Intervention de Michel Sapin

Réunion du 30 octobre 2012 à 9h30
Commission des affaires sociales

Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social :

Dans le contexte très difficile que nous connaissons, la question du chômage est prégnante pour la conception et la mise en oeuvre du projet de budget qui vous est soumis.

Celui-ci a d'abord pour objet de financer les premières mesures que le Gouvernement a décidé de prendre.

Il fait également preuve du sérieux budgétaire qui s'impose. Un bon budget n'est pas forcément un budget qui augmente : le fait que celui de la mission « Travail et emploi » soit l'un des seuls à le faire – dans une proportion de 4 % – ne se justifie que par l'augmentation des chiffres du chômage et je souhaiterais, à ce titre, le voir un jour diminuer. Nous participons, du reste, au nécessaire effort de maîtrise du déficit et de l'endettement, notamment en matière de personnel.

Certains outils de lutte contre le chômage, pour lesquels le Gouvernement et le Parlement n'ont pas encore pris de décisions, ne figurent pas encore dans ce projet de budget. C'est notamment le cas du contrat de génération, qui a d'abord fait l'objet d'une négociation, puis d'un débat sur le projet de loi qui vous sera soumis à cet effet, et dont la traduction budgétaire ne relève d'ailleurs pas nécessairement d'un projet de loi de finances. De même, la sécurisation de l'emploi, actuellement soumise à une négociation difficile, pourra se traduire notamment par une meilleure mobilisation du chômage partiel – ou, plus justement, de l'« activité partielle » – ou des droits à la formation.

J'en viens aux grandes priorités qu'exprime ce projet de budget.

La première est la mise en oeuvre des politiques de contrats aidés et d'emplois d'avenir à un niveau suffisant pour avoir un effet sur le chômage et l'avenir des jeunes concernés.

Le Gouvernement souhaite que les contrats aidés soient aussi nombreux l'année prochaine que dans la loi de finances pour 2012. Les moyens prévus permettront de financer les 340 000 contrats non marchands et 50 000 contrats marchands ou contrats initiative-emploi (CIE) que nous entendons mettre en oeuvre. Nous souhaitons aussi que ces crédits puissent être utilisés tout au long de l'année – et non pas seulement en début d'année, comme cela a été le cas cette année. Il faut également veiller à la qualité et à la durée de ces contrats. En effet, une période de six mois est souvent trop courte pour permettre l'insertion dans l'emploi et la durée souhaitable semble être de l'ordre de neuf mois, voire davantage pour certains des publics concernés.

S'agissant des emplois d'avenir, les crédits nécessaires ont donc été inscrits, tant en autorisations d'engagement, avec 2,320 milliards d'euros, qu'en crédits de paiement, avec 466 millions d'euros, dont 30 millions d'euros prévus pour l'accompagnement, notamment à l'intention des missions locales, ce qui devrait permettre une montée en puissance au cours de l'année prochaine. Il ne s'agit pas tant, je le rappelle, de garantir à chacun un certain quota que d'atteindre l'objectif de 100 000 emplois d'avenir l'année prochaine. Les publics visés sont en effet très délicats et il nous faut veiller à la qualité du contenu de ces emplois, qui doivent permettre l'insertion en prévoyant un accompagnement et une formation obligatoires de ces jeunes. La tâche est difficile et exigeante pour les employeurs potentiels, mais elle est nécessaire.

La deuxième grande préoccupation qu'exprime ce budget est la consolidation du service public de l'emploi, en renforçant notamment les moyens de Pôle emploi. Nous avons autorisé la création de 2 000 emplois supplémentaires sur des contrats à durée indéterminée. Les embauches sont en cours et seront pleinement réalisées au cours de l'année prochaine. Elles s'accompagnent des crédits supplémentaires correspondants. Ces embauches sont nécessaires pour faire face à l'accroissement du nombre des chômeurs et pour mieux les suivre, avec un accompagnement personnalisé de chacun d'entre eux dans chaque agence de Pôle emploi.

Les crédits des missions locales sont maintenus, et même augmentés des 30 millions d'euros que j'ai déjà évoqués au titre des emplois d'avenir. Les missions locales interviendront en effet pour le repérage des jeunes concernés et pour leur accompagnement, y compris chez les employeurs.

Nous maintenons également les crédits des maisons de l'emploi, réduits au cours des années précédentes, et les accompagnements financiers des demandeurs d'emploi en formation.

