivalent de 10 % de sa population de médecins généralistes. Aucun département de France n'atteint un tel taux : la moyenne se situe généralement en dessous de 5 %, sachant que la durée moyenne de vie professionnelle d'un médecin est de l'ordre de vingt-cinq ans. Il faut donc multiplier et accompagner les mesures incitatives, et en informer les jeunes.
Les mesures d'accompagnement, ce sont aussi les maisons de santé pluri-professionnelles, qui favorisent le travail en équipe. C'est ce que veulent les jeunes générations. Ce sont aussi les contrats territoriaux de médecine ambulatoire, les praticiens territoriaux de médecine générale (PTMG) devenant, avec la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, les praticiens territoriaux de médecine ambulatoire. Ces mécanismes incitatifs vont dans le bon sens et nous y sommes favorables. Mais si l'on ne veut pas en faire des mécanismes désincitatifs, il ne faut pas créer de nouvelles obligations pour le praticien territorial de médecine ambulatoire. Comprenons-nous bien : je ne veux pas favoriser l'installation de praticiens de secteur 2 ; je ne veux pas non plus que les praticiens qui s'installent dans le cadre de ces contrats ne fassent pas de prévention ou ne participent pas à la permanence des soins. Mais si vous voulez attirer les jeunes, encore faut-il que la mariée soit belle ! On n'attire pas les mouches avec du vinaigre… Il faut tenir compte de tous ces éléments, plus encore dans les DOM.
D'autant que, pour l'outre-mer, la distance représente une difficulté supplémentaire, qu'il s'agisse du prix du voyage-découverte ou des impacts familiaux. N'oublions pas que le médecin de demain sera majoritairement une femme, ce qui veut dire que l'approche du métier est un peu différente. Au demeurant, cela vaut aussi pour les hommes : les jeunes générations entendent désormais concilier vie personnelle et vie professionnelle. C'est un fait, une donnée sociétale. Que cela plaise ou non, il faut faire avec. Cela veut dire que, dès demain, les temps et les organisations de travail ne seront pas les mêmes et qu'il faudra s'y adapter. Et de ce point de vue, envisager de s'installer dans les DOM n'est pas si simple ; se pose le problème du conjoint, qui n'est pas aisé à gérer quand on sait les difficultés d'emploi outre-mer.