Je suis membre du collège, sage-femme à l'hôpital Delafontaine de Saint-Denis à mi-temps et sage-femme dans une maison de santé pluridisciplinaire au Pré-Saint-Gervais dans le département de Seine-Saint-Denis. Je veux remercier les intervenants pour leur engagement dans l'accompagnement vers l'accès des jeunes femmes à l'IVG. J'ai entendu parler d'anesthésie locale et d'autres méthodes que l'IVG médicamenteuse, pourquoi ne pas englober l'ensemble des pratiques sous le nom d'IVG ambulatoire afin de ne pas restreindre le choix de la femme souhaitant recourir à l'IVG ?
Je prends l'exemple d'une patiente. Elle est étudiante à Sciences Po, elle a vingt-quatre ans et vient dans une maison de santé pluriprofessionnelle pour y rencontrer son médecin traitant au sujet d'un petit rhume. Elle fait état de trois IVG ; le réflexe du médecin est de l'envoyer voir la sage-femme qui se trouve au bout du couloir. L'entretien laisse apparaître chez la jeune femme une méconnaissance de la contraception mais aussi des angoisses et des incertitudes quant à ses désirs propres et sa construction sexuelle ainsi que son autonomie de femme. Cette histoire est révélatrice de la société d'aujourd'hui. Le recours à l'interruption volontaire de grossesse stagne depuis 2006 malgré une augmentation constante de la couverture contraceptive : 222 000 IVG par an ont été pratiquées en France dont 27 pour 1 000 chez les femmes de vingt à vingt-quatre ans. De plus, le recours à l'IVG concerne plus fréquemment les femmes âgées de moins de vingt-cinq ans ou mineures avec 13 500 IVG en 2009.
On observe un réel problème lié à l'observance des moyens de contraception puisque 75 % des femmes déclarent y avoir recours mais les échecs demeurent fréquents ; sans compter qu'une femme sur dix utilise un moyen de contraception naturel, ce chiffre date de 2014. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), 23 % des filles françaises âgées de quinze ans ont déjà connu un rapport sexuel et seulement 41 % des adolescents utilisent un préservatif lors de leur premier rapport sexuel. Ses chiffres sont consternants, et nous interrogent. Que faisons-nous ? Donnons-nous les bonnes informations à ces jeunes filles ? Connaissent-elles vraiment les moyens de contraception ? À ce sujet, je partage l'avis des infirmières scolaires : elles devraient être plus nombreuses afin que ces jeunes femmes puissent être autonomes.
Notre stratégie de prévention doit donc être repensée puisque le taux d'IVG demeure constant malgré les dispositifs mis en place. Nous proposons donc une consultation gynécologique personnalisée pour l'information des jeunes filles dès l'âge de quinze ans. Il s'agit de les amener à la conscience de leur santé sexuelle. Ce dernier concept, défini par l'OMS, est proche de celui de santé reproductive. Il s'agit de la capacité à contrôler le comportement sexuel et reproductif en accord avec l'éthique personnelle et sociale et d'une délivrance de la peur, la honte et la culpabilisation, des fausses croyances et de tout autre facteur psychologique susceptible d'inhiber ou d'interférer sur les relations sexuelles. La santé reproductive, de son côté, nécessite une absence de troubles, de dysfonctions organiques, de maladies ou d'insuffisances susceptibles d'interférer avec la fonction sexuelle et reproductive.
Si la notion de santé sexuelle était incluse dans nos stratégies de prévention, on donnerait plus d'autonomie aux individus et cela limiterait les violences faites aux femmes. Il s'agit de faire de la sexualité quelque chose de positif, un sujet sans tabou dont on peut parler avec des professionnels aguerris comme les médecins, les infirmières scolaires et les sages-femmes. Il faut ensuite améliorer la connaissance de la contraception qui est encore aujourd'hui balbutiante. Les jeunes femmes doivent pouvoir bénéficier d'une consultation en dehors de toute contrainte familiale ou pécuniaire, c'est pourquoi nous demandons la prise en charge à 100 % à l'instar du bilan bucco-dentaire effectué chez les adolescents.