Dans cette affaire, où 40 milliards d'euros sont en jeu, il importe de ne pas se précipiter et d'éviter toute improvisation qui pourrait, demain, se traduire par des contentieux coûtant fort cher au contribuable – et que ceux-là même qui nous pressent d'agir ne manqueraient pas de nous reprocher. Évitons les oukases et les échéances précipitées. Le Premier ministre a souhaité que nous précisions nos propres préconisations, qui consistent à envisager une résiliation des contrats à la date de leur échéance, c'est-à-dire chaque année au mois de décembre. Cela me paraît sage, et M. Jean-Paul Chanteguet – à qui je tiens ici à rendre hommage – veillera scrupuleusement à ce que l'intérêt général soit préservé en particulier sur deux points essentiels : la maîtrise des tarifs et le partage de la rente lorsque celle-ci s'avère excessive.
Nous ne sommes pas responsables de la situation actuelle, héritage d'une personnalité tout à fait respectable, mais plus brillante à l'ONU que dans le domaine des contrats de concession… Nous avons face à nous des sociétés puissantes et organisées, mais nous sommes dans un État de droit, qui nous protège tous et dans lequel on ne peut rompre un contrat de façon unilatérale. Reste qu'il nous faut entièrement revoir l'architecture des concessions longues : même si elles n'ont pas toujours été mal négociées à l'origine, il s'est produit beaucoup de choses depuis et l'on ne saurait s'en tenir à des règles du jeu qui remontent à cinquante, voire soixante-dix ans. Cela pose du reste la question du bien-fondé même du véhicule juridique de la concession : si c'est pour dix ans, cela peut convenir, mais si c'est pour quarante ans, cela peut devenir usuraire. Un travail de fond s'impose.