En troisième lieu, nous poursuivons – et amplifions parfois – le soutien aux personnes handicapées. Ce budget prévoit, en effet, l'accroissement des aides aux postes dans les entreprises adaptées, avec notamment la création de 1 000 places supplémentaires en 2013 pour les travailleurs handicapés. Comme j'ai pu le constater récemment en visitant une entreprise adaptée, ces postes permettent de faire travailler des personnes handicapées dans de bonnes conditions et dans un contexte normal, soumis aux contraintes de l'équilibre économique.

Nous reconduisons aussi les crédits destinés à l'insertion par l'activité économique, gelés depuis plusieurs années. Je comprends la revendication qui s'exprime pour que soit maintenu au moins le pouvoir de paiement de ces aides mais, compte tenu de la très grande complexité de ce domaine, l'Inspection générale des finances (IGF) et l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) ont été chargées conjointement de présenter rapidement un rapport permettant de refonder l'ensemble de ce dispositif. Les décisions en la matière devront être prises avec le Parlement. Aucune augmentation n'est donc prévue actuellement, mais il se peut qu'il faille y procéder au terme de ce processus.

Dans un contexte budgétaire contraint, l'allocation liée au contrat d'insertion dans la vie sociale (CIVIS) est également préservée, ainsi que les crédits destinés aux écoles de la deuxième chance, dont nous apprécions beaucoup le travail sur le terrain, et les capacités d'intervention du Fonds d'insertion professionnelle des jeunes (FIPJ).

Le quatrième axe du projet de budget qui vous est présenté consiste à accompagner – et, lorsque c'est possible, à anticiper – les restructurations industrielles et les mutations économiques. Il s'agit là de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), pour laquelle 60 millions de crédits budgétaires sont inscrits. Quant à savoir si ces crédits suffisent, nous verrons avec vous ce qu'il est possible de faire.

L'activité partielle se voit allouer 70 millions d'euros de crédits budgétaires. Je souligne à cet égard que les crédits inscrits à ce titre dans les budgets initiaux ne sont pas consommés, car ce dispositif est complexe et perçu comme trop aléatoire par les entreprises, qui doivent procéder à une avance. Un décret simplifiera prochainement le dispositif et j'espère que ces crédits pourront être effectivement utilisés. De fait, l'activité partielle signifie qu'il y a maintien dans l'emploi et maintien du lien avec l'entreprise, ce qui facilite le retour à l'emploi.

Quant au contrat de sécurisation professionnelle, il est pérennisé, avec des crédits prévisionnels d'un montant de 70 millions d'euros.

Le cinquième axe est le financement de l'adaptation des qualifications et la reconnaissance des compétences, la formation professionnelle et l'alternance. Les compensations d'exonérations de charges associées aux contrats d'apprentissage sont bien entendu financées.

La dotation globale de décentralisation est, en l'état actuel des choses et dans l'attente du projet à venir sur cette question, la contrepartie de la décentralisation. Ses crédits, d'un montant de 1,702 milliard d'euros, sont stables par rapport à 2011. Des réaffectations permettront de parvenir à cette somme sans ponctionner autoritairement le fonds paritaire, comme cela a pu être fait précédemment.

L'État finance également les savoirs de base. Quant à l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), elle se voit dotée de 87 millions d'euros de crédits. Si nécessaire, compte tenu de sa situation extrêmement délicate, d'autres crédits pourraient être inscrits d'ici à la fin de l'année, au titre de l'année 2012, dans le cadre d'une loi de finances rectificative.

Je tiens enfin à souligner les efforts que s'impose mon ministère pour contribuer à la maîtrise et à la diminution du déficit du budget de l'État. Tandis que la masse salariale et les emplois n'augmentent pas, 141 suppressions de postes permettent la création de postes dans les secteurs prioritaires que sont l'éducation, la justice et la police. Nous demanderons que l'effort pèse davantage sur l'administration centrale que sur les administrations déconcentrées, car d'importants efforts ont déjà été faits sur les territoires au cours des dernières années, rendant parfois très difficile le travail de nos services. Je compterai les postes un à un pour m'assurer du respect de cette directive.

Les dépenses de fonctionnement diminuent de 5,4 millions d'euros, soit 3,7 %, par rapport à la loi de finances pour 2012. Ainsi, le dispositif des contrats d'autonomie, dont on déplore unanimement le coût très élevé pour une efficacité très faible, et dont l'action sera avantageusement suppléée par le dispositif des emplois d'avenir, ne sera pas reconduit.

Ce budget se caractérise donc, pour résumer, par le financement de nos grandes priorités, par la continuité – voire l'amplification – des actions qui le justifient et par une contribution au nécessaire effort de sérieux budgétaire et de maîtrise des déficits.

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