Ma première question s'adresse à la fois à Mme Touraine et à M. Cahuzac et porte sur le financement de la branche famille. Pourquoi renoncez-vous à redresser les comptes de la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) dont le déficit ne sera pas amélioré en 2013, contrairement aux branches maladie ou vieillesse ? Vous annoncez 700 millions d'euros de recettes nouvelles, mais cela complète juste le panier hérité du transfert à la CADES en 2010. La seule recette supplémentaire est annulée par la hausse de l'allocation de rentrée scolaire. Dans le même temps, dans le projet de loi de finances, vous diminuez de 500 millions d'euros l'avantage procuré par le quotient familial. Vous prenez cet argent aux familles, mais vous ne l'utilisez pas pour financer la politique familiale ou pour redresser les comptes de la branche.
Ne pouvez-vous faire un geste pour la branche famille en affectant à la CNAF, à titre exceptionnel pour 2013, le produit de l'économie sur le quotient familial ? Ce geste, neutre pour les finances publiques, serait une marque d'intérêt envers les familles.
Ma deuxième question s'adresse à Mme la ministre déléguée chargée de la famille. Lundi dernier, à Bercy, lors de la présentation à la presse du projet de loi de financement, vous avez indiqué, s'agissant du complément de libre choix du mode de garde, qu'il s'agissait « pour les classes modestes, de la prise en charge de la rémunération des assistants maternels ». Je crains que vous ne soyez dans l'erreur car le complément ne finance jamais la totalité du salaire de l'assistant maternel, et ce texte n'y changera rien car il ne supprime pas le reste à charge : il dispense seulement d'avancer la partie du salaire qui est ensuite remboursée.
Le complément de libre choix du mode de garde représente 5,7 milliards d'euros en 2013 et intéresse 870 000 familles – elles étaient 317 000 en 2005, lorsque Christian Jacob a créé la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE).
Que de faux espoirs pour une mesure qui rapportera au plus 6 à 12 millions d'euros d'ici deux ans, et dont l'incidence financière s'élèvera au mieux à 11 000e des montants du complément, voire à 110 000e des dépenses de la branche !
En outre, madame la ministre déléguée, vous demandez au Parlement d'autoriser quelque chose qui existe déjà puisque les caisses d'allocations familiales peuvent d'ores et déjà aider les parents à avancer les frais en utilisant leur dotation d'action sociale. Depuis 2007, celle de l'Essonne et la ville de Grigny aident les parents isolés allocataires du Revenu de solidarité active (RSA) majoré à employer une assistante maternelle dans le cadre du parcours de réinsertion. La CNAF pourrait très bien organiser une telle initiative au niveau national. Le Gouvernement pourrait lui en confier la mission dans le cadre de la prochaine convention d'objectifs et de gestion qui prendra effet en janvier 2013 et qu'il serait temps, d'ailleurs, de négocier.
Cette « mesurette », qui risque d'être censurée par le Conseil constitutionnel parce qu'elle s'apparente à un cavalier social, a-t-elle vraiment sa place dans la loi de financement de la sécurité sociale ?
Il y a pourtant des choses à faire. Au cours des auditions que j'ai menées dans le cadre des débats sur la prestation d'accueil du jeune enfant, j'ai reçu de nombreuses assistantes maternelles. Toutes ont évoqué le reste à charge, trop élevé lorsque les deux parents perçoivent un salaire du niveau du SMIC. Le crédit d'impôt qui s'ajoute au complément de libre choix du mode de garde arrive trop tard. Pourquoi ne pas le fusionner avec la prestation et augmenter d'autant son montant, mesure qui aurait parfaitement sa place dans la loi de financement de la sécurité sociale ?
En présentant un texte qui ne contient aucune mesure pour les familles, vous ne réformez pas à la marge, vous marginalisez les familles !
Ma dernière question s'adresse à M. Cahuzac. En 2011, la loi a supprimé l'exonération de 15 points de cotisation patronale en faveur des particuliers employeurs s'acquittant de cette cotisation sur la base de l'assiette réelle. L'économie était faible, mais elle nous a privés d'un levier pour le développement de la garde à domicile. La possibilité de cotiser au forfait demeurait, certes, mais elle fait perdre des droits sociaux aux salariés. Le projet de loi la supprime : pourquoi pas, mais le secteur de l'emploi à domicile, dont le développement ne date que du plan Borloo de 2005, est encore fragile. Pourquoi l'accabler ? Ne pourriez-vous rétablir l'exonération de l'assiette réelle, qui pourrait être compensée par un abaissement du plafond de l'avantage fiscal ? Tout le monde doit certes consentir des efforts, mais ne détruisons pas un secteur si prometteur pour les familles !