Intervention de Julien Aubert

Réunion du 15 janvier 2015 à 9h45
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour la croissance et l'activité

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulien Aubert :

Je vous laisse la responsabilité de vos propos sur la modernité. Qui aurait pu croire qu'un gouvernement socialiste nous expliquerait un jour que la mise en concurrence, la libéralisation, et « l'ultralibéralisme sauvage » dont on nous a rebattu les oreilles, sont du côté de la modernité ? C'est le monde à l'envers. Il faut enregistrer ces paroles historiques !

Nous avons des appréhensions parce que nous avons connu certaines expériences malheureuses. L'opposition a déjà eu l'occasion de dénoncer les dégâts économiques que pourraient causer certains textes et de s'entendre répondre que ses craintes n'étaient pas légitimes : au final, les réformes en question ont souvent failli s'écraser sur le mur de la réalité – je pense par exemple à la loi ALUR.

En termes économiques, vous proposez de mettre en concurrence des acteurs qui ne peuvent pas créer de nouveaux services, contrairement à ce qui se produit dans le secteur marchand, et qui ne pourront agir que sur les coûts. Dans ce cadre, je doute sincèrement que les « petits » puissent gagner face aux « gros » comme vous le laissez entendre. Inévitablement les acteurs les moins performants devront, soit baisser leurs marges, soit disparaître. L'Autorité de la concurrence a clairement indiqué que l'émulation devait conduire à une baisse des tarifs. Cela jouera inéluctablement sur la viabilité de certains des acteurs.

Vous semblez le nier, mais pouvez-vous citer un seul exemple d'une mise en concurrence dans le monde qui n'ait eu aucune répercussion sur la viabilité des acteurs les plus faibles ? Nous savons ce que dit la théorie économique : dans un premier temps, les acteurs les plus fragiles vont disparaître, dans un deuxième temps, les plus forts vont se concentrer, et dans un troisième temps l'efficacité de ces derniers va s'accroître. Le problème, pour citer Keynes, est qu'« à long terme, nous serons tous morts ». Je ne m'intéresse en conséquence qu'aux effets qu'aura ce projet de loi d'ici à cinq ou dix ans. Je ne dis pas que vos objectifs ne sont pas louables ; je rappelle seulement que l'enfer est pavé de bonnes intentions.

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