Intervention de Paul Molac

Séance en hémicycle du 14 janvier 2015 à 21h30
Débat sur la politique maritime de la france

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Molac :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je l’avais déjà dit à votre prédécesseur : nous aurions tellement aimé que vous fussiez un ministre de la mer de plein exercice : ce serait reconnaître au monde maritime toute l’importance qu’il mérite.

Concernant la politique maritime de la France, je tiens premièrement à attirer votre attention sur les conflits d’usage auxquels donnent lieu le milieu maritime et le littoral. En effet, les eaux marines côtières et la frange littorale sont actuellement concernées par nombre d’enjeux, et cela génère d’ores et déjà des conflits d’usages importants entre pêche, production d’énergie, tourisme, réserves naturelles ou urbanisme. Certaines démarches, comme la gestion intégrée des zones côtières ou le schéma de mise en valeur de la mer, ont permis, pour certains secteurs littoraux et maritimes, de confronter les besoins et les attentes des différents acteurs des territoires concernés, afin d’organiser les usages en fonction des besoins et des enjeux environnementaux.

Néanmoins, l’insuffisance de certains résultats laissent à penser qu’il est nécessaire d’améliorer ces démarches, notamment sur le plan de la gouvernance. Cette question est d’autant plus importante que certains usages maritimes et littoraux seront amenés à évoluer rapidement. Permettre l’exploitation des ressources naturelles pour favoriser le développement économique tout en préservant un fonctionnement global de qualité favorisant les services écosystémiques marins et littoraux, voilà un des points clés du développement des usages marins.

Deuxièmement, il convient de remédier à la trop forte concentration du transport maritime en France. Aujourd’hui, les ports moyens sont délaissés du fait de l’accroissement constant du tonnage des navires de transport. Les ports sont contraints de s’adapter au gigantisme de ces nouveaux monstres des mers, et Marseille et Le Havre captent l’essentiel du soutien de l’État dans ce domaine. Il s’agit donc d’avoir une politique maritime volontariste, visant à développer nos infrastructures portuaires de taille plus modeste. Nous pensons d’ailleurs que les compétences des conseils régionaux devraient là encore être étendues, afin qu’ils aient la charge de tous les ports de commerce et la capacité de mener une politique maritime régionale.

Pour rééquilibrer la politique maritime, il convient d’explorer des solutions telles que le feedering, processus de collecte et de distribution des conteneurs dans les nombreux ports secondaires, et le cabotage par une meilleure intégration des chargeurs routiers, notamment agroalimentaires, dans la chaîne logistique.

Par ailleurs, nous nous félicitons que le Gouvernement ait enfin pris la pleine mesure du potentiel de développement des énergies marines renouvelables, les EMR, comme le montrent notamment le lancement d’appels à projets et la création du Comité national des énergies renouvelables en mer. Pour l’hydrolien, un dispositif de soutien aux premiers projets pré-commerciaux a été lancé.

En ce qui concerne la simplification des procédures, plusieurs mesures sont en train d’être mises en place : l’introduction d’un permis unique regroupant les différentes autorisations pour les énergies marines ; la facilitation des raccordements en zone littorale, ou encore la préparation d’un décret simplifiant et raccourcissant les procédures de recours contentieux.

De même, le Breton que je suis salue la confirmation du transfert du siège de l’IFREMER à un grand port maritime occidental, celui de Brest, comme cela était prévu par le Pacte d’avenir pour la Bretagne.

Enfin, nous avons, avec le navigateur Jo Le Guen, attiré l’attention des ministères concernés et du secrétariat général de la mer sur l’opportunité de créer au sein du Fonds international d’indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, le FIPOL, un groupe de travail chargé de réfléchir aux modalités d’indemnisation du préjudice écologique.

Un projet de loi serait d’ores et déjà rédigé par la chancellerie et une proposition de loi vient d’être adoptée en première lecture au Sénat visant à la reconnaissance par le code civil la notion de préjudice écologique. Au-delà de cette reconnaissance au niveau national, nous estimons que la France, dont l’histoire a été jalonnée par les marées noires, a un rôle déterminant à jouer au sein d’une organisation internationale telle que le FIPOL pour faire reconnaître ce préjudice par l’industrie pétrolière et la nécessité de son indemnisation. Il convient de rappeler que, lorsque la délégation française au FIPOL avait soulevé la question de la réparation du préjudice écologique à la suite de la catastrophe de l’Erika, l’insuffisance des fonds disponibles pour indemniser ce nouveau type de dommage avait été immédiatement invoquée pour écarter sa proposition. Or la création en 2005 du FIPOL complémentaire, doté d’environ 850 millions d’euros, rend désormais possible une telle indemnisation. Pour contourner la difficulté persistante de l’évaluation du coût financier du préjudice écologique, on pourrait imaginer qu’il verse à ce titre 10 % des sommes qu’il aura consacrées à l’indemnisation des victimes d’une marée noire.

Pour cela, il est nécessaire que les États membres du FIPOL complémentaire expriment clairement la volonté politique de cet établissement d’instituer en son sein un tel groupe de travail, comme les statuts de la convention l’y autorisent. Monsieur le secrétaire d’État, nous vous prions donc de donner mandat au représentant de la délégation français pour demander la création de ce groupe de travail.

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