Intervention de Guillaume Pepy

Réunion du 20 novembre 2012 à 17h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Guillaume Pepy, président de la SNCF :

Pour laisser le plus de temps possible à la discussion, je me limiterai à un propos liminaire assez bref, en mettant l'accent sur ce que je tiens pour les enjeux principaux. Le premier est la qualité du service rendu aux usagers et aux chargeurs de fret, particulièrement dans les zones denses - les très grandes agglomérations. Je sais que la qualité de service n'est pas au niveau attendu par les usagers, mais c'est que la SNCF est engagée dans une course permanente, puisque nous devons améliorer la qualité du service sur un réseau saturé tout en faisant des travaux d'une ampleur sans précédent. Le ministre nous a d'ailleurs demandé d'élaborer le futur plan de rénovation du réseau, celui qui sera mis en oeuvre à partir de 2015, à l'échéance de l'actuel plan Perben.

Pour permettre ces travaux, l'horaire des trains évoluera à la fin de l'année, dans une proportion moindre que l'an dernier. Les modifications concerneront principalement l'Ouest du pays, de Rennes à Toulouse, ainsi que la région Rhône-Alpes. Cette fois, les changements ne se feront pas en une fois, le 9 décembre ; ils commenceront ce jour-là pour se poursuivre au long de l'année 2013 au fil de l'avancement des chantiers puis de leur fermeture.

En évoquant les difficultés que nous affrontons, je ne peux passer sous silence le sinistre décompte des suicides sur le réseau ferroviaire. Le nombre est catastrophique : il y en a eu 56 en octobre, soit deux par jour en moyenne, dont un en Île-de-France, souvent sur les lignes de RER, et un sur le réseau régional. Cela n'explique pas tous les retards, mais les chiffres auront néanmoins augmenté en 2012 de 30 % par rapport à ce qu'ils étaient les trois ou quatre années précédentes.

C'est en Île-de-France que nous devons faire face aux plus grands défis. La régionalisation est engagée, et nous devons pouvoir tenir les engagements pris à l'égard Syndicat des transports d'Île-de-France (STIF).

L'autre enjeu permanent est celui du fret. La situation en Europe est à ce sujet extrêmement mauvaise. Une récente étude relative aux cinq principaux réseaux de fret ferroviaire européens - ceux de France, d'Allemagne, d'Italie, d'Autriche et de Suisse – montre une perte d'ensemble cumulée de 2,5 milliards d'euros pour les années 2009 à 2011. Aucun de ces pays n'a donc trouvé de modèle économique viable pour le fret ferroviaire. Cela doit pousser à s'interroger sur les investissements à consentir mais aussi sur les conditions de la compétitivité avec le transport routier car, alors que nous cherchons à définir pour le transport ferroviaire un cadre social européen harmonisé, il n'y a pas de cadre social du tout pour le transport routier européen.

J'en viens à l'activité de l'entreprise. Sauf pour le fret, la première partie de l'année 2012 a été bonne. La fréquentation des trains s'est fortement accrue en raison de la mise en service de nouveaux TER, de la rénovation de lignes et d'une activité économique assez soutenue. Depuis la rentrée, nous constatons un ralentissement de cette croissance, sauf pour les TER, dont la fréquentation continue d'augmenter de 5 à 7%. C'est rassurant, car cela signifie la poursuite du transfert entre la voiture et le rail.

C'est au Gouvernement, au Parlement et à MM. Jacques Auxiette et Jean-Louis Bianco, chargés de missions de concertation par le ministre des transports, qu'il reviendra de définir la réforme du système ferroviaire ; je n'ai pas de légitimité particulière pour cela. Je puis seulement souligner que la réforme devra permettre à l'entreprise de relever un défi majeur : faire progresser le développement ferroviaire en gardant en ligne de mire la performance et la qualité de service à un coût économique et social supportable par la collectivité. La SNCF doit donc saisir l'opportunité de cette réforme, qui vise à faire du groupe un modèle français d'entreprise publique moderne, pour évoluer vers une ouverture aux régions et à l'Europe plus grande que jamais. La concertation s'engage ; il y aura des étapes européennes et des étapes de territorialisation, parce que cette réforme doit être pour la SNCF l'occasion d'une transformation.

Pour ce qui concerne le Grand Paris, nous sommes engagés dans des propositions concrètes tendant à améliorer la qualité de service, sans attendre la double boucle de métro automatique. L'amélioration de la qualité de service sur les RER est vitale ; il faut trouver les moyens de sa réalisation – je ne parle pas de milliards d'euros supplémentaires mais de travaux qui peuvent être entrepris sans attendre sur les lignes existantes pour améliorer le confort, dé-saturer, améliorer la régularité. Nous y travaillons avec Mme Cécile Duflot, M. Cuvillier et M. Huchon.

S'agissant enfin des enjeux sociaux de l'entreprise, la politique de l'emploi de l'entreprise a changé. Le regain d'activité nous a permis de stabiliser l'emploi : pour la première fois depuis une douzaine d'années, il n'y aura pas de perte d'emplois à la SNCF en moyenne, et 500 contrats d'avenir seront signés au cours des prochaines semaines. Nous sommes engagés depuis un peu plus d'un an, avec les organisations syndicales, dans des plans d'action précis portant sur la qualité de vie au travail et la prévention des risques psychosociaux, de manière que la transformation de la SNCF ne se traduise pas par une fragilisation des salariés. Nous avons aussi engagé depuis trois ans une politique de réduction des accidents du travail dans des activités ferroviaires qui restent dangereuses. Tout cela contribue au climat social au sein de l'entreprise, qui a connu en 2012 le plus bas niveau de jours de grève depuis plus d'une décennie.

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