Intervention de Manuel Valls

Séance en hémicycle du 13 janvier 2015 à 15h00
Hommage aux victimes des attentats

Manuel Valls, Premier ministre :

La République n’est pas possible sans l’école, et l’école n’est pas possible sans la République. Nous avons laissé passer trop de choses – je le disais il y a un instant – dans l’école. La laïcité, c’est la possibilité de croire ou de ne pas croire : face à l’attaque que nous avons connue, la France doit plus que jamais combattre pour l’éducation à ces valeurs fondamentales. C’est un autre aspect de notre réponse à ces attentats. Arborons fièrement ce principe, puisqu’on nous attaque à cause de la laïcité, à cause des lois que nous avons votées interdisant les signes religieux à l’école, et prohibant le port du voile intégral. Revendiquons ces lois, car elles doivent nous aider à devenir plus forts encore !

3 commentaires :

Le 14/01/2015 à 10:15, laïc a dit :

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"puisqu’on nous attaque à cause de la laïcité, à cause des lois que nous avons votées interdisant les signes religieux à l’école"

Effectivement, l'atteinte aux signes religieux dans les écoles est une atteinte à la laïcité, dans la mesure où la laïcité s'opère sans distinction de religion : ici l'obligation de scolarité doit être effective sans distinction de religion, et actuellement l'obligation de scolarité est faite avec distinction de religion, puisque ceux dont la religion est visible sont exclus, ce qui est une discrimination religieuse attentatoire à la laïcité et à la neutralité religieuse qui ne tient pas en compte la visibilité religieuse passive sur les élèves (tandis que sur les murs de l'école c'est différent, puisque les murs appartiennent à l'Etat, tandis que l'élève n'appartient pas à l'Etat, il y a un minimum de respect de l'individu à avoir, le citoyen n'est pas un objet propriété de l'Etat). C'est la revendication active qui doit être censurée, pas l'apparence physique passive.

Maintenant, autre problème : le voile est-il religieux, ou est-il politique ? La circulaire Jean Zay de 1931 interdit la propagande politique dans les écoles, mais là encore un signe politique n'est pas nécessairement un message de propagande politique, sauf si le parti politique mis en exergue est interdit. Ainsi un élève arborant une croix gammée se verrait exclu. Si maintenant il y a amalgame entre fille voilée et terrorisme, entre islam et terrorisme, le voile est condamnable et doit être banni, mais si la musulmane voilée condamne fermement les actes terroristes, Daech, Al Qaïda et tout le reste, et la charia en prime, le voile reste religieux et il ne peut être exclu. Donc le problème est le suivant : si le voile est religieux, il ne saurait être interdit, si le voile est politique, il doit être interdit.

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Le 14/01/2015 à 12:18, laïc a dit :

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"La laïcité, c’est la possibilité de croire ou de ne pas croire "

Si l'élève croyant croit que la Terre a été faite en 6 jours, et qu'en sciences naturelles on lui dit tout autre chose, c'en est fini de sa possibilité de croire. Car l'enseignement n'est pas optionnel, si l'élève ne dit pas le contraire de sa croyance en interrogation écrite, il aura zéro. Donc la liberté de croire à l'école reste très théorique, et est en fait inapplicable sérieusement.

Par ailleurs, suite à l'attentat contre Charlie Hebdo, certains écoliers ont eu droit à un cours là dessus, et il était dit et écrit que Mahomet était le prophète de Dieu auprès des musulmans. Or, rien ne prouvant scientifiquement l'existence de Dieu, cette approche directe s'apparentait à une forme de prosélytisme. Pas d'explication sur le mot "Dieu", idée acceptée par l'école laïque comme une réalité intangible, alors que le but de l'école laïque est de protéger la liberté de conscience, et donc de soumettre l'idée de Dieu à questionnement, et non pas d'en faire officiellement une donnée acceptée sans questionnement. Il y a eu là manquement à la laïcité, et j'espère que cela ne se reproduira pas dans les écoles de la République.

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Le 06/10/2015 à 11:31, laïc a dit :

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Pour reprendre mon commentaire avec la circulaire Jean Zay : d'abord il y en a 3, faites en 1936, et l'une d'elles interdit tout signe politique sur les élèves, même les signes politiques de partis autorisés, du moins cette circulaire recommande d'interdire tout signe politique, car les juristes savent que les circulaires n'ont pas un caractère prohibitif strict, et que ce sont juste des conseils donnés aux fonctionnaires publics. ("Le Conseil d’État a fixé, comme nouveau critère de recevabilité pour les recours contre les circulaires, le caractère impératif. Ainsi, toute circulaire dotée de dispositions à caractère impératif est désormais attaquable.").

Ensuite, pour ce qui est du "sans distinction", on peut remarquer la symétrie, mais inversée dans son traitement, entre le signe religieux à l'école et le double menu à l'école.

1 - L'obligation de scolarité, et l'inscription à l'école qui en découle, doivent être faites sans distinction de religion, donc l'inscription à l'école doit être faite sans considérer la religion de l'enfant, que cette religion soit visible ou invisible, sinon cela reviendrait à la distinguer au moment de l'inscription, puis ensuite au cours de l'année scolaire.

2 - L'inscription à la cantine scolaire doit également être faite sans distinction de religion, et donc sans demander la religion de l'enfant, ses habitudes religieuses, etc.., sinon cela reviendrait à distinguer la religion de l'enfant, ce qui est inconstitutionnel et attaquable en justice.

Ainsi, aussi bien dans le 1 que le 2, la religion de l'enfant est distinguée, mais pour des buts inverses : dans le 1 -, ce sera pour interdire un élément de la pratique du culte, qui est un élément visible de cette religion, (le voile), et dans le 2 -, ce sera pour mettre en évidence et favoriser un élément de la pratique du culte, à savoir le refus de consommer du cochon.

Donc, l'Etat prouve à la fois sa cohérence et son incohérence dans ses deux affaires.

S'il est cohérent, c'est dans son refus initial d'appliquer le "sans distinction" aux religions, "sans distinction" qui est un principe constitutionnel : que ce soit pour le voile islamique ou pour le double menu, la religion de l'enfant est prise en compte, elle est distinguée, ce qui est inconstitutionnel.

Mais l'incohérence est dans le but final recherché, puisque dans le 1 -, ce sera pour interdire le voile, et dans le 2 - , ce sera pour autoriser délibérément la pratique cultuelle dans l'enceinte d'un établissement public.

Ainsi, il y a bien incohérence dans la finalité, mais cohérence dans l'illégalité initiale qui a conduit à ces deux traitements particuliers de la pratique religieuse.

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