Après avoir écouté attentivement tous les orateurs, je remarque que le seul argument utilisé pour défendre la postulation a été – malgré le grand nombre de professionnels du droit présents dans la salle – l'aménagement du territoire, et ses enjeux réels ou supposés. Personne n'a défendu son intérêt pour les citoyens, les clients ou la bonne administration de la justice : on ne parle que des recettes qui devraient rester sur tel ou tel territoire. L'argumentation des adversaires de cette réforme apparaît donc assez faible.
Chaque fois que nous nous apprêtons à réformer au service des citoyens, on nous annonce la désertification et l'apocalypse. N'agitons pas les peurs dans le seul dessein d'éviter tout changement. Il y a de plus quelque chose de cocasse à vouloir faire porter à ce projet de loi les péchés de la loi Dati ; et il n'y aura pas, cela a été dit, de loi « Dati bis ».
Je voudrais souligner que quatorze des vingt recommandations formulées par la mission d'information emmenée par Cécile Untermaier ont été intégrées à ce projet de loi, et que deux autres le seront sans doute si nos amendements sont adoptés : peu de rapports parlementaires sont aussi bien traités – j'en connais qui ne servent même pas à caler une armoire !
Imaginons que des citoyens désintéressés nous aient écoutés : ils se sont sans doute interrogés sur ce qu'était vraiment la postulation. Disons-leur que ce qui compte vraiment aujourd'hui, c'est la montée en puissance du RPVA, c'est-à-dire que l'on peut aujourd'hui transmettre beaucoup plus facilement des pièces d'un tribunal à l'autre. Cette réforme ne diminuera pas le nombre des avocats, comme plusieurs bâtonniers l'ont confirmé à Cécile Untermaier. Certains protestent parce que leur audition aurait eu lieu entre Noël et le Jour de l'An ! Mais elle a eu lieu la semaine dernière et était ouverte à tous, et Gilles Lurton y a d'ailleurs participé. Que ceux qui n'y étaient pas ne viennent pas se plaindre !
L'extension de la postulation au niveau du ressort de la cour d'appel est un moyen terme entre le projet originel de suppression de la territorialité de la postulation à l'échelle nationale – qui avait la faveur du barreau de Paris – et le statu quo. Le RPVA aura ainsi le temps de devenir pleinement opérationnel. La qualité de la justice ne se dégradera pas et les avocats pourront continuer d'avoir recours à des correspondants. Mais le tarif réglementé de la postulation est supprimé : les éventuels frais supplémentaires devront être facturés de façon transparente.
C'est donc une avancée économique pour le citoyen, sans dégradation de l'accès à la justice, sans risque d'appauvrissement numérique des barreaux. Elle permettra aussi une plus grande transparence. N'affaiblissons pas la portée de cet article.